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Débats du Sénat (Hansard)

1re Session, 44e Législature
Volume 153, Numéro 132

Le jeudi 8 juin 2023
L’honorable Raymonde Gagné, Présidente


LE SÉNAT

Le jeudi 8 juin 2023

La séance est ouverte à 14 heures, la Présidente étant au fauteuil.

Prière.

[Traduction]

DÉCLARATIONS DE SÉNATEURS

Le cercle des survivantes pour la justice reproductive

L’honorable Yvonne Boyer : Honorables sénateurs, c’est pour moi un honneur de prendre la parole ici aujourd’hui, en territoire algonquin non cédé.

J’interviens pour saluer et célébrer un groupe de femmes courageuses et dévouées avec lesquelles j’ai le privilège de collaborer depuis les dernières années.

Le cercle des survivantes pour la justice reproductive, récemment constitué en société, représente les survivantes de la stérilisation forcée partout au Canada. Le cercle est dirigé par des survivantes de la stérilisation forcée et géré par un conseil d’administration composé de femmes autochtones fortes et influentes qui sont des matriarches, des mères et des grands-mères.

Le cercle des survivantes pour la justice reproductive a pris forme au cours des trois dernières années, grâce aux efforts conjugués de nombreuses personnes, notamment l’aînée Mary Lee, Alisa Lombard, la sénatrice Greenwood et moi, ainsi que plus de 200 survivantes. Je dirais simplement qu’il était pressant que les survivantes de cette horrible pratique disposent d’une voix forte et unie qui s’exprime en leur nom. Être forcée ou contrainte de subir une stérilisation engendre une souffrance et un traumatisme tellement profonds et différents des autres traumatismes que les femmes qui ont vécu cette épreuve ont jugé qu’elles devaient être représentées par les leurs pour avoir en main les atouts qui leur permettront de guérir de la façon qu’elles estiment être la meilleure pour elles.

Nous avons constitué une entité juridique en collaboration avec les survivantes et figures de proue de ce mouvement. En plus de réclamer que justice soit rendue aux femmes qui ont été stérilisées contre leur gré et qu’on mette fin à cette pratique une fois pour toutes au Canada, cette nouvelle entité cherche à tisser des liens avec les communautés autochtones du Canada et du monde entier, afin de favoriser l’entraide entre elles et de bâtir un monde meilleur pour tous les peuples autochtones, où qu’ils soient sur la planète. La stérilisation est une pratique qui vise clairement les peuples autochtones partout dans le monde.

Même après avoir vécu de profonds traumatismes, ces survivantes ne ménagent aucun effort pour qu’aucune de leurs sœurs, de leurs mères, de leurs tantes ou de leurs filles ne se fasse stériliser contre son gré. Je n’en reviens tout simplement pas de leur force de caractère et j’ai l’immense privilège de collaborer avec elles et de les appuyer.

C’est peut-être la première fois que vous entendez parler de ce groupe, mais je sais que ce ne sera pas la dernière. Ces femmes se préparent à changer le monde, et je n’ai aucun doute qu’elles réussiront, parce que ce sont des survivantes qui militent en faveur de la justice en matière de reproduction.

Meegwetch, marsee, merci.

Visiteur à la tribune

Son Honneur la Présidente : Honorables sénateurs, je vous signale la présence à la tribune de Barbara Cartwright, présidente-directrice générale d’Animaux Canada. Elle est l’invitée de l’honorable sénatrice Boyer.

Au nom de tous les honorables sénateurs, je vous souhaite la bienvenue au Sénat du Canada.

Des voix : Bravo!

[Français]

Les foires agricoles

L’honorable Robert Black : Chers collègues, je prends la parole aujourd’hui pour soulever un enjeu préoccupant dans le Canada rural et agricole.

[Traduction]

Les foires et les expositions sont souvent le pivot de nombreuses localités rurales canadiennes. Elles permettent en effet de mieux connaître l’excellent travail des agriculteurs, des transformateurs, des habitants du coin, des organismes et des entrepreneurs, de les mettre en valeur et de célébrer l’ingéniosité des Canadiens.

Aussi essentielles soient-elles, ces activités sont une fois de plus en péril. Le nouveau règlement sur la traçabilité du bétail qu’on propose d’adopter est loin d’être raisonnable et il causera inévitablement du tort aux agriculteurs, aux propriétaires de ranchs et aux bénévoles de partout au pays qui travaillent fort pour organiser des foires et des expositions et pour y participer.

La politique proposée par l’Agence canadienne d’inspection des aliments exigerait des agriculteurs qu’ils obtiennent un numéro d’identification pour leurs installations et qu’ils enregistrent le bétail en conséquence.

Là n’est pas le problème, chers collègues, car les agriculteurs suivent avec plaisir les normes de l’industrie et ils utilisent les mécanismes d’identification pour protéger leurs actifs depuis des années.

Le problème, c’est que les sociétés agricoles et les foires qu’elles organisent auraient le fardeau de tenir un registre des bêtes présentes sur place, de leur attribuer un type de marquage et de faire rapport de leurs déplacements pendant toute la durée de l’activité.

Selon les principaux organismes du domaine, dont l’Association canadienne des foires et expositions et l’association des sociétés agricoles de l’Ontario, la formation et les programmes offerts aux organisateurs de foires et d’expositions sont insuffisants.

Il faudrait que chaque société agricole donne une formation aux bénévoles sur ce processus, qui inclut la vérification de l’identification et de l’étiquette d’oreille de chaque animal, puis la saisie des données sur chaque animal d’élevage présent à la foire ou à l’événement dans la base de données en ligne des administrateurs responsables. Il s’agit non seulement d’une dépense que les foires sont incapables d’assumer, mais aussi d’une mesure qui n’est pas réalisable compte tenu de la diminution du nombre de bénévoles à laquelle toutes les organisations sont confrontées de nos jours.

De plus, le règlement proposé s’appliquera à toute activité qui touche les animaux visés et qui est organisée sur le champ de foire d’une société agricole, et pas seulement à sa foire. Si une société agricole loue ou prête ses installations pour qu’on y tienne une exposition des 4-H, un rassemblement de veaux ou une exposition de bétail, il lui incombera de recueillir et de déclarer les renseignements sur les déplacements des animaux, comme je l’ai expliqué plus tôt. La perte des occasions et des installations qui permettent d’accueillir des programmes concernant le bétail et des journées d’excellence des 4-H pourrait avoir un effet négatif important sur les programmes des 4-H et les jeunes qui y participent en Ontario et partout au Canada.

Comme vous le savez, chers collègues, les programmes des 4-H me tiennent à cœur et je ne serais pas ici aujourd’hui sans eux.

[Français]

Il est important de noter, chers collègues, que les fermiers et fermières ne s’opposent pas à ces mesures.

[Traduction]

Je suis préoccupé par l’énorme fardeau que cela imposerait aux bénévoles du secteur des foires, qui est déjà mis à rude épreuve par la pénurie de main-d’œuvre et les obstacles réglementaires.

J’espère que le gouvernement canadien réglera le problème qui pourrait involontairement mettre fin à de nombreuses foires et expositions et que nous pourrons trouver une solution. Merci, meegwetch.

Eddy Carvery III

L’honorable Wanda Thomas Bernard : Honorables sénateurs, je suis heureuse de prendre la parole aujourd’hui et de me joindre à vous en territoire algonquin. Je me réjouis d’être ici. Ma tâche consiste à applaudir la détermination et le courage de M. Eddy Carvery, qui a manifesté pour obtenir justice et la restauration de sa maison à Africville, en Nouvelle-Écosse.

Africville était une collectivité néo-écossaise d’origine africaine dynamique qui a été démantelée de force dans les années 1960. Plus de 80 familles — 400 résidants — ont été déracinées. Cette relocalisation forcée a poussé Eddy Carvery à passer de la colère à l’action; sa manifestation pour les droits civiques est l’une des plus longues de ce genre au Canada.

Il a commencé à manifester en 1970 en occupant pacifiquement les terrains d’Africville où il avait vécu pendant plus de 50 ans et où il a continué à vivre, refusant de partir tant qu’Africville n’aurait pas été rendue à ses habitants.

Sa manifestation a attiré des sympathisants qui ont reconnu l’importance de sa cause. De nombreux membres de la collectivité et activistes se sont ralliés à M. Carvery, appelant à une résolution des injustices historiques subies par les résidents d’Africville et soulevant les problèmes plus larges découlant du racisme systémique en Nouvelle-Écosse.

En 2010, la ville d’Halifax s’est excusée pour la destruction d’Africville et a créé l’Africville Heritage Trust pour superviser la revitalisation de l’histoire de la collectivité. L’étendue de ces réparations fait toujours l’objet de débats. Nombreux sont ceux qui soutiennent la mission de M. Carvery visant à obtenir des réparations supplémentaires pour le racisme systémique et les préjudices multigénérationnels causés par le déplacement forcé des habitants d’Africville.

(1410)

Comme l’a dit M. Carvery lui-même :

Je suis ici, sur le terrain […] J’ai eu six crises cardiaques […] Notre Seigneur […] a pris un vaurien comme moi et m’a donné cette grande occasion de me battre […] J’applaudis la Société de généalogie d’Africville […] mais […] notre combat ne fait que commencer […]

Aujourd’hui, honorables collègues, je vous invite à vous joindre à moi pour rendre hommage à Eddy Carvery et à sa détermination à créer une société plus juste et équitable.

La lutte contre le racisme et la discrimination systémique en Nouvelle-Écosse est loin d’être terminée. Cependant, la protestation d’Eddy Carvery a été un catalyseur de changement. Elle incite les membres de la communauté à lutter activement pour la réparation des injustices historiques.

Merci, asante.

Visiteurs à la tribune

Son Honneur la Présidente : Honorables sénateurs, je vous signale la présence à la tribune de Son Excellence Bořek Lizec, ambassadeur de la République tchèque au Canada, de l’honorable Olga Richterová, vice-présidente de la Chambre des députés du Parlement de la République tchèque, et de l’honorable Martina Ochodnická, vice-présidente du Comité de la politique sociale. Ils sont accompagnés d’une délégation de députés tchèques. Ils sont les invités de l’honorable sénatrice Omidvar.

Au nom de tous les honorables sénateurs, je vous souhaite la bienvenue au Sénat du Canada.

Des voix : Bravo!

La controverse entourant la frontière du Labrador

L’honorable Fabian Manning : Honorables sénateurs, c’est avec plaisir que je vous présente aujourd’hui le chapitre 77 de « Notre histoire ».

D’une longueur de plus de 3 500 kilomètres, la limite territoriale entre le Québec et la portion labradorienne de notre province constitue la plus longue frontière interprovinciale du Canada. La controverse entourant cette frontière et le litige quant à savoir si le Labrador appartient au Québec ou à Terre-Neuve ont débuté en 1902 lorsque le gouvernement de Terre-Neuve a accordé à une société forestière un permis pour couper des arbres des deux côtés du fleuve Hamilton, qui s’appelle aujourd’hui Churchill.

Le gouvernement québécois considérait que le territoire situé au sud du fleuve faisait partie du Québec et il s’est plaint au secrétaire d’État du Canada. Terre-Neuve a refusé de révoquer le permis.

Deux ans plus tard, le Québec a demandé à Ottawa de soumettre le litige au Comité judiciaire du Conseil privé, à Londres. Ce renvoi à une instance externe et impartiale était justifié, puisque le Canada et Terre-Neuve étaient alors deux membres distincts de l’Empire britannique et que ni l’un ni l’autre n’aurait pu confier l’affaire à ses propres tribunaux.

En mars 1927, le Conseil privé a tranché en faveur de Terre‑Neuve et avalisé le tracé actuel de la frontière.

Au fil des ans, Terre-Neuve a tenté à au moins quatre reprises de vendre le Labrador au Canada, et c’est seulement parce que ce dernier a toujours refusé de payer le prix exigé par Terre-Neuve qu’il n’y a jamais eu d’entente.

La première offre a été faite en 1922, pendant le premier mandat de sir Richard Squires comme premier ministre. Un an plus tard, en 1923, le premier ministre nouvellement élu de Terre-Neuve, William Warren, a fait une nouvelle tentative.

Le 27 décembre 1923, le Daily News a écrit que le prix de vente du Labrador était, selon les rumeurs, de 60 millions de dollars.

Un autre premier ministre, Walter S. Monroe, estimait que le Labrador avait peu de potentiel. Il a déclaré à l’Assemblée législative : « Notre pays ne pourra jamais exploiter ce territoire. »

En 1928, sir Richard Squires est redevenu premier ministre de Terre-Neuve, dont la situation financière de Terre-Neuve se détériorait rapidement. À l’automne 1931, Squires et ses collègues se sont adressés de nouveau à Ottawa. Le ministre des Finances de Terre-Neuve, Peter Cashin, a alors rencontré le premier ministre du Canada, le très honorable R. B. Bennett, et lui a officiellement offert de vendre le Labrador au Canada pour 110 millions de dollars.

Bien qu’intéressé par l’offre et sensible au sort de Terre-Neuve, le premier ministre Bennett a envoyé quelques jours plus tard une lettre au gouvernement de Terre-Neuve pour l’informer qu’en raison des difficultés financières causées par la Grande Dépression, le Canada était dans l’impossibilité de conclure un marché.

Lorsque Terre-Neuve est entrée dans la Confédération, en 1949, les frontières du Labrador ont été confirmées dans les Conditions de l’union de Terre-Neuve au Canada, qui sont devenues depuis la Loi sur Terre-Neuve et qui ont été enchâssées dans la Loi constitutionnelle de 1982.

Il n’est pas difficile d’imaginer ce qui serait arrivé si le Canada avait accepté l’offre de Terre-Neuve et acheté le Labrador.

L’immense quantité de ressources naturelles du Labrador, y compris le potentiel d’énergie hydroélectrique des chutes Churchill et du cours inférieur du fleuve Churchill, les vastes gisements minéraux dans l’Ouest du Labrador et la découverte d’une énorme réserve de nickel, de cuivre et de cobalt dans la baie Voisey, appartiendrait au Canada et à la province de Québec aujourd’hui. L’idée paraîtra inconcevable à certains, mais l’histoire est formelle : c’est presque devenu la réalité.

Le refus du Canada de payer le prix demandé par Terre-Neuve, à au moins quatre occasions distinctes, explique pourquoi à l’heure actuelle mes collègues — les sénateurs Marshall, Petten, Ravalia et Wells — et moi-même pouvons affirmer fièrement que nous sommes originaires de Terre-Neuve-et-Labrador. D’ailleurs, nous en sommes sincèrement très reconnaissants envers le Canada.

Le Mois national de l’histoire autochtone

L’honorable Bev Busson : Honorables sénateurs, je prends la parole aujourd’hui à l’occasion du Mois national de l’histoire autochtone afin de célébrer et d’honorer la richesse de l’histoire, des traditions et des contributions des Premières Nations, des Inuits et des Métis d’un bout à l’autre du Canada, et d’y réfléchir.

Depuis 2009, les Canadiens de partout au pays profitent du mois de juin pour célébrer l’apport des cultures dynamiques et florissantes des communautés autochtones à notre pays, notamment en rendant hommage à la façon dont les connaissances, la créativité et la sagesse des Autochtones constituent des atouts précieux pour la richesse et le patrimoine de notre nation.

Les diverses contributions des Autochtones dans les domaines des arts, des sciences, de l’éducation, de la politique et même du maintien de l’ordre ont contribué à façonner notre pays de manière positive et renforcent les efforts visant à faire passer la vérité et la réconciliation du stade de promesse politique à celui de réalité.

Il n’y a pas si longtemps, j’ai eu l’occasion de participer à l’érection d’un totem autochtone et d’un drapeau haïda au détachement de la GRC de Queen Charlotte dans ma province, la Colombie-Britannique. En passant, en juillet 2022, le village de Queen Charlotte a retrouvé son nom haïda historique et ancestral et est maintenant officiellement connu en Colombie-Britannique et ailleurs au Canada sous le nom de Daajing Giids.

Ce totem de gardien est orné de divers éléments symboliques qui représentent les armoiries traditionnelles du village, un respect mutuel pour les personnes bispirituelles, le fait que le territoire est la terre ancestrale des Haïdas et le fait que les Haïdas considèrent les membres de la GRC comme des gardiens et des protecteurs de leur peuple. Dans le cadre de cette cérémonie, un potlatch traditionnel a été organisé; il y avait des cadeaux et un festin de saumon pour plus de 400 invités, l’événement ayant réuni des Autochtones et des non-Autochtones de toute la communauté. Soulignons qu’à l’époque de la colonisation, jusqu’en 1951, organiser un potlatch pour marquer un événement historique était passible d’emprisonnement.

Malheureusement, le tristement célèbre pensionnat de Kamloops se trouve aussi dans ma province, ce qui nous rappelle une dure réalité : ce mois n’est pas seulement l’occasion de célébrer la culture autochtone, mais aussi celle de renouveler notre engagement collectif envers une véritable réconciliation et de tisser une relation future qui respecte et protège les droits et la dignité de tous les peuples autochtones.

Des Inuits des territoires du Nord jusqu’aux Mi’kmaqs du Canada atlantique et jusqu’aux Haïdas de la Colombie-Britannique en passant par toutes les autres nations, l’abondance et la diversité des communautés autochtones du Canada figurent parmi les éléments qui font la grandeur de ce pays.

Nous devons reconnaître et soutenir leur contribution à la richesse du territoire que nous appelons aujourd’hui le Canada pendant le Mois national de l’histoire autochtone et tout au long de l’année.

Merci, meegwetch, háw’aa.

Visiteur à la tribune

Son Honneur la Présidente : Honorables sénateurs, je vous signale la présence à la tribune de Dara OhUiginn. Il est l’invité de l’honorable sénatrice Hartling.

Au nom de tous les honorables sénateurs, je vous souhaite la bienvenue au Sénat du Canada.

Des voix : Bravo!

Riverview, au Nouveau-Brunswick

Le cinquantième anniversaire

L'honorable Nancy J. Hartling : Honorables sénateurs, je prends la parole aujourd’hui pour rendre hommage à la localité de Riverview, au Nouveau-Brunswick, qui célèbre ses 50 ans.

Le 18 juillet 1973, trois villages — Bridgedale, Gunningsville et Riverview Heights — ont été fusionnés pour former une ville. Une résolution visant à nommer la nouvelle municipalité Riverview a été adoptée et une formidable ville est née. Sa devise est « Un endroit où il fait bon grandir ».

Je suis très fière d’y habiter depuis plus de 50 ans. Je ne suis pas la première sénatrice à venir de Riverview, car je suis les traces de l’honorable Brenda Robertson.

J’aimerais vous en dire plus au sujet de notre ville. Elle est située sur le territoire non cédé du peuple mi’kmaw, au cœur du Canada atlantique et à proximité de la forêt acadienne. La ville de Moncton est de l’autre côté de la rivière et l’aéroport international Roméo Leblanc est seulement à 15 minutes.

De nombreuses attractions spéciales sont à proximité, comme le parc provincial Hopewell Rocks, le parc national Fundy, les magnifiques plages de Shédiac. En outre, elle est située à seulement 70 minutes de l’Île-du-Prince-Édouard et à 40 minutes de la Nouvelle-Écosse.

Il n’y a pas beaucoup de gens sédentaires parmi les habitants de la ville, car de nombreux sites invitent à l’activité physique, notamment le parc-nature Mill Creek, pour la marche, le vélo et le ski, et le sentier Dobson, qui mène jusqu’au parc Fundy et représente une randonnée de 58 kilomètres.

Il y a aussi un agréable sentier le long de la belle rivière Petitcodiac qui nous lie à Moncton. En fait, des quatre coins de la planète, on vient surfer le mascaret qui remonte la rivière deux fois par jour.

(1420)

La rivière Petitcodiac fait partie d’un écosystème exceptionnel qui a longtemps été le moteur économique de la région et qui abrite de nombreuses espèces marines. Le nouveau pont, qui remplace l’ancienne route en remblai, permet de rétablir l’écologie marine en laissant les eaux de marée circuler naturellement. Cette voie permet de se rendre au fond de la baie de Fundy, où se trouvent le parc provincial Hopewell Rocks et le parc national Fundy.

Les premiers habitants de la région sont les Mi’kmaqs, qui vivaient le long de la rivière Petitcodiac. Par la suite, les Acadiens et les colons hollandais s’y sont établis. Aujourd’hui, la ville compte 22 000 habitants, un beau mélange de jeunes familles, de personnes âgées et de familles multiculturelles, qui sont de plus en plus nombreuses. On y trouve tous les services : écoles, bibliothèques, parcs, aires de jeu, casernes dernier cri, résidences pour personnes âgées, centres commerciaux et restaurants.

Le taux des impôts fonciers de Riverview est l’un des plus faibles de la région, ce qui rend la ville très attrayante. Dernièrement, nous avons enfin réussi à obtenir des fonds pour la construction d’un centre récréatif dans le parc naturel de Mill Creek. Ce centre comprendra deux piscines, un centre sportif polyvalent, où se dérouleront des activités sportives et communautaires, ainsi qu’un café et un restaurant.

De nombreuses célébrations ont lieu pour marquer ce 50e anniversaire, dont des festivals, des spectacles, des concerts et des petits-déjeuners aux crêpes. Toutes les fins de semaine, la ville est le théâtre d’une foule d’activités. Je tiens à féliciter tout particulièrement le maire, Andrew LeBlanc, et l’ensemble du conseil municipal de tout ce qui se passe cette année à Riverview, et je les remercie d’avoir créé un beau site Web où l’on peut trouver l’information importante la plus récente.

Quand on se sent vraiment à l’aise quelque part et qu’on a un sentiment d’appartenance, c’est signe qu’on est chez soi. J’ai adoré élever ma famille à Riverview. J’ai hâte de rentrer chez moi cet été pour participer aux festivités du cinquantième anniversaire. Chers collègues, je serais ravie d’accueillir ceux d’entre vous qui ont envie de visiter le Nouveau-Brunswick et, surtout, Riverview.

Merci à tous ceux et celles qui ont fait de Riverview une ville extraordinaire. Félicitations.

Des voix : Bravo!


AFFAIRES COURANTES

L’étude du Cadre fédéral de prévention du suicide

Dépôt du quinzième rapport du Comité des affaires sociales, des sciences et de la technologie auprès du greffier pendant l’ajournement du Sénat

L’honorable Ratna Omidvar : Honorables sénateurs, j’ai l’honneur d’informer le Sénat que, conformément aux ordres adoptés par le Sénat le 28 avril 2022 et le 18 mai 2023, le Comité sénatorial permanent des affaires sociales, des sciences et de la technologie a déposé auprès du greffier du Sénat, le 8 juin 2023, son quinzième rapport intitulé Se laisser guider par les résultats: repenser le Cadre fédéral de prévention du suicide. Je propose que l’étude du rapport soit inscrite à l’ordre du jour de la prochaine séance.

(Sur la motion de la sénatrice Omidvar, l’étude du rapport est inscrite à l’ordre du jour de la prochaine séance.)

La Loi sur l’immigration et la protection des réfugiés

Projet de loi modificatif—Présentation du seizième rapport du Comité des affaires sociales, des sciences et de la technologie

L’honorable Ratna Omidvar, présidente du Comité sénatorial permanent des affaires sociales, des sciences et de la technologie, présente le rapport suivant :

Le jeudi 8 juin 2023

Le Comité sénatorial permanent des affaires sociales, des sciences et de la technologie a l’honneur de présenter son

SEIZIÈME RAPPORT

Votre comité, auquel a été renvoyé le projet de loi C-242, Loi modifiant la Loi sur l’immigration et la protection des réfugiés (visas de résident temporaire pour les parents et les grands-parents), a, conformément à l’ordre de renvoi du mercredi 14 décembre 2022, examiné ledit projet de loi et en fait maintenant rapport sans amendement, mais avec des observations qui sont annexées au présent rapport.

Respectueusement soumis,

La présidente,

RATNA OMIDVAR

(Le texte des observations figure aux Journaux du Sénat d’aujourd’hui, p. 1795.)

Son Honneur la Présidente : Honorables sénateurs, quand lirons-nous le projet de loi pour la troisième fois?

(Sur la motion du sénateur Oh, la troisième lecture du projet de loi est inscrite à l’ordre du jour de la prochaine séance.)

Le Sénat

Préavis de motion tendant à autoriser le Sénat à se réunir en comité plénier afin de recevoir Harriet Solloway, candidate au poste de commissaire à l’intégrité du secteur public

L’honorable Patti LaBoucane-Benson (coordonnatrice législative du représentant du gouvernement au Sénat) : Honorables sénateurs, je donne préavis que, à la prochaine séance du Sénat, je proposerai :

Que :

1.à 15 heures le mercredi 14 juin 2023, le Sénat se forme en comité plénier afin de recevoir Mme Harriet Solloway relativement à sa nomination au poste de commissaire à l’intégrité du secteur public;

2.le comité plénier fasse rapport au Sénat au plus tard 65 minutes après le début de ses travaux;

3.les remarques introductives de la témoin durent un maximum de cinq minutes;

4.si un sénateur n’utilise pas l’entière période de 10 minutes prévue pour les interventions à l’article 12-31(3)d) du Règlement, les réponses de la témoin y comprises, il puisse céder le reste de son temps à un autre sénateur;

Que le 14 juin 2023 le Sénat ne traite que des affaires du gouvernement une fois l’ordre du jour appelé;

Que, nonobstant l’ordre du 21 septembre 2022, le 14 juin 2023 :

1.la séance continue au-delà de 16 heures, au besoin, jusqu’à une durée de temps équivalente au temps requis pour les travaux du comité plénier;

2.si un vote par appel nominal avait été reporté à ce jour-là, la sonnerie ne commence à retentir, pendant 15 minutes, qu’au moment où la séance serait autrement levée ou à 17 h 15, selon la première éventualité, le vote ayant lieu par la suite;

Que les comités devant siéger le 14 juin 2023 après 16 heures sur des affaires du gouvernement soient autorisés à le faire, même si le Sénat siège à ce moment-là, l’application de l’article 12-18(1) du Règlement étant suspendue à cet égard.

La commissaire à l’intégrité du secteur public

Préavis de motion tendant à approuver sa nomination

L’honorable Patti LaBoucane-Benson (coordonnatrice législative du représentant du gouvernement au Sénat) : Honorables sénateurs, je donne préavis que, à la prochaine séance du Sénat, je proposerai :

Que, conformément au paragraphe 39(1) de la Loi sur la protection des fonctionnaires divulgateurs d’actes répréhensibles (L.C. 2005, ch. 46), le Sénat approuve la nomination de Mme Harriet Solloway à titre de commissaire à l’intégrité du secteur public.

Projet de loi modifiant la Loi d’interprétation et apportant des modifications connexes à d’autres lois

Première lecture

L’honorable Marc Gold (représentant du gouvernement au Sénat) dépose le projet de loi S-13, Loi modifiant la Loi d’interprétation et apportant des modifications connexes à d’autres lois.

(Le projet de loi est lu pour la première fois.)

Son Honneur la Présidente : Honorables sénateurs, quand lirons-nous le projet de loi pour la deuxième fois?

(Sur la motion du sénateur Gold, la deuxième lecture du projet de loi est inscrite à l’ordre du jour de la séance d’après-demain.)

[Français]

Projet de loi sur les droits de la personne à l'échelle internationale

Projet de loi modificatif—Première lecture

Son Honneur la Présidente annonce qu’elle a reçu de la Chambre des communes le projet de loi C-281, Loi modifiant la Loi sur le ministère des Affaires étrangères, du Commerce et du Développement, la Loi sur la justice pour les victimes de dirigeants étrangers corrompus (loi de Sergueï Magnitski), la Loi sur la radiodiffusion et la Loi interdisant les armes à sous-munitions, accompagné d’un message.

(Le projet de loi est lu pour la première fois.)

Son Honneur la Présidente : Honorables sénateurs, quand lirons-nous le projet de loi pour la deuxième fois?

(Sur la motion de la sénatrice Martin, la deuxième lecture du projet de loi est inscrite à l’ordre du jour de la séance d’après‑demain.)

(1430)

[Traduction]

Projet de loi de Jane Goodall

Adoption de la motion tendant à autoriser le Comité de l’agriculture et des forêts et le Comité de l’énergie, de l’environnement et des ressources naturelles à étudier la teneur du projet de loi et le Comité des affaires juridiques et constitutionnelles à prendre en considération les documents et les témoignages reçus au cours de l’étude du projet de loi

L’honorable Marty Klyne : Honorables sénateurs, avec le consentement du Sénat et nonobstant l’article 5-5j) du Règlement, je propose :

Que, nonobstant toute disposition du Règlement, tout ordre antérieur ou toute pratique habituelle, si le projet de loi S-241, Loi modifiant le Code criminel et la Loi sur la protection d’espèces animales ou végétales sauvages et la réglementation de leur commerce international et interprovincial (grands singes, éléphants et certains autres animaux), est adopté à l’étape de la deuxième lecture :

1.il soit renvoyé au Comité sénatorial permanent des affaires juridiques et constitutionnelles;

2.le Comité sénatorial permanent de l’agriculture et des forêts et le Comité sénatorial permanent de l’énergie, de l’environnement et des ressources naturelles soient tous les deux autorisés à étudier, afin d’en faire rapport, la teneur du projet de loi;

3.le Comité sénatorial permanent des affaires juridiques et constitutionnelles soit autorisé à prendre en considération tout document public et tout témoignage public reçu par l’un ou l’autre des comités autorisés à étudier la teneur du projet de loi, de même que tout rapport au Sénat sur la teneur du projet de loi par l’un ou l’autre de ces comités, au cours de son étude du projet de loi.

Son Honneur la Présidente : Le consentement est-il accordé, honorables sénateurs?

Des voix : D’accord.

Son Honneur la Présidente : Vous plaît-il, honorables sénateurs, d’adopter la motion?

Des voix : D’accord.

(La motion est adoptée.)

[Français]

Le Sénat

Préavis de motion tendant à décerner le titre de « citoyen canadien honoraire » à Vladimir Kara-Murza et à demander sa libération immédiate

L’honorable Pierre J. Dalphond : Honorables sénateurs, je donne préavis que, à la prochaine séance du Sénat, je proposerai :

Que le Sénat reconnaisse que le prisonnier politique russe Vladimir Kara-Murza — lauréat du prix des droits de l’homme Václav Havel, collaborateur émérite du Centre Raoul Wallenberg pour les droits de la personne, ami du Parlement du Canada — est un défenseur internationalement reconnu des droits de la personne et de la démocratie, dont l’emprisonnement injustifié pour avoir manifesté son désaccord avec la guerre injuste en Ukraine est emblématique des milliers de prisonniers politiques en Russie et dans le monde;

Qu’il soit résolu par le Sénat de décerner le titre de « citoyen canadien honoraire » à Vladimir Kara-Murza et de demander sa libération immédiate.


[Traduction]

PÉRIODE DES QUESTIONS

Le Bureau du Conseil privé

Le rapporteur spécial indépendant sur l’ingérence étrangère

L’honorable Donald Neil Plett (leader de l’opposition) : Ma question s’adresse encore au leader du gouvernement Trudeau au Sénat.

Monsieur le leader, hier, vous avez dit que mes questions sur le prétendu rapporteur et son rapport n’étaient pas fondées sur des faits ou sur la vérité. Vous n’aimez peut-être pas entendre ce que je dis, mais j’établis quand même des faits. C’est un fait que le rapporteur a admis ne pas disposer des renseignements que le Service canadien du renseignement de sécurité a fournis à Erin O’Toole. C’est un fait que le rapport du rapporteur ne mentionne pas du tout la fondation Trudeau. C’est un fait que son rapport ne mentionne pas non plus les postes de police que Pékin a établis dans notre pays. Monsieur le leader, c’est aussi un fait que des groupes de la diaspora qui ont subi l’ingérence du régime de Pékin sont venus ici hier pour demander instamment la tenue d’une enquête publique.

Lequel de ces faits contestez-vous, monsieur le leader?

L’honorable Marc Gold (représentant du gouvernement au Sénat) : Je vous remercie de la question.

De toute évidence, vous avez mal compris ma réponse. Je ne conteste aucunement les faits que vous avez très calmement énumérés. Ce que j’ai contesté — et c’est à cela que je faisais allusion —, ce sont les insinuations — et même les affirmations — selon lesquelles ces faits — que vous avez d’ailleurs présentés sous un angle quelque peu différent aujourd’hui, mais peu importe — feraient de l’honorable David Johnston quelqu’un qui n’est pas impartial, que cela nuirait en quelque sorte à la crédibilité de son rapport, et même que sa nomination et son rapport seraient tout simplement des tentatives de dissimulation pour aider M. Trudeau. Voilà les affirmations qui ne s’appuyaient pas et qui ne s’appuient toujours pas sur des faits, et que je continuerai de contester chaque fois qu’elles seront mises de l’avant de quelque façon que ce soit.

Le sénateur Plett : Monsieur le leader, voici quelques faits supplémentaires.

Mardi, le prétendu rapporteur nommé par le premier ministre a révélé avoir pris la décision de ne consulter ni le directeur général des élections, ni le commissaire aux élections fédérales, ni le député qui a quitté le caucus libéral après avoir été accusé de très graves allégations. Il a également confirmé que le premier ministre était au courant d’irrégularités particulières entourant la nomination du député en question, mais qu’il ne savait pas que sa conseillère juridique avait fait don de milliers de dollars au Parti libéral fédéral. Les stratèges libéraux et néo-démocrates fournissent gratuitement au rapporteur spécial des conseils sur la façon de s’adresser aux médias. Puisqu’il bénéficie de conseils gratuits, force est de se demander pourquoi l’argent des contribuables devait servir à payer la firme Navigator jusqu’à ce que le rapporteur constate, bien sûr, qu’il y avait de sérieux motifs de ne pas faire affaire avec elle — mais de toute évidence, il ne s’en est rendu compte qu’après en avoir retenu les services.

Monsieur le leader, les Canadiens sont stupéfaits. Reste-t-il au sein du gouvernement Trudeau quelqu’un qui a encore un peu de bon sens? Qui exigera la tenue d’une enquête publique?

Le sénateur Gold : Je vous remercie de cette question complémentaire.

Je crois que les Canadiens sont passablement préoccupés, à juste titre d’ailleurs, par divers enjeux qui affectent leur quotidien, notamment les incendies de forêt. Je leur ai effectivement répondu lors de presque toutes les périodes des questions, et je répète encore une fois ce que j’ai dit.

Le gouvernement fait confiance au rapporteur spécial et souscrit à son rapport, qui fournit de précieux renseignements quant à la façon dont le Canada peut mieux se protéger et propose un plan pour poursuivre le travail à cet égard.

Je m’abstiens de tout commentaire additionnel sur la façon dont vous qualifiez et dépeignez l’honorable David Johnston.

Les finances

L’état de l’économie

L’honorable Leo Housakos : Ma question s’adresse au leader du gouvernement. Elle concerne Justin Trudeau et la politique monétaire de son gouvernement, ou plutôt l’absence de politique monétaire.

Le gouvernement Trudeau dépense comme un marin en goguette, avec pour résultats des déficits et une dette record, ainsi que des taux d’intérêt à leur plus haut niveau en vingt ans. Ces mauvaises politiques coûtent fort cher aux Canadiens, et ils en souffrent. Nous le voyons et nous le ressentons.

Ma question est simple : comment se fait-il que le premier ministre Trudeau et son gouvernement ne voient pas la souffrance des Canadiens? Comment se fait-il que vous ayez pris la parole au Sénat hier pour dire que vous étiez fier de ces résultats économiques plutôt que d’accepter la honte et la défaite qu’ils entraînent? Ma question est la suivante : comment cela se fait-il?

L’honorable Marc Gold (représentant du gouvernement au Sénat) : Je vous remercie de votre question.

Le gouvernement estime que les investissements qu’il réalise, y compris l’endettement qui découle de la dette nationale, sont à la fois nécessaires, prudents et responsables afin d’aider les Canadiens en cette période difficile.

Le gouvernement estime aussi — et les faits sont indéniables — que sa gestion de l’économie au cours des dernières années fait l’envie du monde occidental. Notre position et notre croissance économique sont les plus fortes parmi les pays du G7. Nos taux d’emploi sont plus élevés qu’ils étaient avant la pandémie. L’inflation a été maîtrisée. D’ailleurs, si la Banque du Canada a augmenté les taux d’intérêt — ce qui a indubitablement des conséquences sur la vie quotidienne des Canadiens —, c’est pour faire baisser l’inflation, qui nuit à tous les Canadiens à long terme.

Le taux de chômage atteint un plancher quasi record. La participation au marché du travail des femmes âgées de 25 à 54 ans a atteint un niveau record plus tôt cette année.

L’économie se porte bien grâce aux entreprises, aux travailleurs, aux provinces et aux territoires, ainsi qu’à la contribution du gouvernement fédéral, qui peut se féliciter d’avoir géré l’économie du pays de manière responsable, au même titre que tous les autres secteurs du pays.

Le sénateur Housakos : Le gouvernement ne peut s’octroyer le mérite que d’une seule chose : ses politiques monétaires exaspérantes qui exacerbent l’inflation. C’est la seule chose dont vous pouvez vous attribuer le mérite.

J’ajouterai ceci, sénateur Gold : au moins, les marins en goguette, eux, dépensent leur propre argent.

(1440)

Ma question concerne la Banque du Canada, qui, ces derniers mois, a reconnu avoir fait erreur en suivant la politique présentée par le gouvernement pour gérer l’inflation. Elle a tardé à réagir, et ce retard a exacerbé la situation. Nous commençons à en voir les répercussions avec les hausses rapprochées des taux d’intérêt. Cela dit, la Banque du Canada a au moins reconnu qu’elle s’était trompée dans ses prévisions.

Quand le gouvernement reconnaîtra-t-il enfin qu’il avait tort en ce qui concerne sa politique monétaire et son approche en matière de dépenses? La seule chose que le gouvernement Trudeau fait, c’est de jeter le blâme sur tout le monde, sauf sur lui-même. Quand le gouvernement assumera-t-il sa responsabilité et admettra-t-il que sa politique monétaire des huit dernières années nous a poussés au bord de la catastrophe économique?

Le sénateur Gold : Je vous remercie de la question. La position du gouvernement est, comme je viens de le dire, qu’il gère ses affaires et celles de l’État de manière prudente et responsable dans l’intérêt des Canadiens.

[Français]

La santé

L’égalité dans la recherche en matière de santé

L’honorable Renée Dupuis : Ma question s’adresse au leader du gouvernement au Sénat. Les recherches des récentes années en matière de santé des femmes démontrent des déficiences dans la connaissance que nous avons accumulée sur la façon dont les maladies affectent les femmes. Une partie du déficit dans notre compréhension de ces questions vient directement du fait que les recherches dans le domaine médical ont été exclusivement menées sur des animaux mâles et sur des hommes.

En fait, les femmes ont longtemps été systématiquement exclues des échantillonnages pour diverses raisons, dont la facilité et les préjugés. Ce déficit se manifeste de différentes manières : déficit dans la capacité à reconnaître les symptômes des femmes, déficit dans les traitements que les femmes reçoivent, déficit de la prise en charge clinique, risque de réhospitalisation des femmes de 55 ans et moins qui est presque le double des hommes du même âge.

Or, les milieux médicaux reconnaissent maintenant l’importance de la parité dans la recherche. Selon eux, il n’y a pas de raison d’adopter une norme masculine des symptômes de crise cardiaque par exemple. Une telle norme n’est pas justifiée et elle est biaisée. On sait maintenant que les femmes et les hommes sont à risque de maladies cardiovasculaires. Jusqu’à très récemment, on a cru que seuls les hommes l’étaient parce qu’on a axé la recherche exclusivement sur eux, et on en a conclu que les femmes victimes de troubles cardiovasculaires manifestaient des symptômes atypiques par rapport aux hommes.

En fait, on se rend compte que les femmes et les hommes sont également à risque de telles maladies, mais on ne fait que commencer à reconnaître comment les symptômes se manifestent chez les femmes, parce que des recherches ont été entreprises par des femmes et avec elles.

Nous savons que la recherche dans le domaine de la santé, de même que les soins de santé, sont largement subventionnés par les fonds publics. Pouvez-vous nous confirmer que tous les organismes et programmes fédéraux de recherche en santé exigent désormais que les échantillonnages des recherches sur les maladies non spécifiques aux hommes ou aux femmes comprennent des femmes et des hommes?

L’honorable Marc Gold (représentant du gouvernement au Sénat) : Je remercie l’honorable sénatrice de sa question. Il est évident que les femmes font face à des difficultés uniques lorsqu’il s’agit de faire l’objet de recherches afin d’améliorer les résultats cliniques. Je pense aux cancers de l’ovaire et de l’utérus, à la santé sexuelle et génétique, à la violence fondée sur le genre et à la santé durant la grossesse.

La nouvelle Initiative nationale de recherche sur la santé des femmes, lancée en octobre 2022, fera la promotion d’un programme de recherche coordonné qui porte sur les secteurs sous étudiés et hautement prioritaires. Cet investissement stimulera la recherche visant à améliorer les résultats de santé et à éliminer les écarts sur le plan de l’accès aux soins. Pour ce qui est de votre question plus précise, je la porterai à l’attention des ministres responsables.

La sénatrice Dupuis : Pouvez-vous déposer des données désagrégées sur les fonds de recherche alloués par des organismes et des programmes fédéraux : la liste des échantillonnages requis pour chaque demande de subvention dans les cinq dernières années; la liste des échantillonnages déclarés à l’appui de chaque demande qui a été subventionnée au cours des cinq dernières années et la liste des échantillonnages déclarés dans les rapports produits sur chaque subvention obtenue au cours des cinq dernières années?

Le sénateur Gold : Je remercie l’honorable sénatrice de sa question.

Le Canada est le premier pays à recueillir et publier des données sur la diversité de genre provenant d’un recensement national. Sur quelque 30 millions de Canadiens et Canadiennes de 15 ans et plus vivant dans un ménage privé en mai 2021, plus de 100 000 se sont déclarés transgenres ou non-binaires, ce qui représente 0,33 % de la population de ce groupe d’âge. Pour ce qui est des détails de votre question, je devrai me renseigner et vous revenir avec une réponse.

[Traduction]

L’environnement et le changement climatique

La fonte des glaces de l’Arctique

L’honorable Mary Coyle : Ma question s’adresse au représentant du gouvernement au Sénat.

Sénateur Gold, aujourd’hui, le 8 juin, nous soulignons la Journée mondiale des océans. Partout dans le monde, les gens se rassemblent pour protéger et restaurer les océans et pour militer en faveur de la stabilisation des conditions climatiques. La côte arctique du Canada fait 162 000 kilomètres, et la glace de mer s’étend sur trois territoires et quatre provinces, surtout en territoire autochtone.

Hier, CBC nous a appris que, d’après une nouvelle étude, il se pourrait, selon l’intensité des émissions mondiales de gaz à effet de serre, qu’il n’y ait plus de banquise d’été en Arctique dès 2030, soit une décennie plus tôt que les dernières prévisions. La fonte des glaces aurait des répercussions importantes sur la population de l’Arctique puisqu’elle endommagerait les infrastructures construites sur un pergélisol de plus en plus instable et qu’elle menacerait le mode de vie des habitants de l’Arctique.

Des étés sans glace seraient désastreux pour les écosystèmes et les espèces fragiles qui dépendent de la glace de mer, comme les algues et les ours polaires. Le Canada est un pays arctique. Or, dans la mesure où la calotte glaciaire et la neige de l’Arctique reflètent 80 % des radiations du soleil, l’Arctique est le climatiseur de la Terre. Les étés sans banquise arctique entraîneront des conditions climatiques encore plus extrêmes dans le reste du Canada et au-delà de ses frontières.

Sénateur Gold, que compte faire le gouvernement canadien pour prévenir les multiples conséquences graves que pourrait avoir la disparition de la banquise d’été dans l’océan Arctique?

L’honorable Marc Gold (représentant du gouvernement au Sénat) : Je vous remercie d’avoir posé cette question, car il s’agit d’un dossier important. Pour toutes les raisons que vous mentionnez, l’accélération de la fonte des glaces de l’Arctique est un véritable problème, mais il y en a d’autres. Je pense par exemple aux difficultés que rencontrent les personnes qui comptent sur la chasse et la cueillette pour se nourrir — le problème était déjà patent quand je me suis rendu sur place, il y a quelques années —, aux opérations de recherche et de sauvetage, qui vont aller en augmentant et, bien sûr, à notre souveraineté. Le gouvernement a pris des mesures pour améliorer la santé des océans et je pourrais... il y a beaucoup de choses à dire là-dessus.

Pour répondre à votre question, puisqu’il y a de moins en moins de glace en Arctique, le ministère des Pêches et des Océans, en collaboration avec la Garde côtière canadienne, a accru sa présence sur place et s’est doté de nouveaux moyens à court terme pour défendre la souveraineté du pays ainsi que la sécurité des personnes touchées et pour réagir aux risques accrus de catastrophes climatiques. Il s’emploie en outre, en collaboration avec le milieu scientifique, à trouver des façons d’atténuer les effets de ce qui, du moins pour le moment, semble être une tendance dangereuse et irréversible.

La sénatrice Coyle : Je vous remercie pour votre réponse. Je suis impatiente d’en savoir plus sur les mesures d’atténuation.

Sénateur Gold, pourriez-vous nous dire comment le Canada collabore avec les autres pays de l’Arctique pour relever les défis liés à la fonte des glaces marines?

Le sénateur Gold : Dans ce contexte, bien sûr, le gouvernement du Canada poursuit ses efforts — avec d’autres nations — pour lutter contre les changements climatiques et, à cet égard, il s’appuie sur la science et la collaboration avec ses partenaires.

En ce qui concerne les questions relatives à l’Arctique en particulier, le Canada rencontre régulièrement ses partenaires circumpolaires pour discuter de questions telles que celles que vous avez mentionnées, et d’autres, concernant les changements climatiques, la sécurité et d’autres sujets du même ordre.

Il y a quelques années, comme vous le savez, le gouvernement a publié son cadre stratégique pour l’Arctique et le Nord, qui définit les grandes priorités du gouvernement et les investissements dans l’Arctique pour l’horizon 2030 et au-delà. Ce cadre a été élaboré en collaboration avec les habitants du Nord, les gouvernements territoriaux et provinciaux, les Premières nations, les Inuits et les Métis.

(1450)

Encore une fois, le Canada travaille avec d’autres partenaires dans la région de l’Arctique pour résoudre ces problèmes d’intérêt commun.

Le patrimoine canadien

La Loi sur les langues officielles

L’honorable Dennis Glen Patterson : Je pose à nouveau aujourd’hui la question que j’ai posée hier, mais cette fois-ci, je m’adresse au leader du gouvernement au Sénat.

Sénateur Gold, je crois comprendre que le gouvernement a confirmé que le projet de loi C-13, dont le Comité sénatorial permanent des langues officielles est saisi actuellement, comporte une erreur de rédaction importante. Je crois aussi comprendre qu’il ne s’agit pas d’une simple erreur de grammaire ou de typographie. Cette erreur, c’est l’exclusion d’une disposition de coordination qui garantirait que d’anciens employés et des employés potentiels à l’extérieur du Québec pourront tout de même soumettre des plaintes au titre des paragraphes 18(1.1) et 18(1.2) de la Loi sur l’usage du français au sein des entreprises privées de compétence fédérale. En corrigeant cette erreur, le Sénat protégerait les minorités en garantissant que les francophones à l’extérieur du Québec aient les mêmes droits que ceux qui habitent au Québec.

Puisque vous êtes le représentant du gouvernement au Sénat, j’aimerais vous demander ceci. Êtes-vous au courant de cette erreur? Avez-vous communiqué avec le comité pour l’informer de cette erreur et trouver un moyen de la corriger?

L’honorable Marc Gold (représentant du gouvernement au Sénat) : Je vous remercie de la question, sénateur Patterson, ainsi que de me donner l’occasion de fournir au Sénat la réponse que je vous ai fournie en privé hier.

Effectivement, le gouvernement est parfaitement conscient de ce problème.

Premièrement, chers collègues, cette erreur de rédaction n’a aucune incidence juridique immédiate, puisque l’article concerné n’entrera en vigueur qu’au deuxième anniversaire de la date de mise en œuvre du projet de loi, après sa sanction royale. Je vous prierais de garder cela à l’esprit tandis que je fournis le reste de mon explication.

Le gouvernement a été avisé de cette erreur et examine les moyens législatifs autres que le projet de loi C-13 auxquels il pourrait recourir, au besoin, pour la corriger, comme l’insertion d’une disposition à cette fin dans un projet de loi d’ordre financier ou la présentation d’un projet de loi distinct. Je répète : cette erreur n’aura aucun effet au moment où le projet de loi recevra la sanction royale. Étant donné l’importance d’adopter rapidement le projet de loi C-13, le gouvernement examine des façons de corriger l’erreur autrement que par la voie du projet de loi C-13.

Chers collègues, ce n’est pas la première fois qu’un tel problème survient. Ceux d’entre vous qui n’ont pas été nommés récemment se souviendront sans doute qu’un problème semblable est survenu dans le cas du projet de loi C-12, qui modifiait la Loi sur la sécurité de la vieillesse. Une erreur technique a été relevée alors que l’étude du projet de loi en était aux dernières étapes. Le gouvernement a promis de la rectifier séparément pour ne pas retarder l’adoption et la sanction royale du projet de loi. Nous avons honoré cette promesse quelques semaines plus tard par la voie d’un instrument législatif distinct.

Au nom du gouvernement du Canada, je peux assurer au Sénat que, comme il l’a fait auparavant, le gouvernement du Canada honorera cette promesse.

Le sénateur D. Patterson : Je vous remercie, sénateur Gold. Je suis content que vous n’ayez pas dit que la solution se trouverait dans une loi corrective. Je ne crois pas ce que ce soit la solution, ni même un projet de loi omnibus d’exécution du budget, aussi modeste soit-il, qui n’est pas fait pour apporter des modifications aux lois.

Convenez-vous avez moi, sénateur Gold, que la meilleure façon de corriger cette erreur serait de présenter directement une mesure législative à cet effet?

Le sénateur Gold : Je vous remercie, sénateur. Je comprends votre point de vue et je le respecte. Le gouvernement étudie ses options. Je vais très certainement prendre votre suggestion en considération. Je peux toutefois assurer aux sénateurs que le gouvernement agira de manière ouverte et transparente. J’y verrai personnellement, que ce projet de loi soit présenté à l’autre endroit, ou même ici, pourquoi pas.

Pour le moment, le gouvernement n’a pas choisi le mécanisme qu’il compte utiliser, mais il y réfléchit intensément. Je vous répète qu’en tant que représentant du gouvernement, je m’engage à ce que cela se fasse rapidement et je répète que cette erreur n’aura aucun effet dans l’immédiat, parce que la disposition en cause n’entrera en vigueur que deux ans après la sanction royale.

Les transports

Le changement de nom du pont de la Confédération

L’honorable Brian Francis : Ma question s’adresse au représentant du gouvernement au Sénat.

En mai 2022, l’Assemblée législative de l’Île-du-Prince-Édouard a adopté à l’unanimité une motion pressant le gouvernement fédéral de changer le nom du pont de la Confédération pour « traversée Epekwitk ». Ce changement permettrait de corriger une erreur manifeste commise à la fin des années 1990, qui a conduit au choix du nom actuel au lieu de celui qui est maintenant proposé, qui reconnaît et célèbre la présence des Mi’kmaqs sur ces terres où ils vivent depuis la nuit des temps.

Sénateur Gold, pourriez-vous indiquer au Sénat si le gouvernement fédéral a l’intention de rebaptiser le pont de la Confédération « traversée Epekwitk »? Si oui, ce dossier a-t-il avancé au cours de la dernière année? Quand peut-on s’attendre à ce que le changement de nom ait lieu? Si le gouvernement n’a pas l’intention de donner suite à cette demande, pourriez-vous nous expliquer pourquoi?

L’honorable Marc Gold (représentant du gouvernement au Sénat) : Je vous remercie. Je vais porter votre question à l’attention du ministre concerné et je vous reviendrai le plus rapidement possible avec la réponse.

[Français]

Les services publics et l’approvisionnement

Les achats d’aéronefs

L’honorable Claude Carignan : Ma question s’adresse au leader du gouvernement au Sénat.

Monsieur le leader, le gouvernement du Canada s’apprête à procéder au remplacement de 14 avions CP-140 Aurora, des avions de surveillance qui sont utilisés par l’Aviation royale canadienne pour patrouiller sur les côtes canadiennes.

Or, dans le cadre du système d’approvisionnement de l’armée, dont l’inefficacité est bien connue, il semble que le gouvernement du Canada a décidé d’accorder ou veut accorder ce contrat de 9 milliards de dollars de gré à gré à une compagnie aérienne — Boeing, pour ne pas la nommer — plutôt que de faire un appel d’offres public pour lequel un consortium canadien, Bombardier et General Dynamics, pourrait faire une soumission et fournir un équipement équivalent.

C’est un peu le monde à l’envers, parce que, d’habitude, on procède de gré à gré pour favoriser une entreprise canadienne, mais, dans ce cas-ci, on procède de gré à gré pour défavoriser une entreprise canadienne.

Le leader du gouvernement peut-il nous expliquer ce qui se passe dans la tête de ce gouvernement?

L’honorable Marc Gold (représentant du gouvernement au Sénat) : Le gouvernement du Canada prend ses décisions en respectant les besoins de nos forces armées et de nos priorités dans ce domaine. Il va continuer à prendre ces décisions pour le bien-être des communautés servies et pour le Canada.

Le sénateur Carignan : En parlant de prendre des décisions pour le besoin des forces armées, on a appris cette semaine que nos militaires déployés en Lettonie sont tellement sous-équipés qu’ils doivent eux-mêmes acquérir, avec leur argent personnel, de l’équipement de protection essentiel.

Pourtant, le gouvernement ne dépense pas tout son budget en acquisitions. En 2021, il a laissé sur la table 1 milliard de dollars prévus au budget sans le dépenser.

Comment pouvez-vous expliquer aux militaires canadiens qu’ils sont obligés de payer de leur poche l’achat d’équipement de protection, alors que leurs collègues — les Danois en particulier — sont plus équipés, et que le gouvernement danois achète l’équipement au Canada?

Le sénateur Gold : Il est évident que nos forces armées ont besoin de tout ce qu’il faut pour faire leur bon travail pour défendre notre pays et nos intérêts.

Le gouvernement continue d’investir davantage dans les forces militaires. Les faits que vous avez soulignés sont très regrettables. On m’a avisé que le gouvernement du Canada va continuer d’appuyer nos Forces canadiennes avec l’argent nécessaire de façon prudente.

[Traduction]

La sécurité publique

L’ingérence étrangère

L’honorable Donald Neil Plett (leader de l’opposition) : Monsieur le leader, il y a deux ans, avant que le gouvernement Trudeau n’ait recours aux services d’un prétendu rapporteur spécial pour camoufler ce qu’il savait de l’ingérence de Pékin dans nos élections, il était fort occupé à cacher la vérité sur l’atteinte à la sécurité qui a eu lieu au Laboratoire national de microbiologie, situé à Winnipeg.

D’abord, le premier ministre a déclaré que poser des questions à ce sujet était raciste. Ensuite, son gouvernement a défié quatre ordres de la Chambre des communes de fournir des documents non censurés. Finalement, il a intenté des poursuites contre le Président de la Chambre des communes pour ne pas divulguer ces documents. Maintenant, le gouvernement Trudeau a retenu les services de trois anciens juges pour contrôler le travail d’un groupe spécial de quatre députés chargé d’examiner les documents.

(1500)

Monsieur le leader, ce travail devrait être confié à un comité parlementaire. C’est toujours la même histoire avec le gouvernement Trudeau : aucun respect à l’égard du Parlement, aucun leadership, aucun sens commun, aucune transparence et aucune reddition de comptes. Pourquoi en est-il ainsi, monsieur le leader?

L’honorable Marc Gold (représentant du gouvernement au Sénat) : Je vous remercie de la question. Il est irresponsable de la part des partis de l’opposition au Sénat d’avoir tenté de joindre leurs voix pour exiger la publication de renseignements sensibles. Le gouvernement du Canada a toujours souhaité collaborer avec les partis de l’opposition dans l’espoir que ceux-ci acceptent un processus responsable pour l’examen de tels documents pour que les parlementaires puissent faire leur travail sans compromettre ni la sécurité nationale du Canada ni la sécurité des agents du renseignement qui travaillent sur le terrain au nom des Canadiens.

Le sénateur Plett : Évidemment, j’ai dit « documents non censurés », monsieur le leader.

Monsieur le leader, lors d’une période des questions il y a près de deux ans, je vous avais demandé des renseignements généraux sur le licenciement de deux scientifiques qui travaillaient au laboratoire de Winnipeg. Je vous avais également demandé d’indiquer les liens entre le laboratoire en question et les scientifiques militaires à la solde de Pékin. J’attends toujours la réponse, mais je n’en suis pas étonné. Si le gouvernement Trudeau est disposé à défier une ordonnance de la Chambre et à intenter une poursuite judiciaire contre le Président pour dissimuler la vérité, il va sans dire qu’il ne lèvera pas le petit doigt pour répondre à ma question.

Ce sera le comité composé de trois anciens juges, dont j’ai fait mention, qui décidera de l’information qui sera divulguée aux députés et à la population. Selon le protocole d’entente, les décisions des juges seront définitives et non susceptibles de contrôle judiciaire.

Monsieur le leader, pourquoi le gouvernement Trudeau refile-t-il encore une fois ses responsabilités à d’autres parties? Les dirigeants libéraux sont soit trop incompétents, soit trop compromis pour dire aux Canadiens ce qui s’est vraiment passé au laboratoire de Winnipeg.

Monsieur le leader, de deux choses l’une, ils sont soit trop incompétents, soit trop compromis. Qu’en est-il?

Le sénateur Gold : Ni l’un ni l’autre.

Il y a 6 ans et demi, lorsque je suis arrivé au Sénat, j’avais l’espoir qu’on recommence à voir le Sénat comme on le concevait à son origine, un endroit où on étudie les questions et les enjeux sérieux de façon sérieuse et moins partisane. Malheureusement, ce n’est pas une vision commune à tous les sénateurs.

Ce n’est pas une question d’incompétence ni de camouflage. Le gouvernement a la responsabilité de veiller à ce que les enjeux qui touchent la sécurité nationale soient abordés de façon responsable...

[Français]

Son Honneur la Présidente : Veuillez laisser le sénateur répondre aux questions, s’il vous plaît.

[Traduction]

Le sénateur Gold : Peu importe le gouvernement en place, il a la responsabilité d’aborder ces enjeux de façon responsable. À cet égard, je continue d’insister sur la distinction entre l’importance des enjeux soulevés au Sénat et la façon dont ils sont soulevés et les libertés que s’accordent parfois les sénateurs qui posent des questions lorsqu’ils déforment les faits et font des suppositions.


ORDRE DU JOUR

Projet de loi sur le renforcement de la protection de l’environnement pour un Canada en santé

Projet de loi modificatif—Message des Communes—Motion d’adoption des amendements des Commune—Report du vote

L’ordre du jour appelle :

Reprise du débat sur la motion de l’honorable sénateur Gold, c.p., appuyée par l’honorable sénatrice LaBoucane-Benson,

Que, en ce qui concerne le projet de loi S-5, Loi modifiant la Loi canadienne sur la protection de l’environnement (1999), apportant des modifications connexes à la Loi sur les aliments et drogues et abrogeant la Loi sur la quasi-élimination du sulfonate de perfluorooctane, le Sénat accepte les amendements apportés par la Chambre des communes;

Qu’un message soit transmis à la Chambre des communes pour l’en informer.

L’honorable Dennis Glen Patterson Honorables sénateurs, il y a près d’un an, le 22 juin 2022, au Sénat, j’ai participé au débat sur le projet de loi S-5, et je me suis exprimé sur les changements que j’estimais nécessaires non seulement pour renforcer le projet de loi, mais aussi pour qu’il réponde véritablement aux préoccupations importantes et légitimes dont des intervenants m’avaient fait part et qu’ils avaient exprimées plus tard au comité.

À ma grande déception, bien que ces amendements aient été adoptés par le comité, ils ont par la suite été rejetés par le même comité lorsque celui-ci a dû, de façon inattendue, reprendre l’étude article par article du projet de loi qui avait pris une semaine, parce que la participation virtuelle d’un sénateur membre de notre comité avait été jugée irrecevable en raison du fait qu’il se trouvait à l’étranger à ce moment-là.

J’ai été assez exaspéré de voir des amendements adoptés par le comité, puis rejetés lors d’une mise aux voix ultérieure, après que le gouvernement ait eu le temps de formuler des objections. Pour couronner le tout, en recevant le message dont nous sommes saisis aujourd’hui, nous avons pu constater que d’autres amendements que j’avais proposés ont été supprimés par l’autre endroit, ce qui fait que le projet de loi n’est pas aussi efficace qu’il pourrait l’être.

Les amendements sur les organismes génétiquement modifiés que j’ai proposé d’apporter à l’article 39.1 visaient à donner suite aux préoccupations alarmantes et très judicieuses de Nature Canada et d’autres témoins ayant comparu devant le Comité de l’énergie, de l’environnement et des ressources naturelles. Ils amélioraient la transparence et donnaient plus souvent l’occasion à la population de donner son avis lorsque le ministère envisage d’autoriser la vente et la reproduction d’organismes génétiquement modifiés au Canada.

J’ai été déçu que ces amendements soient supprimés, lors de l’étude en comité de la Chambre des communes, et remplacés, comme on peut le voir dans ce message, par des versions édulcorées qui ne prévoient pas de processus rigoureux de réglementation qui favorise la tenue de véritables consultations. J’ajouterais que mes recommandations avaient l’aval de l’Assemblée des Premières Nations et de la Fédération du saumon atlantique.

Dans ce message décevant, on peut voir que la seule chose nécessaire est la publication d’un avis de consultation, et que « les ministres consultent toute personne intéressée avant l’expiration du délai d’évaluation de ces renseignements ». Contrairement au libellé que je proposais afin que la population puisse participer concrètement au processus, l’expression « toute personne intéressée » oblige la population à se tenir au courant des derniers développements en matière de réglementation. Elle n’oblige pas le gouvernement à prendre d’autres mesures que le simple fait de publier un avis de consultation sur un site gouvernemental que la plupart des gens ne verront pas ou ne réussiront pas à trouver.

Cela me rappelle encore une fois Mme Karen Wristen, de l’organisme Living Oceans. Elle a dit au comité qu’elle avait été surprise qu’une nouvelle espèce de saumon de l’Atlantique génétiquement modifiée ait été introduite dans les eaux canadiennes de l’Île-du-Prince-Édouard. Cette avocate est très active au sein des ONG s’occupant d’environnement, et elle n’en revenait pas — et moi non plus — que cet événement ait échappé à sa connaissance. Je me demande donc qui sont les parties intéressées qui seraient tenues au courant des consultations et qui seraient invitées à donner leur point de vue au ministre.

Avant de rédiger ma réponse à ce message, j’ai pris soin de consulter MM. Hugh Benevides et Mark Butler, de Nature Canada, afin de savoir ce qu’ils avaient pensé des délibérations de l’autre endroit, car j’estime qu’il est de notre devoir, en tant que sénateurs, de faire entendre la voix des personnes marginalisées tout au long du processus législatif. Selon ce qu’ils m’ont dit, des compromis ont été proposés afin de trouver un juste milieu entre les amendements adoptés par notre comité et ceux de l’autre endroit. Ils espéraient que toutes les parties seraient satisfaites de ces compromis et adopteraient les recommandations qui leur avaient été faites afin que les sénateurs soient eux aussi satisfaits du message qui leur serait envoyé, puisque les amendements proposés auraient permis une certaine participation du public à l’exercice extrêmement important d’évaluation des risques.

(1510)

Toutefois, l’autre endroit a rejeté cette offre de compromis. Il n’y a maintenant aucune garantie que les ministres responsables de la Loi canadienne sur la protection de l’environnement vont déterminer que des personnes sont intéressées et qu’elles devraient donc être consultées. Cela reste à l’entière discrétion du ministre, dans un ministère qui ne semble pas considérer que la question d’organismes génétiquement modifiés qu’on introduit au Canada a la moindre importance. Il n’y a aucune exigence en ce qui concerne le type ou la qualité de la consultation, pas plus qu’au sujet des données qui doivent en faire partie. Les amendements adoptés à l’autre endroit ne prévoient pas non plus que la réglementation doive tenir compte des connaissances autochtones ou de données scientifiques provenant d’autres parties prenantes, à part bien sûr le promoteur — manifestement mû par ses propres intérêts — ou le gouvernement.

D’autre part, avec les amendements de compromis à l’article 108.1 les ministres ne détermineraient pas qui pourrait être intéressé. L’occasion de « [...] présenter des connaissances autochtones et des renseignements scientifiques utiles [...] » ne dépendrait pas de la décision décrite au paragraphe 108.1(1).

Au lieu de cela, un promoteur déposant des renseignements indiquant qu’il souhaite fabriquer ou importer un nouvel organisme vivant aux termes de l’article 106 de la Loi canadienne sur la protection de l’environnement déclencherait la publication automatique de ce fait dans le Registre de la Loi canadienne sur la protection de l’environnement — c’est le paragraphe 108.1(2) —, informant ainsi les peuples autochtones et le public de la proposition d’introduction d’un nouvel organisme vivant. Or, rien de tel ne s’est produit dans le cas du saumon génétiquement modifié, ce qui a contraint des membres du public à demander un contrôle judiciaire à la Cour fédérale.

L’amendement proposé à l’article 114, qui permet de prendre des règlements, autoriserait simplement le gouvernement, à la suite de sa réforme, toujours promise, mais encore à venir, du Règlement sur les renseignements concernant les substances nouvelles (organismes), à y inclure des dispositions sur la manière dont le régisseur peut recevoir « [...] toute connaissance autochtone et information scientifique pertinente [...] » afin qu’elle puisse être prise en compte dans le cadre de l’évaluation.

Chers collègues, comme nous l’avons entendu, c’est la première fois depuis des dizaines d’années que la Loi canadienne sur la protection de l’environnement est modifiée de manière substantielle. Le Comité permanent de l’environnement et du développement durable de l’autre endroit, après avoir étudié attentivement ces questions, a recommandé en 2017 que :

Le Comité recommande que la [Loi canadienne sur la protection de l’environnement] soit modifiée de manière à mettre en place un processus d’évaluation des risques plus ouvert, exhaustif et transparent qui favorise davantage la participation du public à l’évaluation des nouveaux organismes vivants modifiés.

Parce que cette recommandation claire a été présentée après une étude exhaustive et réfléchie par un comité de l’autre endroit, je trouvais important que nous saisissions l’occasion, au Sénat, de la mettre en œuvre au lieu de la laisser rejoindre d’autres rapports parlementaires qui dorment sur des tablettes à accumuler de la poussière.

Honorables sénateurs, je prends la parole aujourd’hui parce que je suis extrêmement déçu du long parcours sinueux qu’a dû emprunter le projet de loi tout au long du processus législatif. Je trouve malheureux que nous ayons laissé passer l’occasion d’obtenir une participation significative du public au sujet d’une décision aussi grave que celle de permettre l’introduction d’organismes génétiquement modifiés au Canada, y compris des individus d’une espèce emblématique comme le saumon de l’Atlantique. Nous avons ici un exemple concret des dangers associés à ce projet de loi édulcoré. C’est pour cette raison que je n’appuierai pas le message.

L’honorable Pierre J. Dalphond : Honorables sénateurs, je prends la parole au sujet du message sur le projet de loi S-5, la mise à jour de la Loi canadienne sur la protection de l’environnement proposée par le ministre Guilbeault. Le projet de loi S-5 apportera à cette loi des modifications intéressantes et opportunes; par exemple, le Canada suivra l’exemple du Québec en reconnaissant le droit des citoyens à un environnement sain. Dans ce message, la Chambre des communes accepte et améliore même les nombreux amendements du Sénat visant à minimiser et, espérons-le, à éliminer la pratique cruelle des essais de toxicité sur des animaux. Je remercie le ministre Guilbeault et le sénateur Gold de ce résultat fantastique dont peuvent se réjouir les Canadiens, le gouvernement et les deux Chambres.

Honorables collègues, pour mettre les choses en contexte, la Loi canadienne sur la protection de l’environnement est une loi importante qui sert déjà à interdire les microbilles de plastique dans les articles de toilette, à interdire l’amiante et à empêcher l’utilisation de produits chimiques dangereux dans les biberons. L’année dernière, le gouvernement a utilisé cette loi pour interdire les plastiques à usage unique, ainsi que pour lutter contre la pollution plastique qui envahit nos cours d’eau et nos océans et tue des espèces marines comme les baleines et les tortues de mer. Ce changement est contesté devant les tribunaux par Dow, Impériale et d’autres représentants des gros producteurs de plastique, de même que par les gouvernements de l’Alberta et de la Saskatchewan.

Cependant, concentrons-nous sur les aspects positifs de ce message sur le projet de loi S-5, en particulier l’acceptation et l’amélioration des amendements du Sénat visant à réduire et, espérons-le, à éliminer progressivement les essais de toxicité sur les animaux.

Comme les sénateurs s’en souviennent peut-être, lors de la période des questions du 3 mars 2022, j’ai demandé au ministre Guilbeault si le gouvernement était ouvert à des amendements du Sénat pour renforcer le projet de loi S-5 afin d’aider le gouvernement à respecter sa promesse électorale d’éliminer progressivement les essais de produits chimiques sur les animaux d’ici 2035. Le ministre a répondu oui avec enthousiasme, ce qui montre que la période des questions aux ministres peut être utile.

Aujourd’hui, je tiens également à remercier la sénatrice Galvez, qui a accepté de présenter quelques amendements rédigés par mon équipe avec l’aide d’associations de défense des droits des animaux. Grâce à l’ouverture du ministre et à la volonté de la sénatrice Galvez de participer à l’aventure et grâce à nous tous et aux efforts déployés, nous avons un projet de loi qui est maintenant sur le point d’être envoyé à Rideau Hall et qui contient des dispositions sur les essais sur les animaux.

Ce changement est important. Comme je l’ai dit à l’étape de la deuxième lecture du projet de loi S-5, les essais de toxicité constituent la plus nuisible et la plus douloureuse des utilisations des animaux dans le domaine de la recherche scientifique. Des essais de toxicité ont été effectués sur environ 90 000 animaux en 2019 seulement. De plus, ces essais font partie de la catégorie E des techniques d’expérimentation du Conseil canadien de protection des animaux. Qu’est-ce qu’un essai de catégorie E? Les essais de catégorie E sont les essais les plus douloureux qui peuvent être effectués sur des animaux. Ils peuvent causer la mort, des douleurs intenses ou une très grande détresse, et peuvent inclure l’infliction de brûlures ou de traumatismes sans l’usage d’anesthésiques, et l’ingestion forcée ou l’application topique de substances mortelles.

J’ai été choqué d’apprendre à quel point ces tests étaient pratiqués au Canada. J’ai également été surpris d’apprendre qu’un grand nombre d’espèces étaient soumises à des essais de catégorie E. En effet, ces essais sont effectués sur des cochons d’Inde, des lapins, des souris et d’autres petits mammifères, mais aussi sur des cochons, des moutons, des castors, des poulets, des dindes, des colibris et de nombreux poissons de mer et d’eau douce. En envoyant ce message, nous faisons un grand pas vers un Canada plus compatissant et plus humain, et nous reconnaissons que ces animaux sont nos semblables et qu’ils sont des êtres sensibles qui méritent notre respect.

Grâce à l’ouverture d’esprit du ministre Guilbeault et à l’aide de la sénatrice Galvez, cette promesse a pu se concrétiser.

Je tiens également à remercier et à féliciter les organisations qui ont contribué à ce succès.

(1520)

Il s’agit d’Animal Justice Canada, de Humane Canada, du Canadian Centre for Alternatives to Animal Methods, Humane Society International/Canada et la Canadian Society for Humane Science.

Camille Labchuk, avocate et directrice générale d’Animal Justice, un organisme national de défense des droits des animaux, nous adresse le message suivant, sénateurs :

Les amendements au projet de loi S-5 défendus par les sénateurs ont amélioré le préambule ambitieux initialement inclus dans le projet de loi. Nous avons maintenant une voie audacieuse et concrète à suivre, visant à exclure définitivement les animaux des essais de toxicité douloureux. Cela nous permettra d’être plus en phase avec les autres administrations qui sont à l’avant-garde du changement concernant l’utilisation des animaux dans la science, comme les États-Unis et l’Union européenne.

Les amants des animaux de tout le pays sont reconnaissants aux sénateurs de leur travail sur ce projet de loi et sur bien d’autres. Le Sénat a été un véritable chef de file pour faire évoluer les lois canadiennes désuètes sur la protection des animaux, qu’il s’agisse des animaux utilisés dans les essais, dont les essais de cosmétiques, des baleines et des dauphins emprisonnés dans les aquariums, des requins tués pour leurs ailerons ou d’autres animaux sauvages en captivité.

Dans le cadre de cette formidable réussite, je tiens à saluer tout particulièrement Kaitlyn Mitchell, avocate-conseil d’Animal Justice. Son expertise a été déterminante dans l’élaboration de nos amendements sénatoriaux concernant les essais de toxicité sur les animaux. Où que se trouve Mme Mitchell aujourd’hui, je lui dis merci et je l’invite à se lever et à nous saluer. Grâce à votre détermination et à vos compétences juridiques, vous avez évité à d’innombrables animaux de connaître une fin horrible et douloureuse.

Je n’ai aucun doute que les sénateurs se joindront à moi pour féliciter Mme Mitchell ainsi que l’ensemble des organisations et des personnes qui ont contribué à atteindre ce remarquable jalon.

Pour poursuivre sur cette lancée de bonnes nouvelles, avec le projet de loi C-47, la loi portant exécution du budget, le gouvernement prend les moyens pour mettre fin aux essais effectués sur des animaux dans le domaine des cosmétiques. Ces mesures législatives réalisent l’objectif de l’ancienne sénatrice Carolyn Stewart Olsen, quand elle avait présenté son projet de loi durant la 42e législature.

Le gouvernement du Canada fait des progrès sur plusieurs aspects relatifs au bien-être des animaux en donnant suite à ses promesses électorales dans ce domaine, et d’autres avancées sont à venir. Ces progrès sont une source de célébration en cette période de crise climatique majeure qui affecte l’environnement et les animaux. D’ailleurs, le sénateur Murray Sinclair nous a enseigné à avoir de l’empathie envers toutes les formes de vie dans notre démarche de réconciliation.

Par conséquent, j’ai bon espoir que mes collègues se joindront à moi pour agréer cet excellent message de l’autre endroit, qui est très bien reçu.

Merci. Meegwetch.

L’honorable Donald Neil Plett (leader de l’opposition) : Honorables sénateurs, je prends la parole au sujet du message de la Chambre des communes sur le projet de loi S-5, Loi sur le renforcement de la protection de l’environnement pour un Canada en santé.

Comme vous le savez tous, à votre grande joie sans doute, je dispose d’un temps illimité pour m’exprimer aujourd’hui. Alors, afin qu’il n’y ait aucune ambiguïté sur l’objet du vote, j’ai pensé qu’il serait bon de commencer par lire en entier le message dont nous a informés la présidence l’autre jour, à moins que l’un d’entre vous propose de m’en dispenser. Je pourrais me laisser convaincre.

Une voix : Suffit!

Le sénateur Plett : Très bien. Une fois suffit, et je suis persuadé que tous les sénateurs sont d’accord.

Le Sénat a adopté le projet de loi S-5 et l’a renvoyé à la Chambre des communes le 22 juin 2022, c’est-à-dire il y a 351 jours. Pour un projet de loi que le gouvernement était pressé de faire adopter — c’est pour cette raison qu’il a d’abord été présenté au Sénat —, on peut dire que les choses ont avancé à pas de tortue. Le projet de loi C-28, qui était identique au projet de loi S-5, a d’abord été présenté en avril 2021, lors de la dernière législature. Il y a donc deux ans — heureusement que c’était pressant.

Comme mon collègue conservateur de la Chambre des communes l’a dit il y a quelques semaines, si les choses ont avancé lentement, c’est carrément la faute du premier ministre, qui a égoïstement déclenché des élections coûteuses et inutiles dans l’espoir — mais sans succès — d’obtenir la majorité parlementaire que les Canadiens lui avaient refusée en 2019. Chers collègues, cet échec a coûté 600 millions de dollars aux contribuables; 600 millions de dollars pour en arriver essentiellement au même gouvernement minoritaire que M. Trudeau dirigeait avant les élections.

J’exagère, bien sûr. Il ne s’agit pas exactement du même gouvernement minoritaire que les Canadiens lui ont imposé en 2019. Il s’agit maintenant d’une coalition coûteuse entre le NPD et le Parti libéral pour laquelle aucun Canadien n’a voté.

Une somme de 600 millions de dollars — imaginez si cet argent avait été consacré à l’environnement. Bon, à voir le triste bilan du gouvernement dans ce dossier, ces millions auraient quand même été gaspillés, mais différemment. Une chose est sûre : le gouvernement promet terre et monde dans le dossier de l’environnement, mais il ne fait à peu près rien. Pendant toutes leurs années au pouvoir, les libéraux n’ont par exemple jamais atteint la moindre cible de réduction des émissions de gaz carbonique, cibles qui avaient été adoptées par le gouvernement Harper et que les libéraux ont vertement dénoncées pendant la campagne électorale de 2015 — pour finalement les adopter eux-mêmes par la suite.

Les émissions de gaz carbonique n’ont pas diminué depuis que le gouvernement libéral—néo-démocrate est aux commandes, elles ont augmenté — malgré la tant vantée taxe sur le carbone, qui constitue un fiasco aussi total qu’abject et qui coûte une fortune aux Canadiens, alors que l’inflation fait des siennes et que les taux d’intérêt sont à la hausse — au pire moment qui soit, bref.

Le gouvernement a beau vanter les remboursements de la taxe sur le carbone, le directeur parlementaire du budget a clairement dit que cette taxe coûte plus cher à la majorité des Canadiens que ce qu’ils reçoivent en remboursements. L’année dernière, le commissaire à l’environnement a publié 10 rapports sur la manière dont le gouvernement libéral protège l’environnement. Plus de la moitié d’entre eux montrent que ce dernier a failli à la tâche.

Même les Nations unies ont jugé bon de s’en mêler. Elles ont en effet constaté, dans un rapport publié lors de la COP 27, en Égypte, que le Canada arrive au 58e rang sur 63 pays dans le dossier de l’environnement.

« Le Canada est de retour » a clamé Justin Trudeau lors de la conférence de la COP 21 à Paris. Le Canada est de retour, peut-être, mais en queue de peloton, en 58e position.

Je ne m’étendrai pas sur les détails du projet de loi ou du message. Les deux Chambres du Parlement ont déjà consacré beaucoup de temps à ce dossier. Ces efforts ont collectivement abouti à un projet de loi qui avait le soutien de tous les partis ainsi que celui du gouvernement, de l’industrie et des écologistes lorsqu’il a été présenté à la Chambre des communes. Mais ensuite, honorables sénateurs, fidèles à leur habitude, les libéraux n’ont pas pu laisser passer l’occasion de faire encore plus l’étalage de leur propre vertu, et ils l’ont fait à la dernière minute, à l’étape du rapport à la Chambre des communes. Je ne pourrais pas mieux expliquer la situation que ne le fait le communiqué de presse publié par le caucus des conservateurs de l’Alberta le 19 mai, dont voici un extrait :

À l’étape du rapport, le NPD a proposé un amendement qui empiète sur les compétences provinciales en matière de réglementation de la fracturation hydraulique et des bassins de décantation de résidus miniers, amendement auquel les députés libéraux s’étaient opposés au Comité de l’environnement. Malgré leur opposition en comité, les députés du gouvernement ont ensuite fait volte-face et ont voté en faveur de cet amendement du NPD qui empiète sur les compétences provinciales.

L’amendement du NPD, adopté avec l’appui de dernière minute des libéraux, constitue une atteinte manifeste aux compétences provinciales. Par conséquent, cette mesure législative risque de causer des batailles judiciaires et de l’incertitude.

En conséquence, le Parti conservateur retire son appui au projet de loi S-5

Le communiqué de presse dit ensuite ceci :

[Le] cadre de surveillance réglementaire du Canada est fondé sur une séparation claire des responsabilités entre les provinces et le gouvernement fédéral, comme le prévoit la Constitution. Les efforts répétés pour brouiller les frontières entre les champs de compétence ont mené à un processus d’approbation des projets alambiqué, à des dédoublements de coûts et à de l’incertitude pour les investisseurs.

L’incertitude engendrée par l’imprévisibilité du gouvernement néo-démocrate—libéral en matière de politique énergétique a un coût réel pour les Canadiens. Le Canada doit élaborer une politique fédérale claire s’il veut attirer et conserver les emplois et les investissements.

(1530)

Pour dire les choses clairement, chers collègues, l’amendement du NPD donne au gouvernement fédéral le pouvoir d’exiger la production d’informations sur les bassins de décantation et la fracturation hydraulique. C’est de là que découle l’empiétement sur les compétences provinciales.

Malheureusement, le Sénat avait adopté cet amendement à la version originale du projet de loi S-5 et les députés libéraux de la Chambre des communes ont voté pour le retirer du projet de loi parce qu’ils estimaient qu’il était redondant. À la seule fin d’impressionner certains groupes environnementaux, les libéraux ont fait un virage à 180 degrés et ont réintroduit l’amendement dans le projet de loi. La position des libéraux à propos de l’amendement est « redondant » une semaine et « essentiel » la semaine suivante.

L’Alberta a déjà intenté une action en justice contre le gouvernement fédéral parce que le plastique figure à la partie 2 de l’annexe 1 du projet de loi en tant que substance à réglementer.

Y a-t-il quelqu’un pour douter sincèrement que Danielle Smith, première ministre de l’Alberta récemment élue et critique virulente de politique énergétique du fédéral, aura la moindre hésitation à contester la disposition du projet de loi devant les tribunaux?

Honorables sénateurs, je vais conclure mon intervention en citant une publication de la Bibliothèque du Parlement intitulée La répartition des pouvoirs législatifs entre le fédéral et les provinces aux articles 91 et 92 de la Loi constitutionnelle de 1867.

On peut y lire ceci :

[P]our déterminer si une question est de compétence fédérale ou provinciale, il ne suffit pas toujours de lire le texte de la Constitution. Il y a plusieurs raisons à cela. Premièrement, avec le temps, de nombreux secteurs de politiques qui n’étaient pas explicitement prévus par la Constitution ont fait leur apparition. Deuxièmement, l’interprétation judiciaire a donné à certains articles de la Constitution une portée plus large que ce qui pourrait résulter d’une lecture normale et, inversement, a limité la portée d’autres articles. Les tribunaux ont aussi estimé qu’il y avait, pour certains domaines, chevauchement des compétences ou compétence commune.

L’environnement est certainement l’un des secteurs qui n’étaient pas explicitement prévus par la Constition et qui ont fait leur apparition depuis. Il est aussi bien clair que ce sont habituellement les provinces qui légifèrent dans le domaine des ressources naturelles.

En 1982, l’article 92A a été ajouté à la Constitution. Cet article élargit la compétence exclusive des provinces en matière de ressources naturelles à la prospection des ressources naturelles non renouvelables ainsi qu’à l’aménagement, à la conservation et à la gestion des emplacements et des installations destinés à la production d’énergie électrique.

Il y a certes des domaines qui font exception et que le gouvernement peut réglementer. Toutefois, cet amendement de dernière minute à l’étape de l’étude en comité, que le comité de la Chambre avait rejeté et qui est redondant, nous a-t-on dit, a ouvert inutilement une boîte de Pandore et cible encore une fois une province que le gouvernement libéral a, de toute évidence, dans sa mire depuis qu’il est arrivé au pouvoir, en 2015.

Honorables sénateurs, la volte-face du gouvernement dans ce dossier et l’empiétement sur les compétences fédérales auquel elle ouvre la porte est la goutte qui fait déborder le vase en ce qui nous concerne, et je crois que tous les sénateurs devraient être du même avis. Après tout, nous sommes censés représenter les régions et les provinces, comme le prévoit la Constitution, non? Comme le disait notre estimé ex-collègue le sénateur Joyal dans le livre Protéger la démocratie canadienne  :

[...] l’un des éléments clés du compromis de la Confédération a été la création d’un Sénat ayant le pouvoir législatif requis pour défendre les intérêts des divers éléments constituants du pays.

Il cite nul autre que le premier premier ministre du Canada, le grand sir John A. Macdonald, qui a écrit ceci :

À la chambre haute sera confié le soin de protéger les intérêts de section; il en résulte que les trois grandes divisions seront également représentées pour défendre leurs propres intérêts contre toutes combinaisons de majorités dans l’Assemblée.

Nous sommes nommés en fonction de la province d’où nous venons. En comité, nous nous présentons en nommant cette province. Je représente le Manitoba et la division de l’Ouest, qui comprend aussi l’Alberta, la Colombie-Britannique et la Saskatchewan. Il est de notre devoir de veiller aux intérêts de la région et de la province que nous représentons, et c’est ce que j’entends faire.

C’est au Sénat de trouver, à l’issue d’un second examen objectif, le moyen de protéger les compétences provinciales contre les intrusions du fédéral.

Le Parti conservateur du Canada est et sera toujours là pour défendre les provinces contre les tendances centralisatrices du Parti libéral et du NPD.

Avec les dispositions du projet de loi S-5, le gouvernement fédéral veut étendre ses pouvoirs sur l’industrie minière. Nous savons que les libéraux aimeraient imposer aux provinces ce qu’on appelle des normes nationales en matière de qualité de l’air ou de l’eau. Nous ne pouvons pas tolérer ces atteintes à notre Constitution.

Honorables collègues, je vous invite à vous joindre à nous et au sénateur Patterson pour voter contre la motion du sénateur Gold et ainsi indiquer clairement que le Sénat rejette cette approche paternaliste imposée par Ottawa et qu’il est fier de jouer son rôle en se portant à la défense de la primauté du droit et en veillant au respect de la Constitution. Merci.

Son Honneur la Présidente : Les sénateurs sont-ils prêts à se prononcer?

Des voix : Le vote!

Son Honneur la Présidente : Vous plaît-il, honorables sénateurs, d’adopter la motion?

Des voix : Oui.

Des voix : Non.

Des voix : Avec dissidence.

Son Honneur la Présidente : Que les sénateurs qui sont en faveur de la motion veuillent bien dire oui.

Des voix : Oui.

Son Honneur la Présidente : Que les sénateurs qui sont contre la motion veuillent bien dire non.

Des voix : Non.

Son Honneur la Présidente : À mon avis, les non l’emportent.

Et deux honorables sénateurs s’étant levés :

Son Honneur la Présidente : Je vois deux sénateurs se lever. Y a-t-il entente au sujet de la sonnerie?

Conformément à l’article 9-10(2) du Règlement, le vote est reporté à 17 h 30, à la prochaine séance du Sénat, et la sonnerie retentira à compter de 17 h 15.

Projet de loi modifiant certaines lois et d’autres textes en conséquence (armes à feu)

Deuxième lecture—Suite du débat

L’ordre du jour appelle :

Reprise du débat sur la motion de l’honorable sénateur Yussuff, appuyée par l’honorable sénateur Boehm, tendant à la deuxième lecture du projet de loi C-21, Loi modifiant certaines lois et d’autres textes en conséquence (armes à feu).

L’honorable Marty Klyne : Honorables sénateurs, je prends la parole au sujet du projet de loi C-21.

Cette mesure législative a fait l’objet d’un vif débat, tant au Parlement que dans les médias. Je tiens à faire part de mes réflexions sur ce projet de loi et à exprimer certaines préoccupations qui reflètent probablement l’opinion de nombreuses personnes qui ont suivi ce débat.

En m’exprimant sur ce projet de loi, je suis conscient que je m’avance dans l’un des dossiers les plus controversés que nous puissions aborder en tant que législateurs au Canada, à savoir les lois sur les armes à feu. Je ne m’attarderai pas sur le bien-fondé de la possession d’armes à feu ni sur les divers facteurs sociaux et politiques qui sont souvent au cœur de ce débat.

Mon objectif est simplement d’aborder les différents aspects du projet de loi C-21 qui, selon moi, mériteraient d’être améliorés, ainsi que les lacunes qui, à mon avis, ont entravé le processus législatif.

Tout d’abord, je tiens à souligner les aspects positifs du projet de loi C-21. Je me félicite que le projet de loi reconnaisse les nouvelles réalités de la lutte contre les armes de contrebande et illégales. Les armes à feu ont bien changé depuis leur invention. Les fusils qui étaient utilisés par les soldats, les chasseurs et les agriculteurs dans les années 1800 ont peu en commun avec les armes à feu d’aujourd’hui.

(1540)

Les armes actuelles sont nettement plus puissantes et sont fabriquées différemment. En fait, la fabrication des armes à feu a considérablement changé grâce aux imprimantes 3D qui facilitent la tâche. Nous connaissons tous les imprimantes 3D et les résultats impressionnants qu’elles peuvent donner. Malheureusement, le recours à ces imprimantes pour la fabrication des armes à feu, ou de leurs composantes, et l’avènement subséquent des armes fantômes sont devenus une grave source de préoccupation, particulièrement dans les grands centres urbains. Je me réjouis que le projet de loi C-21 propose des mesures pour s’attaquer au problème, et j’étais ravi d’apprendre que tous les partis à l’autre endroit abondent dans le même sens.

Dans le même ordre d’idées, l’introduction de dispositions permettant de signaler des situations moyennement ou extrêmement préoccupantes est une approche judicieuse qui, à mon avis, contribuera à éliminer la présence d’armes à feu dans des situations de violence potentielle. Les sénateurs ne souscriront pas tous à cette mesure législative, mais ils conviendront, comme nous tous, de la nécessité de protéger la population, particulièrement les groupes vulnérables, de toute menace de violence.

Selon moi, les mesures de signalement et d’intervention sont un pas dans la bonne direction. Le sénateur Yussuff en a déjà parlé dans son discours. Je me contenterai de dire qu’il me semble logique de permettre au système judiciaire de prendre proactivement des mesures pour protéger les victimes contre la violence armée. J’estime aussi que l’adoption de ces dispositions nous rapproche des résultats souhaités. Il faut évidemment que les droits de tous les citoyens soient respectés, que les lois soient utilisées avec prudence et qu’elles visent à protéger la population contre le risque de violence commise par des propriétaires d’armes à feu illégales, des personnes enclines aux comportements violents, des gangs et des propriétaires ou futurs propriétaires d’armes à feu au bord d’une crise pouvant les mener à se faire du mal ou à faire du mal à d’autres personnes.

J’ai aussi quelques réserves au sujet du projet de loi. J’estime que le projet de loi C-21 est louable, mais qu’il a fait l’objet de beaucoup de controverse tout au long du processus législatif. De très vastes amendements ont été présentés, puis retirés. Les propriétaires d’armes à feu et les chefs autochtones ont exprimé de vives inquiétudes. Malheureusement, le débat s’est envenimé dans l’espace public, surtout dans les régions rurales du Canada. Je vais essayer de rester bref et de ne pas verser dans la démagogie. En somme, j’estime que le projet de loi a des défauts et qu’il pourrait poser des problèmes aux propriétaires d’armes à feu respectueux des lois.

Les comportements criminels devraient constituer notre cible première, et les personnes qui font entrer illégalement des armes à feu au Canada m’inquiètent particulièrement. Quoi qu’on puisse penser de ce projet de loi, nous devrions tous convenir que les armes à feu illégales qui traversent la frontière constituent un problème. Selon moi, nous devons resserrer les lois sur la contrebande et adopter des peines dissuasives. Nous devons intensifier les patrouilles à la frontière afin de mettre fin à l’arrivée d’armes à feu illégales. Comme vous le savez, le projet de loi C-21 fera passer de 10 à 14 ans la peine d’emprisonnement maximale pour certaines infractions liées aux armes à feu, dont la contrebande et le trafic.

Il s’agit d’un bon début, mais je me demande si quatre ans de prison de plus suffiront à dissuader ceux qui font déjà entrer des armes à feu en douce dans notre pays. Cette augmentation de la peine maximale — et j’insiste : de la peine maximale, et non minimale — suffira-t-elle pour faire cesser cette pratique et avoir une réelle incidence sur le nombre d’armes à feu que les contrebandiers font entrer au Canada? J’en doute, pour tout vous dire. Pourtant, selon ce que j’en comprends, 14 ans, c’est la dernière étape avant la réclusion à perpétuité. Peut-être devrait-il s’agir d’une peine de 14 ans, mais sans possibilité de libération conditionnelle à moins de suivre un programme de réadaptation susceptible de provoquer un réel changement de mentalité et de faire l’objet d’une évaluation qui confirme le faible risque de récidive.

Les sénateurs ont débattu du concept des peines minimales obligatoires ces dernières années. Le projet de loi C-5, qui a été adopté par le Parlement l’an dernier, a éliminé les peines minimales obligatoires visant de nombreuses infractions criminelles, mais il ne les a pas éliminées pour l’ensemble des infractions liées aux armes à feu, comme celles qui sont liées à l’utilisation d’armes prohibées ou à autorisation restreinte. Depuis, d’autres débats ont surgi au sujet des répercussions de l’élimination des peines minimales obligatoires et de ses effets sur la criminalité. Devrions-nous rétablir les peines minimales obligatoires pour tous les crimes commis au moyen d’une arme à feu? Je ne connais pas la réponse à cette question, mais je ne suis pas convaincu que le fait de prolonger de quelques années les peines maximales liées au trafic d’armes va contribuer à résoudre le problème auquel nous sommes confrontés sans un programme de réadaptation efficace faisant l’objet d’une vérification portant sur sa mise en œuvre, son exécution et son taux de réussite.

Le gouvernement a admis qu’un seul programme ou une seule initiative publique ne permettra pas de résoudre le problème de la violence liée aux armes à feu. À mes yeux, c’est un argument à la fois juste et raisonnable. Nous n’allons pas éliminer la violence armée simplement en interdisant les armes automatiques ou les armes de poing. Certains diront que de telles interdictions font partie intégrante de la résolution de ce dossier, mais je crois qu’à elles seules les interdictions ne régleront pas le problème. Nous devons nous attaquer aux facteurs socioéconomiques qui engendrent la violence armée, tout comme nous devons nous attaquer aux problèmes de santé mentale qui, si nous ne faisons rien, pousseront probablement une personne à être violente.

Nous devons également nous attaquer aux gangs, qui sont au cœur de la violence armée au Canada depuis des dizaines d’années. Le degré de violence a fluctué au fil des ans, mais nous n’avons jamais réussi à éliminer les gangs malgré tous les efforts déployés par les forces de l’ordre, les gouvernements et la société dans son ensemble. Nous devons mettre les bouchées doubles. Il faut s’attaquer à la violence liée aux gangs avec détermination, faute de quoi nous continuerons à être confrontés aux mêmes problèmes que ceux qui frappent nos villes actuellement.

Je suis heureux que le ministre de la Sécurité publique ait annoncé en mai que le gouvernement fédéral prévoit de dépenser 390 millions de dollars sur cinq ans pour aider les provinces à lutter contre la violence liée aux gangs. C’est un bon début, mais nous devons agir avec persévérance sur une longue période si nous voulons faire de réels progrès.

Je voudrais également aborder la question des répercussions du projet de loi C-21 sur les peuples autochtones. Comme pour tout projet de loi dont le Sénat est saisi, les droits des peuples autochtones et des Autochtones eux-mêmes doivent être respectés. Autrement dit, il faut consulter les peuples autochtones pour veiller à ce que leurs droits soient respectés. C’est une obligation sacrée que je prends très au sérieux.

Nous avons vu la controverse qui a éclaté il y a quelques mois lorsque le gouvernement fédéral a proposé des amendements au projet de loi à l’étape de l’étude en comité à l’autre endroit, et que des organisations autochtones ont parlé haut et fort. Je comprends que le projet de loi C-21 contient une disposition qui précise que rien n’abroge les droits des peuples autochtones ou n’y déroge, mais je pense que le gouvernement aurait dû mieux piloter les consultations préalables avec les dirigeants autochtones. L’Assemblée des Premières Nations a même voté pour s’opposer publiquement au projet de loi lorsque le gouvernement a proposé des amendements controversés et elle a également exprimé son inquiétude quant au fait que les armes d’épaule traditionnellement utilisées par les Autochtones étaient visées. Je me réjouis que le gouvernement ait retiré ces amendements controversés, mais des consultations préalables efficaces menées plus tôt dans le processus auraient probablement été utiles pour tous les intervenants, car elles auraient peut-être même fait ressortir des solutions qui auraient conduit à des politiques novatrices.

Je tiens à dire que j’ai été frappé par le discours du sénateur Kutcher et par ses remarques sur le lien entre les armes à feu et le suicide. Ce n’est un secret pour personne que les armes à feu sont souvent utilisées comme moyen de prédilection lorsqu’une personne choisit de mettre fin à ses jours. C’est une triste réalité à laquelle nous devons faire face. Le sénateur Kutcher a souligné dans son discours qu’une étude récente a révélé que les hommes et les femmes qui possèdent des armes de poing sont plus susceptibles de mourir d’une blessure par balle qu’ils s’infligent eux-mêmes. Le projet de loi C-21 est-il la solution pour réduire le nombre de suicides par balle au Canada? Je ne peux pas répondre à cette question avec certitude, mais je me fais l’écho du sénateur Kutcher pour dire que le sujet devrait être étudié plus en profondeur.

J’aimerais aborder un autre point qui me préoccupe. À ma connaissance, le gouvernement fédéral ne dispose pas d’une ligne téléphonique dédiée et anonyme ou d’un système de signalement en ligne que le public pourrait utiliser pour dénoncer en toute confidentialité les gens qui possèdent illégalement une arme à feu ou les propriétaires d’armes à feu présentant un comportement inquiétant. Bien sûr, il existe des services tels qu’Échec au crime qui peuvent être utilisés, mais un système dédié aux crimes, ou aux crimes potentiels, commis avec des armes à feu serait utile à l’ère des fusillades de masse. Nous disposons de lignes anonymes pour signaler la conduite en état d’ivresse, alors pourquoi ne pourrions-nous pas en avoir une pour les crimes commis avec des armes à feu? À mon avis, cela mérite d’être envisagé et j’aurais aimé que le projet de loi C-21 prévoie la mise en place d’un système similaire.

Chers collègues, le projet de loi C-21 a fait l’objet de beaucoup de débats, non seulement au Parlement, mais également dans les médias et les foyers des Canadiens, qu’ils soient propriétaires d’armes à feu ou non. De telles discussions sont saines et caractéristiques de notre démocratie. Malheureusement, le discours entourant ce projet de loi et d’autres du même genre a parfois erré à l’extérieur du cadre d’une saine démocratie.

Peu importe leur opinion, les gens ont des positions bien arrêtées au sujet des armes à feu, et je peux comprendre pourquoi. J’espère qu’en exprimant avec pondération les préoccupations au sujet du projet de loi, les sénateurs seront en mesure d’étudier les difficultés soulevées et les autres mesures qui pourraient être prises. J’espère avoir contribué à la réflexion à cet égard.

(1550)

Les armes à feu seront toujours un sujet controversé. Nous devrions débattre du bien-fondé des lois sur les armes à feu d’une façon équitable, ouverte et honnête, dans le respect du dialogue qui est caractéristique de notre démocratie, peu importe nos opinions et nos convictions personnelles à ce sujet. J’ai hâte d’entendre la suite du débat. Merci. Hiy kitatamihin.

Son Honneur la Présidente : Sénateur Plett, avez-vous une question?

L’honorable Donald Neil Plett (leader de l’opposition) : J’ai une question pour le sénateur Klyne, s’il veut bien y répondre.

Merci de votre discours, sénateur Klyne. Je n’ai qu’une seule question et je vous la pose parce que vous avez parlé en particulier de l’augmentation de la peine maximale de 10 à 14 ans. Seriez-vous surpris, sénateur Klyne, si je vous disais qu’hier, lors de ma séance d’information à l’intention des porte-parole, nous avons demandé aux fonctionnaires combien de fois la peine maximale de 10 ans avait été appliquée? Nous nous interrogions sur le bien-fondé de l’idée d’augmenter la peine à 14 ans et ils nous ont répondu qu’à leur connaissance, la peine maximale de 10 ans n’a été appliquée que dans un seul cas.

Le saviez-vous? Compte tenu de cela, que pensez-vous de l’utilité d’une peine maximale si on ne s’en sert pas?

Le sénateur Klyne : Je vous remercie de la question. Je n’étais pas à cette séance, mais j’ai également entendu cette statistique. Je crois qu’il vaudrait la peine d’investiguer. Qu’est-ce qui aurait un effet dissuasif? Si 10 ans ne suffisent pas, est-ce que 14 ans suffisent? Que devons-nous faire pour réellement dissuader les gens de faire de la contrebande d’armes à feu ou de commettre d’autres infractions liées aux armes à feu?

Comme je l’ai dit dans mon discours, il s’agit de la pire peine hormis l’emprisonnement à perpétuité. Que faudra-t-il? Je crois qu’il faudrait peut-être éduquer les juges et moins hésiter à recourir à la peine maximale dans le cas de délits liés aux armes à feu. Selon moi, plus nous laissons ces activités criminelles se poursuivre sans mettre en place une mesure fortement dissuasive comme une peine de 14 ans, plus nous aurons de problèmes. Il faut trouver un moyen de dissuader les gens de se livrer à ces activités criminelles. Je crois que cela passe par une peine douloureuse, car la douleur est le meilleur moyen de dissuasion. Si la peine risque de ne faire aucunement souffrir les criminels, nous ne retiendrons pas leur attention.

Il serait probablement utile d’examiner la question davantage pour mieux comprendre les comportements et pourquoi les gens continuent de se livrer à ces activités criminelles. De plus, il faut examiner comment nous pouvons appliquer les outils de justice à notre disposition pour arriver à nos fins.

Le sénateur Plett : Sénateur Klyne, bien sûr, il est bien connu que notre parti, je crois, est le parti qui lutte contre la criminalité, même si les libéraux prétendent de temps en temps que ce sont eux. Ils ont toutefois abrogé un certain nombre de lois sur les peines minimales obligatoires. Ne pensez-vous pas qu’une peine minimale obligatoire serait plus efficace que l’augmentation d’une peine maximale, alors que cette dernière ne sera de toute façon jamais prononcée?

Le sénateur Klyne : C’est un dilemme pour moi aussi. Je me pose la même question. Encore une fois, je pense que c’est quelque chose qui doit être étudié en comité.

(Sur la motion de la sénatrice Martin, le débat est ajourné.)

Projet de loi no 1 d’exécution du budget de 2023

Première lecture

Son Honneur la Présidente annonce qu’elle a reçu de la Chambre des communes le projet de loi C-47, Loi portant exécution de certaines dispositions du budget déposé au Parlement le 28 mars 2023, accompagné d’un message.

(Le projet de loi est lu pour la première fois.)

Son Honneur la Présidente : Honorables sénateurs, quand lirons-nous le projet de loi pour la deuxième fois?

(Sur la motion du sénateur Gold, la deuxième lecture du projet de loi est inscrite à l’ordre du jour de la séance d’après-demain.)

L’ajournement

Adoption de la motion

L’honorable Patti LaBoucane-Benson (coordonnatrice législative du représentant du gouvernement au Sénat), conformément au préavis donné le 7 juin 2023, propose :

Que, lorsque le Sénat s’ajournera après l’adoption de cette motion, il demeure ajourné jusqu’au mardi 13 juin 2023, à 14 heures.

Son Honneur la Présidente : Vous plaît-il, honorables sénateurs, d’adopter la motion?

Des voix : D’accord.

(La motion est adoptée.)

La Loi canadienne sur la protection de l’environnement (1999)

Projet de loi modificatif—Deuxième lecture

L’ordre du jour appelle :

Reprise du débat sur la motion de l’honorable sénateur Carignan, c.p., appuyée par l’honorable sénatrice Seidman, tendant à la deuxième lecture du projet de loi S-234, Loi modifiant la Loi canadienne sur la protection de l’environnement (1999) (élimination définitive de déchets plastiques).

L’honorable Rosa Galvez : Honorables sénateurs, je prends la parole au sujet du projet de loi S-234, Loi modifiant la Loi canadienne sur la protection de l’environnement (1999), projet de loi qui vise à interdire l’exportation de certains types de déchets de plastique en vue de leur élimination définitive.

Il s’agit de la même mesure que celle qui était proposée dans le projet de loi C-204, au sujet duquel j’avais prononcé un discours à titre de porte-parole lors de la législature précédente, avant les élections. Ma position n’a pas changé : je suis d’accord sur les grandes lignes du projet de loi.

Vous le savez, mes réflexions au sujet des plastiques et de la pollution reposent sur trois décennies de travail en tant qu’ingénieure civile et environnementale chargée d’évaluer et de régler les problèmes de pollution et de contamination qu’entraînent les ordures ménagères et les déchets industriels dangereux. J’ai moi-même pu constater les impacts négatifs de nos habitudes irresponsables et de plus en plus répandues en matière de production de déchets et de mauvaise gestion des substances toxiques. Une décharge typique accumule toutes sortes d’objets domestiques qui auraient pu être recyclés, mais qui deviendront des macroplastiques ou des microplastiques qui finiront dans le sol ou dans l’eau, qui se fraieront un chemin jusque dans les écosystèmes, dans les chaînes alimentaires et, au bout du compte, dans les organes des animaux et des humains.

La mauvaise gestion des déchets de plastique entraîne des problèmes sociaux, environnementaux et de santé qui mettent en péril le bien-être des collectivités et des générations futures. Toute la planète réalise que l’humanité a un grave problème de gestion des déchets de plastique. C’est pour cette raison que l’Assemblée des Nations unies pour l’environnement a lancé, en février 2022, un processus pour l’élaboration d’une entente contraignante d’ici 2024 visant à mettre fin à la pollution par le plastique et que les pays du G7 se sont engagés, en avril dernier à « [...] mettre fin à la pollution plastique, avec l’ambition de réduire à zéro toute pollution plastique supplémentaire d’ici à 2040 ».

(1600)

Chers collègues, l’heure est grave. Chaque année, 13 millions de tonnes de plastique aboutissent dans les océans, polluant les eaux et détruisant les écosystèmes océaniques. Une fois que les déchets plastiques pénètrent dans les courants océaniques, il est peu probable qu’ils les quittent tant qu’ils ne se seront pas décomposés en microplastiques sous l’effet du soleil, des vagues et de la vie marine. Cela a entraîné la formation du vortex de déchets du Pacifique nord. Allez voir sur Google, vous n’en croirez pas vos yeux. Il s’agit d’une masse flottante de déchets qui couvre une superficie d’environ 1,6 million de kilomètres carrés, soit la taille du Québec. À ce rythme, il y aura plus de déchets plastiques que de poissons dans les océans d’ici 2050.

Les pays riches génèrent plus de déchets par personne, par conséquent, le Canada fait partie du problème. Avec ses 1,3 milliard de tonnes métriques de déchets par personne en 2017, le Canada occupe malheureusement le premier rang des pires producteurs de déchets par habitant. En réalité, notre problème de déchets ne fait qu’empirer.

En ce qui concerne les déchets de plastique, selon un rapport publié en 2019 par Environnement et Changement climatique Canada, nous avons produit 3,3 millions de tonnes de déchets de plastique en 2016, dont seulement 9 % ont été correctement recyclés, 4 % ont été incinérés à des fins de valorisation énergétique et une proportion incroyable, soit 86 %, ont été envoyés au dépotoir. Ajoutons que nous gérons mal les déchets de plastique ou que nous évitons de les gérer, puisque nous les exportons vers des pays en développement. Au Canada, les exportations de déchets par habitant s’élèvent à près de 5 kilogrammes par jour; elles sont donc inférieures à celles du Royaume-Uni, où elles s’établissent à 9,5 kilos par jour, mais supérieures à celles des États-Unis, où elles atteignent près de 2 kilos par jour.

Près de la moitié de tous les déchets de plastique au Canada proviennent de l’industrie de l’emballage; celle-ci est suivie des secteurs de l’automobile, du textile, des appareils électriques et électroniques, et de la construction.

[Français]

En effet, plus de 60 % de toutes les ressources naturelles extraites finissent en déchets. Quelle horreur! Quel manque d’efficacité et d’efficience! Ce modèle économique est totalement dépassé et part de l’hypothèse fausse et illogique que notre planète a des ressources infinies et que nous pouvons croître infiniment. Un tel système n’existe pas sur notre planète. Nous devons donc transformer le modèle économique linéaire désuet en un modèle économique circulaire.

Il faut apprendre à utiliser nos ressources naturelles plus efficacement, empêcher les produits et les matériaux de devenir des déchets le plus longtemps possible et transformer les déchets qui ne peuvent être évités en une nouvelle ressource. Ce sont là les principes d’une économie circulaire qui permettraient de réduire dramatiquement la pollution causée par notre surconsommation.

Le projet de loi S-234 s’attarde à interdire l’exportation de nos déchets plastiques et fait le pari que, en interdisant l’exportation de déchets, nous serons forcés à mieux les gérer. On ne fait pas référence à des méthodes de réduction de production de plastique à usage unique ni aux modifications sur une potentielle teneur minimale de plastique recyclé dans les nouveaux produits. On ne parle pas non plus de pénalités sur la consommation du plastique. Pourtant, c’est peut-être une stratégie qui pourrait fonctionner, parce que cela nous forcerait à examiner le problème chez nous.

[Traduction]

Ces dernières années, des gouvernements d’un peu partout dans le monde ont annoncé des politiques visant à réduire le volume de plastique à usage unique, en interdisant des produits tels que les pailles à usage unique, les couverts jetables, les récipients alimentaires, les cotons-tiges, les sacs, etc. En juillet dernier, la Californie est devenue le premier État américain à annoncer ses propres objectifs, notamment une baisse de 25 % des ventes d’emballages plastiques d’ici 2032. En décembre, le Royaume-Uni a étendu sa liste d’articles interdits aux barquettes à usage unique, aux ballons et à certains types de gobelets et de récipients alimentaires en polystyrène. Des interdictions sont également en vigueur dans l’Union européenne, en Australie et en Inde, entre autres.

Le Règlement interdisant les plastiques à usage unique fait partie du plan global du gouvernement du Canada pour lutter contre la pollution, atteindre son objectif de zéro déchet plastique d’ici 2030 et contribuer à réduire les émissions de gaz à effet de serre. Le règlement interdit la fabrication, l’importation et la vente de sacs d’emplettes en plastique à usage unique, de couverts et d’articles de restauration fabriqués à partir de plastiques problématiques ou contenant de tels plastiques. Mais nous savons que c’est insuffisant.

En effet, pour résoudre le problème de plastique au niveau national, nous devons repenser et réduire la production de plastique. Le recyclage doit s’intensifier assez rapidement pour faire face à la quantité de plastique produite, et le plastique recyclé doit trouver sa place dans de nouveaux produits dont la teneur n’est pas inférieure à 50 %.

Selon un rapport sur l’indice des fabricants de déchets plastiques, seules deux entreprises du secteur pétrochimique recyclent et produisent des polymères recyclés à grande échelle : le conglomérat taïwanais Far Eastern New Century et la société thaïlandaise Indorama Ventures, premier producteur mondial de polytéréphtalate d’éthylène recyclé pour les bouteilles de boisson.

Cependant, parmi les 20 plus grands producteurs mondiaux de polymères vierges utilisés dans la fabrication de plastique à usage unique, Indorama Ventures occupe la quatrième place. En tête de cette liste figurent la grande société pétrolière américaine ExxonMobil, la société chinoise Sinopec, et un autre poids lourd américain, Dow. Selon Carbon Trust et Wood Mackenzie, en fabriquant des polymères destinés au plastique à usage unique, ces 20 entreprises ont émis environ 450 millions de tonnes de gaz à effet de serre dans le monde, soit l’équivalent des émissions du Royaume-Uni.

[Français]

Pourtant, l’ordre des actions pour assurer une gestion durable de nos déchets est clair : réduction à la source, réutilisation, recyclage, récupération de l’énergie et encapsulation de résidus ultimes. Tel est le modèle de gestion de déchets prôné par tous les experts en gestion de matières résiduelles dans le monde.

Cependant, le Canada a historiquement choisi de mettre l’accent sur la troisième option, créant ainsi toute une industrie du recyclage. Nous avons nous-mêmes créé cette industrie entière du recyclage, qui est peu efficace. Nos matières recyclées sont très peu utilisées dans la manufacture de nouveaux produits. Les manufactures d’emballage, les promoteurs de l’obsolescence programmée et les gaspilleurs de matières n’assument aucune responsabilité. Bref, notre gestion de déchets est un échec total. En sautant les deux premières étapes d’une bonne gestion de déchets, nous réduisons massivement nos possibilités de réduction de déchets; pire encore, nous imposons le fardeau de ces déchets sur des pays en développement, qui n’ont souvent pas la capacité requise pour bien en disposer.

[Traduction]

Par conséquent, honorables collègues, où se retrouvent actuellement nos déchets plastiques? La plupart de ces déchets — plus de 90 % — sont exportés aux États-Unis; le reste est réparti entre des pays comme le Vietnam, la Malaisie, le Honduras, la Turquie et le Chili.

Le commerce des déchets plastiques est réglementé à l’échelle internationale par la Convention de Bâle sur le contrôle des mouvements transfrontières de déchets dangereux et de leur élimination, adoptée en 1989 à la suite d’une controverse croissante sur l’exportation par les pays riches de déchets dangereux dans des pays en développement n’ayant pas la capacité de les gérer adéquatement, provoquant ainsi d’énormes problèmes environnementaux et sanitaires. Ses principaux objectifs sont de réduire la production de déchets dangereux, de limiter les mouvements transfrontières de déchets dangereux aux pays capables de les gérer de manière écologique, et de créer un système de réglementation pour encadrer le commerce autorisé de déchets dangereux.

Bien que le Canada ait ratifié, en décembre 2020, de nouvelles modifications à la Convention de Bâle « qui exigent des mesures de contrôle pour s’assurer du consentement préalable donné en connaissance de cause pour l’exportation de toutes les formes de déchets plastiques, à l’exception des moins polluants, qui font l’objet d’échanges commerciaux entre les pays parties au traité », malheureusement, les États-Unis ne l’ont pas fait, si bien que nombre d’experts craignent qu’un accord bilatéral conclu en 2020 avec les États-Unis permette d’exporter des déchets plastiques vers le sud en se soumettant à des mesures de contrôle moins strictes que celles de la Convention de Bâle, et que ces déchets puissent ensuite être exportés de nouveau vers les pays en développement.

Compte tenu des différends en matière de gestion des déchets qui impliquent le Canada et qui ont été très médiatisés à l’échelle internationale dans les dernières années, je ne peux pas dire que je suis convaincue que nos déchets plastiques seront bien gérés dans le cadre de nos ententes en vigueur.

(1610)

En conclusion, je répète que je souscris entièrement à l’objet du projet de loi S-234 et au principe qui le sous-tend. Il est temps que nous assumions la responsabilité des déchets que nous produisons. Pendant des siècles, les pays riches ont imposé un fardeau aux pays en développement en les laissant s’occuper de nos déchets toxiques. Le monde n’est pas notre dépotoir, et si on continue de le considérer comme tel, cela renforcera les tendances colonialistes de notre pays. Notre richesse ne justifie pas l’absence de responsabilité à l’égard de nos propres déchets ; en fait, ce devrait être tout le contraire. Notre capacité de gestion écologique des déchets est l’une des meilleures au monde.

Je suis d’avis que la question nécessite une étude approfondie et minutieuse pour comparer ce qui est proposé dans ce projet de loi avec d’autres initiatives nationales et internationales et déterminer dans quelle mesure on peut les harmoniser, compte tenu, notamment, des effets possibles sur le commerce interprovincial et international, et le fait que cette question touche de nombreux secteurs. J’espère que, dans le cadre de son étude, le comité examinera comment cette interdiction d’exportation des déchets plastiques influera sur la capacité du Canada de gérer ses propres déchets. Je m’attends aussi à ce que l’étude détermine comment le projet de loi interagira avec nos accords internationaux actuels et futurs, y compris l’accord potentiellement juridiquement contraignant sur les plastiques. Finalement, j’espère que l’étude tiendra également compte des effets de l’interdiction des plastiques à usage unique, dont la mise en œuvre est échelonnée jusqu’en 2025.

Honorables collègues, j’espère que vous voterez tous en faveur du renvoi du projet de loi au comité. Merci, meegwetch.

[Français]

Son Honneur la Présidente intérimaire : Les honorables sénateurs sont-ils prêts à se prononcer?

Des voix : Oui.

Son Honneur la Présidente intérimaire : Vous plaît-il, honorables sénateurs, d’adopter la motion?

Des voix : D’accord.

(La motion est adoptée et le projet de loi est lu pour la deuxième fois.)

Renvoi au comité

Son Honneur la Présidente intérimaire : Honorables sénateurs, quand lirons-nous le projet de loi pour la troisième fois?

(Sur la motion de la sénatrice Martin, au nom du sénateur Carignan, le projet de loi est renvoyé au Comité sénatorial permanent de l’énergie, de l’environnement et des ressources naturelles.)

[Traduction]

Projet de loi de Jane Goodall

Projet de loi modificatif—Deuxième lecture

L’ordre du jour appelle :

Reprise du débat sur la motion de l’honorable sénateur Klyne, appuyée par l’honorable sénateur Harder, c.p., tendant à la deuxième lecture du projet de loi S-241, Loi modifiant le Code criminel et la Loi sur la protection d’espèces animales ou végétales sauvages et la réglementation de leur commerce international et interprovincial (grands singes, éléphants et certains autres animaux).

L’honorable Donald Neil Plett (leader de l’opposition) : Chers collègues, j’aurai le plaisir aujourd’hui de parler du projet de loi S-241, mieux connu sous le nom de Loi de Jane Goodall, qui est son titre abrégé.

Je dois dire que, pour un projet de loi d’intérêt public du Sénat, ce texte a beaucoup fait parler de lui. J’imagine que c’est dû en partie au fait que Jane Goodall elle-même l’a appuyé et qu’elle a accepté de lui prêter son nom, mais aussi au fait que le public s’intéresse de plus en plus au bien-être des animaux qui sont sous la garde d’êtres humains.

D’aucuns ont qualifié cette mesure législative d’historique et de modèle pour le reste de la planète. Selon la Humane Society International, il s’agit d’une des lois les plus restrictives pour les animaux sauvages gardés en captivité et pour la protection de la faune partout dans le monde.

Même si vous en connaissez probablement très bien le contenu, permettez-moi de vous résumer ce que fait le projet de loi S-241 : il modifie divers articles du Code criminel de manière à créer des infractions concernant la propriété et la reproduction d’animaux exotiques, dont les grands singes, les éléphants et diverses espèces non domestiquées, qu’on regroupe sous le vocable d’« animaux désignés », de même que la possession de matériel servant à la reproduction de ces animaux.

Le projet de loi S-241 modifie également la Loi sur la protection d’espèces animales ou végétales sauvages et la réglementation de leur commerce international de manière à exiger une licence pour l’importation, l’exportation, l’acheminement interprovincial et la reproduction en captivité des grands singes, des éléphants et des animaux désignés.

En outre, le projet de loi crée un cadre législatif pour la reconnaissance des organismes animaliers, c’est-à-dire des organismes qui respectent certaines normes en matière de soins animaliers et qui seront exemptés des interdictions prévues par le projet de loi.

Le projet de loi crée également une capacité juridique limitée pour les animaux en autorisant la désignation d’un défenseur des animaux pour représenter les intérêts de l’animal lors de la phase de détermination de la peine d’un procès.

Honorables sénateurs, je tiens à préciser d’emblée que je soutiens l’intention de ce projet de loi, qui vise à renforcer la protection des animaux détenus en captivité au Canada. À l’heure actuelle, il existe un ensemble disparate de lois et de règlements fédéraux, provinciaux et municipaux qui régissent l’industrie zoologique et la possession privée d’animaux exotiques. De plus, dans de nombreux cas, le cadre existant laisse beaucoup à désirer.

Je soutiens également l’objectif du projet de loi visant à lutter contre le commerce illégal d’animaux sauvages et de parties de leur corps, qui conduit certaines espèces au bord de l’extinction. La nécessité de mettre un terme au trafic illégal d’espèces menacées fait consensus.

Cependant, bien que je soutienne l’intention du projet de loi, je crains qu’il ne s’agisse d’un effort maladroit pour une noble cause, qui aura plus d’effets négatifs que positifs. Je pense que nous pouvons et nous devons faire mieux.

Pour comprendre la portée de ce projet de loi, il faut savoir que les propriétaires d’animaux sauvages exotiques au Canada se répartissent en trois catégories : les zoos accrédités, les zoos non accrédités et les propriétaires privés.

Au Canada, les zoos sont accrédités soit par Aquariums et zoos accrédités du Canada, connu sous le nom AZAC, soit par son homologue étatsunien, l’Association of Zoos and Aquariums, connu sous le nom AZA.

Ces associations d’accréditation à but non lucratif dirigées par l’industrie fixent des normes minimales pour le bien-être des animaux et s’efforcent de promouvoir les zoos en tant qu’agences de conservation, de science et d’éducation.

Selon certaines estimations, il existe actuellement une centaine de zoos, d’aquariums, d’expositions d’animaux sauvages et d’expositions de type zoologique au Canada. Il peut s’agir de petites expositions dans des magasins de détail comme de grandes institutions comme le zoo de Calgary et le zoo du parc Assiniboine à Winnipeg.

Pourtant, seuls 27 de ces 100 zoos ou expositions sont accrédités, dont 24 par Aquariums et zoos accrédités du Canada, 3 par l’Association of Zoos & Aquariums et 4 par ces deux organismes.

Les 75 zoos restants appartiennent à la catégorie très vaste des zoos non accrédités.

Parmi les zoos non accrédités du Canada, la qualité des soins prodigués aux animaux varie beaucoup. Certains d’entre eux pourraient d’ailleurs être admissibles à l’accréditation, mais ils n’ont tout simplement pas cherché à l’obtenir. D’autres devraient apporter des améliorations majeures à leurs installations, à leur personnel et à leurs activités pour pouvoir prétendre à l’accréditation. Or, sans accréditation, les normes et les règles existantes sont insuffisantes pour que les Canadiens aient la certitude que tous les animaux gardés dans ces zoos reçoivent les soins appropriés.

La catégorie des zoos non accrédités comprend ceux qui sont communément appelés les « petits zoos privés ». Il en a été souvent question pendant les débats au Sénat sur le projet de loi S-241. Afin que nous nous entendions tous sur ce dont il s’agit, permettez-moi de lire la définition des petits zoos privés selon la Société mondiale pour la protection des animaux :

Les petits zoos privés sont des installations grandement inférieures aux normes, généralement non gérées par des professionnels. Ils n’ont pas de personnel animalier formé et expérimenté, manquent de fonds et présentent des lacunes de sécurité. Les animaux sont confinés dans de petites cages dégarnies et souvent très sales, et n’ont pratiquement rien à faire jour après jour.

D’abord, ce n’est pas toujours le cas, mais, chers collègues, permettez-moi d’être absolument clair : il n’est nullement question de défendre l’existence des petits zoos inférieurs aux normes. Il s’agit plutôt de déterminer l’approche qui devrait être adoptée et l’ordre de gouvernement qui devrait en être responsable.

(1620)

Par ailleurs, en dehors des zoos accrédités et des zoos non accrédités, la propriété privée d’animaux exotiques est également autorisée au Canada. On ne dispose pas de chiffres exacts, mais les résultats d’une enquête menée par Protection mondiale des animaux ont été extrapolés pour estimer qu’il y a environ 1,4 million d’animaux de compagnie exotiques appartenant à des particuliers au Canada. Ce chiffre comprend près de 500 000 reptiles, 500 000 oiseaux exotiques et plus de 300 000 mammifères exotiques tels que des tigres, des lions, des léopards, des renards, des singes, et ainsi de suite.

Comme l’a souligné le sénateur Klyne, on estime à plus de 4 000 le nombre de grands félins appartenant à des particuliers au Canada. Précisons que le terme « grand félin » est généralement utilisé pour désigner les tigres, les lions, les jaguars, les léopards, les guépards et les cougars. L’organisation Protection mondiale des animaux estime à plus de 7 000 le nombre de grands félins au Canada. Ce chiffre n’inclut pas les grands félins qui se trouvent dans les zoos et les réserves naturelles; il s’agit uniquement du nombre estimé de grands félins considérés comme des animaux de compagnie. Pour ma part, je trouve cela, chers collègues, inacceptable.

Cependant, j’ai l’intention de vous montrer que le projet de loi S-241 n’est pas la voie à suivre. Il est aussi précis qu’un éléphant dans un magasin de porcelaine ou qu’un tigre dans un poulailler. Il ne permettra pas de résoudre le problème, et il créera un énorme chaos en essayant d’y parvenir.

Pour expliquer cela, je dois revenir sur la question des zoos accrédités. Les zoos accrédités ne sont probablement pas les zoos que vous vous rappelez avoir visités dans votre enfance, dont les pratiques se rapprochaient probablement davantage de celles des petits zoos privés d’aujourd’hui, d’où émanent la plupart des problèmes dans le secteur à l’heure actuelle. Contrairement aux petits zoos privés, les zoos accrédités manifestent un profond engagement en matière d’éducation, de conservation, de sciences et de recherche. Or, le projet de loi S-241 menace cela.

Dans le cadre de mes fonctions de porte-parole au sujet de ce projet de loi, j’ai réussi à visiter, jusqu’à présent, 10 des 27 zoos accrédités du Canada et constaté de mes propres yeux une partie de l’excellent travail qu’ils font. Honnêtement, c’est très inspirant.

Permettez-moi de commencer par le zoo du parc Assiniboine, à Winnipeg, où j’ai rencontré Grant Furniss, directeur principal de l’Assiniboine Park Conservancy, de même que le Dr Clément Lanthier, président et chef de la direction du zoo de Calgary, et Len Wolstenholme, conseiller principal du zoo de Calgary.

Le zoo du parc Assiniboine est une installation impressionnante. Cette société sans but lucratif est la propriété de la Ville de Winnipeg, réunit plus de 150 espèces animales et s’étend sur plus de 80 acres. Le zoo est membre accrédité de l’Association of Zoos and Aquariums, ou AZA, d’Aquariums et zoos accrédités du Canada, ou AZAC, et de l’Association mondiale des zoos et des aquariums, plus connue sous son acronyme anglais, WAZA. Dans ses propres mots :

Le parc zoologique Assiniboine déploie tous les efforts possibles pour atteindre et dépasser les normes de plus en plus sévères en matière de soin, de bien-être et de sécurité pour les animaux, sans compter celles des programmes vétérinaires, en plus de faire la preuve de son engagement envers la sensibilisation, la conservation et la recherche.

Il y a beaucoup de choses dans cet énoncé. J’ai cependant entendu la même chose dans tous les zoos accrédités que j’ai visités : partout dans le monde, les animaux subissent des pressions de plus en plus grandes à cause de la disparition des habitats et des impacts des changements climatiques. Les zoos accrédités et les réserves fauniques jouent un rôle crucial pour la sensibilisation de la population à ces enjeux en donnant aux gens l’occasion de se sentir près de ces animaux et en veillant à la conservation des espèces en péril.

Le deuxième zoo que j’ai visité est le zoo de Calgary. Comme je l’ai mentionné, j’avais rencontré Clément Lanthier et Len Wolstenholme du zoo de Calgary lorsque j’étais à Winnipeg. C’était l’occasion d’aller voir le fonctionnement des coulisses de leur zoo, puisque M. Wolstenholme m’a fait visiter les excellentes installations du zoo.

Le zoo de Calgary appartient à la ville de Calgary et est géré par la Calgary Zoological Society, un organisme sans but lucratif indépendant. L’an dernier, ce zoo a accueilli plus de 1,2 million de visiteurs. Comptant plus de 4 000 animaux répartis sur 125 acres, il est tout simplement impossible de tout voir en une journée. C’est sans doute la raison pour laquelle de nombreux visiteurs achètent des abonnements de saison, ce qui leur permet d’apprécier les animaux et le cadre du zoo toute l’année. J’ai eu l’occasion de passer un après-midi au zoo de Calgary. Bien que je n’ai pas pu tout y voir, ce que j’y ai vu était remarquable.

Après avoir visité le zoo de Calgary, mon équipe s’est rendue au zoo de Toronto. Là encore, il s’agit d’un établissement de classe mondiale, qui accomplit un travail remarquable dans les domaines de la recherche, de la conservation et de l’éducation à l’égard des espèces animales. C’est là que nous avons appris que les animaux pris en charge par l’homme et qui reçoivent des soins adaptés vivent 30 % plus longtemps — ce n’est pas rien, chers collègues —, qu’à l’état sauvage. Disposant de leur propre centre de nutrition pour les animaux sauvages, le centre de santé de la faune et le zoo de Toronto prodiguent des soins de classe mondiale aux animaux dont ils ont la responsabilité.

Après le zoo de Toronto, j’ai visité l’African Lion Safari, qui se trouve près d’Hamilton, en Ontario. C’est un site que j’avais visité avec toute ma famille quelques années auparavant. Contrairement aux zoos de Toronto, de Calgary et du parc d’Assiniboine, cet établissement n’appartient pas à une municipalité, mais à une entreprise privée. Toutefois, si vous vous attendez à un établissement de moindre qualité, vous serez déçu. Les efforts de conservation, de recherche et d’éducation qui y sont déployés sont tout aussi impressionnants, surtout si l’on considère que rien de tout cela n’est fait avec l’argent des contribuables.

African Lion Safari s’étend sur plus de 750 acres, dont 250 offrent aux animaux de vastes zones de brousse, de prairies et de forêts dans lesquelles ils peuvent interagir naturellement avec d’autres animaux. Cette superficie de 250 acres où les animaux peuvent errer est deux fois plus grande que celle du zoo de Calgary et trois fois plus grande que celle du zoo du parc d’Assiniboine. Près de 30 acres de la superficie totale de 750 acres ont été aménagés pour faire place à des sentiers et des expositions. Le reste de la propriété compte des fermes, des zones de brousse et d’autres habitats, y compris 40 acres de zones humides d’importance provinciale qu’African Lion Safari entretient et surveille. C’est le rêve des défenseurs de l’environnement.

Dans plusieurs de leurs réserves fauniques, des espèces mélangées se déplacent et interagissent comme elles le feraient dans la nature. Cependant, dans la totalité des sept réserves, ce sont les gens qui sont gardés en cage, et non les animaux — les animaux se déplacent librement dans de grands enclos, tandis que les visiteurs traversent le parc et observent les animaux, en sécurité dans leur véhicule. Le parc accueille 500 000 visiteurs par an au cours des six mois pendant lesquels il est ouvert au public. Il emploie 50 personnes à temps plein et recrute 300 employés saisonniers.

Comme les autres zoos accrédités que j’ai déjà mentionnés, African Lion Safari a un palmarès impressionnant en matière de conservation. Il compte plus de 1 000 animaux appartenant à plus de 100 espèces. Comme au zoo de Calgary, le tiers des animaux sont des espèces en péril. Le parc a réussi à élever 30 espèces considérées comme en péril et 20 espèces considérées comme menacées. Ce n’est pas un mince exploit, chers collègues, et cela s’inscrit dans leur vision de contribuer à maintenir des populations autonomes d’espèces en déclin, un service incroyable pour les générations futures.

La réserve naturelle est également réputée pour ses efforts de recherche et de conservation concernant la girafe, l’éléphant d’Asie, l’ara canindé, la pie-grièche migratrice de l’Est, l’effraie des clochers, le pygargue à tête blanche et le rhinocéros.

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Dans le cadre de ses recherches, elle a collaboré avec des universités de prestige, comme l’Université McGill, l’Université Queen’s, l’Université de l’Indiana à Bloomington, l’Université Cornell, l’Université Auburn, l’Université Baylor, l’Université d’agriculture et de technologie de Tokyo, l’University College de Londres, l’Université de la Floride, l’Université de Guelph, l’Université de Melbourne, l’Université de Pennsylvanie, l’Université de Pretoria, l’Université Western Kentucky, et bien d’autres encore.

Pourtant, chers collègues, ce boulet de démolition qu’est le projet de loi S-241 menace de détruire le magnifique travail de cette institution.

Tandis que les zoos de Toronto, de Calgary et du parc Assiniboine sont protégés par cette mesure législative, l’African Lion Safari ne l’est pas, même s’il s’agit d’un zoo pleinement accrédité.

Permettez-moi de vous expliquer. Le projet de loi S-241 érige en infraction criminelle le fait d’être propriétaire, d’avoir la garde ou d’assurer la surveillance d’un grand singe, d’un éléphant ou d’un animal désigné vivant en captivité; de faire se reproduire ou de féconder un grand singe, un éléphant ou un animal désigné ou d’omettre de prendre des précautions raisonnables pour en empêcher la reproduction ou la fécondation; ou de posséder ou de tenter d’obtenir du matériel reproductif de grands singes, d’éléphants ou d’animaux désignés.

Le projet de loi énonce ensuite les exceptions à cette infraction. Par exemple, si l’animal est en captivité le jour où la loi prend effet, on ne considère pas comme une infraction le fait de le garder en captivité. Essentiellement, la loi maintient les droits acquis en ce qui concerne les éléphants, les grands singes, les grands félins ou les autres animaux désignés qui sont déjà en captivité. Ces animaux peuvent continuer à être gardés légalement, mais non pour en faire l’élevage, jusqu’à leur mort, tant et aussi longtemps que leur captivité n’est pas interrompue.

Le projet de loi prévoit également une exception si l’animal est gardé en captivité à des fins de recherches scientifiques non dommageables ou dans l’intérêt de cet animal, considération faite du bien-être de l’individu et de la conservation de l’espèce, à condition que la personne qui garde l’animal ait une licence délivrée par le gouvernement fédéral ou par un gouvernement provincial.

En outre, un éléphant, un grand singe ou un animal désigné peut être gardé en captivité par son propriétaire ou par un employé qui en a la garde ou qui en assure la surveillance et qui est à l’emploi d’une province ou d’une municipalité, ou par une personne ou un employé nommé par un organisme provincial ou municipal, ou par un employé d’une entité fédérale inscrite à l’une ou l’autre des annexes I à V de la Loi sur la gestion des finances publiques. Essentiellement, cela signifie que la loi ne s’applique pas aux employés de quelque ordre de gouvernement que ce soit lorsque la garde de l’animal fait partie de leurs tâches ou fonctions.

Une grande incertitude règne au sein de l’industrie quant à la signification réelle de certaines de ces exemptions, car le projet de loi n’est pas très clair. Par exemple, la référence aux licences provinciales concerne-t-elle les licences existantes ou les provinces devront-elles créer une autorité chargée de délivrer les licences pour appliquer ce projet de loi? Que se passe-t-il si le ministère de l’Agriculture, de l’Alimentation et des Affaires rurales de l’Ontario reconnaît déjà un zoo de la province comme entité qui mène des recherches? Cette licence sera-t-elle suffisante ou en faudra-t-il une autre?

Chaque province dispose déjà de son propre système de protection du bien-être des animaux, et certaines provinces, par exemple la Colombie-Britannique et le Québec, ont déjà une réglementation bien établie en ce qui concerne les zoos. La manière dont ce projet de loi s’ajouterait à tout cela n’est pas claire.

Toutefois, il existe une exception importante aux normes énoncées dans ce projet de loi. Outre les exceptions déjà mentionnées, les infractions ne s’appliqueraient pas à toute entité désignée par le ministre de l’Environnement et du Changement climatique à titre d’organisme animalier admissible. Il faut satisfaire à une longue liste d’exigences pour obtenir la désignation d’organisme animalier admissible. Toutefois, si toutes ces conditions sont remplies et que l’entité reçoit la désignation, elle conserve la capacité de garder et d’élever des éléphants, des grands singes et certaines autres espèces désignées d’animaux.

Au fond, l’organisme échappe aux dispositions de cette mesure législative.

Cela dit, sur les 27 zoos et aquariums accrédités, sept n’ont pas à franchir ces obstacles. Ils peuvent contourner toutes les étapes requises, puisqu’ils sont nommés directement dans le projet de loi, ce qui leur donne, en quelque sorte, un passe-droit perpétuel. Ces sept institutions sont énumérées au paragraphe 19(1) et comprennent l’Assiniboine Park Zoo, la Calgary Zoological Society, le Zoo de Granby, le Biodôme de Montréal, le Ripley’s Aquarium of Canada, le Conseil de gestion du zoo de Toronto et le Vancouver Aquarium.

Vous remarquerez, chers collègues, que le parc African Lion Safari ne figure pas dans cette liste. Cela signifie que, même s’il est accrédité par l’organisme Aquariums et zoos accrédités du Canada, AZAC, il devra passer par un processus qui pourrait être long, ardu et incertain pour savoir s’il sera autorisé à poursuivre l’excellent travail qu’il accomplit depuis plus de 50 ans.

Outre le parc African Lion Safari, 18 autres zoos déjà accrédités par AZAC n’ont pas été inclus dans la liste des zoos exemptés. Ils pourraient tous être confrontés à une crise existentielle concernant l’avenir de leur travail, de leurs moyens de subsistance et de leurs efforts de conservation, et ce, pour une simple raison : ils sont membres de l’association Aquariums et zoos accrédités du Canada, AZAC, mais ils ne sont pas membres de l’Association of Zoos and Aquariums, l’AZA, établie aux États-Unis.

Chers collègues, nous devons nous arrêter quelques instants pour réfléchir aux implications du projet de loi. Le projet de loi S-241 confie essentiellement les normes d’accréditation des zoos canadiens à un organisme d’accréditation américain. Je trouve cela très troublant. Comme me l’ont dit à maintes reprises les zoos qui n’ont pas été retenus dans la liste restreinte du projet de loi : « Pourquoi voudrions-nous confier nos normes d’accréditation à un organisme américain? »

Chers collègues, si vous interrogez le sénateur Klyne à ce sujet, il affirmera que l’Association of Zoos and Aquariums, ou l’AZA, est un organisme d’accréditation international actif dans 13 pays. Ce n’est vrai qu’en partie. L’AZA est peut-être active dans 13 pays, mais le conseil d’administration de cette société américaine à but non lucratif est entièrement composé de citoyens américains. L’AZA est peut-être active dans 13 pays, mais elle est établie, dirigée et contrôlée par des Américains. Le Canada n’est pas représenté au sein de son conseil d’administration.

Le sénateur Klyne vous dira également que les normes de l’AZA sont plus strictes que celles de l’organisme Aquariums et zoos accrédités du Canada et que c’est pour cette raison qu’elles ont été choisies. Mais j’ai interrogé tous les zoos que j’ai visités à ce sujet, même ceux qui sont déjà accrédités par l’AZA, et j’ai constaté que le point de vue du sénateur Klyne est minoritaire. Les zoos accrédités ne s’entendent pas pour dire quelle est la meilleure accréditation. En fait, dans de nombreux cas, les normes d’Aquariums et zoos accrédités du Canada sont manifestement plus élevées que celles de l’AZA.

Il y a un aspect qui a vraiment attiré mon attention. L’été dernier, la Chambre des représentants des États-Unis a été saisie d’un projet de loi visant à mettre en place la SWIMS Act. Il s’agit de modifier la U.S. Marine Mammal Protection Act de 1972 et l’Animal Welfare Act afin d’interdire la prise, l’importation, l’exportation et l’élevage de certains cétacés à des fins d’exposition publique et à d’autres fins. Cela peut ne pas sembler très scandaleux pour les Canadiens, puisque c’est déjà prévu dans la loi au Canada. Or, aux États-Unis, l’Association of Zoos and Aquariums, ou AZA, s’est opposée à ce projet de loi, honorables collègues. Vous pouvez vérifier cette information sur le site Web de l’AZA. Vous pouvez aller à la section qu’elle appelle le Legislative Education Centre et chercher l’information sur la SWIMS Act. Vous y verrez ce qui suit :

La [...] (SWIMS) Act vise à interdire l’élevage, l’importation et l’exportation d’épaulards, de bélugas, de faux-orques et de globicéphales. Cela établirait un dangereux précédent en limitant la capacité du personnel hautement qualifié des établissements comme les aquariums et les zoos accrédités par l’AZA de prendre des décisions concernant les animaux et les soins qui leur sont prodigués.

Honorables collègues, l’AZA autorise les zoos canadiens à suivre ses normes, mais elle s’oppose à des mesures législatives sur le bien-être des animaux qui sont déjà en place au Canada.

Ce n’est pas tout.

Le 22 septembre 2022, le président et chef de direction de l’AZA a envoyé une lettre aux membres de l’organisme. Voici ce qu’il a dit en partie :

Il est essentiel que nous soyons unis et que nous parlions d’une seule voix contre ce projet de loi. Il n’est pas seulement question du béluga ou de l’épaulard. Des arguments identiques sont actuellement avancés au sujet des éléphants, des grands singes, des girafes, des grands félins et d’autres espèces. Nous devons agir maintenant pour faire savoir au Congrès que ce projet de loi crée un dangereux précédent en compromettant la capacité du personnel hautement qualifié des aquariums et des zoos accrédités par l’AZA à prendre des décisions concernant les animaux dont il a la charge.

(1640)

Chers collègues, je ne veux pas me montrer partisan, mais cela ressemble à un gouvernement libéral.

Honorables sénateurs, ce n’est pas la position des gens l’AZA que je conteste. Je pense en fait qu’ils ont de très bons arguments, qu’on peut lire dans leur lettre intégrale. C’est leur hypocrisie que je conteste. Apparemment, si ce projet de loi est présenté aux États‑Unis, l’AZA le considère comme un dangereux précédent, mais s’il est présenté dans notre pays, tout va bien. Je ne pense pas que l’on puisse être plus hypocrite que cela. Il s’agit d’une organisation qui ne soutient même pas les normes canadiennes actuelles, et le sénateur Klyne veut en faire la référence pour des normes encore plus élevées, normes qu’elle n’approuve pas non plus et qu’elle ne respecte pas elle-même.

Honorables sénateurs, je tiens à répéter que je ne m’oppose pas à des critères réglementaires et législatifs plus stricts pour les zoos, mais je trouve très insultant qu’on donne un passe-droit à une poignée de zoos canadiens parce qu’ils relèvent d’un organisme américain qui n’appuie même pas les normes canadiennes actuelles, encore moins celles que le projet de loi propose.

Lorsque j’ai visité des zoos accrédités par Aquariums et zoos accrédités du Canada, et non pas par son pendant américain, l’AZA, je leur ai demandé : « Pourquoi n’avez-vous pas tenté d’obtenir l’accréditation de l’AZA? »

Trish Gerth, la directrice générale de l’African Lion Safari, m’a dit que le parc avait en fait envisagé d’obtenir l’accréditation de l’AZA à un certain moment. Un représentant de l’AZA est venu des États-Unis pour effectuer un examen initial du parc. Il a dit qu’il croyait que le parc n’aurait aucun mal à obtenir l’accréditation. Cependant, l’African Lion Safari a décidé de ne pas poursuivre les démarches parce qu’il était d’avis qu’il fallait un organisme canadien solide axé exclusivement sur le cadre législatif et réglementaire de notre pays.

J’ai entendu des avis similaires de la part d’autres zoos accrédités par Aquariums et zoos accrédités du Canada : « Pourquoi un organisme américain imposerait-il au Canada les normes à appliquer ici? » Je suis d’accord.

Chers collègues, dans son discours à l’étape de la deuxième lecture du projet de loi, le sénateur Klyne a mentionné l’African Lion Safari à quelques reprises. Chaque fois, ses déclarations contenaient de la mésinformation à propos de cette réserve faunique. Voici sa première déclaration, chers collègues :

En outre, la Loi de Jane Goodall interdit l’utilisation des espèces concernées dans les spectacles de divertissement ainsi que les promenades à dos d’éléphant, à moins qu’elles ne soient autorisées par un gouvernement provincial. Cela s’applique aux lions de mer et aux morses de Marineland à Niagara Falls et aux éléphants de l’African Lion Safari près d’Hamilton.

Il a poursuivi en disant :

[…] les 16 éléphants du parc African Lion Safari faisaient partie de spectacles et les visiteurs pouvaient faire une balade sur leur dos, ce qui s’est traduit par une attaque en 2019. L’Association des zoos et aquariums du Canada a interdit les tours d’éléphant l’année dernière.

Permettez-moi de vous exposer les faits relatifs à cette information inexacte, chers collègues. Premièrement, l’insinuation selon laquelle ce projet de loi va en quelque sorte forcer le parc African Lion Safari à annuler les promenades à dos d’éléphant est complètement fausse. Pour commencer, ce parc a commencé à supprimer progressivement les promenades à dos d’éléphant de ses présentations et de ses programmes animaliers bien avant que l’Association des zoos et aquariums du Canada ne les interdise. Lorsque cette association a pris la décision d’interdire les promenades, elle l’a fait avec le soutien du parc African Lion Safari. Ne vous y trompez pas, il n’y a plus de promenades à dos d’éléphant dans le parc African Lion Safari que ce projet de loi pourrait supprimer.

Deuxièmement, le sénateur Klyne a dit que les promenades à dos d’éléphant et l’utilisation d’éléphants à des fins de divertissement avaient donné lieu à une attaque en 2019. Cette affirmation est aussi fausse, chers collègues. Il y a effectivement eu un incident, mais ce dernier n’avait rien à voir avec les spectacles et les promenades à dos d’éléphant. Le ministère du Travail de l’Ontario a mené une enquête approfondie sur l’incident, et le parc African Lion Safari n’a jamais été accusé ou reconnu coupable de n’importe quel type d’inconduite ou de mauvais traitement envers un animal.

Le sénateur Klyne a également affirmé :

[…] la Loi de Jane Goodall mettrait progressivement fin à la tenue en captivité d’éléphants au Canada, comme cela a été le cas pour les baleines et les dauphins quand nous avons adopté des lois fédérales à cette fin. Pourquoi? C’est principalement parce que notre climat ne leur convient pas, ce qui force ces créatures énormes, intelligentes et sociales, à vaste répartition, à passer l’hiver à l’intérieur.

Il est regrettable que le sénateur Klyne n’ait pas visité la réserve faunique — la réserve possédant le plus grand troupeau d’éléphants au pays — avant de faire cette déclaration et de tirer ses conclusions sur le parc et sur le sort des éléphants au Canada.

Le parc African Lion Safari est reconnu dans le monde entier pour son expertise en matière de bien-être des éléphants. Les organismes de conservation partout dans le monde consultent régulièrement ses professionnels des soins aux éléphants pour obtenir leur avis sur les questions relatives au bien-être des éléphants, à la gestion de leurs soins de santé et à leur conservation.

En 1998, en collaboration avec plusieurs partenaires internationaux, l’African Lion Safari a fondé l’International Elephant Foundation, qui se consacre à la conservation des éléphants d’Afrique et d’Asie. En 2021, cette fondation a appuyé 20 projets dans 13 pays répartis sur trois continents visant à investir dans le bien-être des éléphants à des endroits comme le Kenya, l’Ouganda, le Rwanda, la Zambie, la Namibie, la Tanzanie, le Népal, l’Inde et l’Indonésie.

L’African Lion Safari participe activement au comité consultatif de l’Association of Zoos and Aquariums depuis plus de 30 ans. Il conseille la fondation Asian Elephant Support, est partenaire du volet dédié aux éléphants d’Asie du programme Saving Animals From Extinction de l’Association of Zoos and Aquariums et est un partenaire donateur du Groupe de spécialistes de l’éléphant d’Asie de la Commission pour la sauvegarde des espèces de l’Union internationale pour la conservation de la nature. Autrement dit, c’est un organisme expert. Il désapprouve fortement la façon dont le sénateur Klyne décrit comment se portent les éléphants en captivité au Canada.

Charlie Gray est le responsable des éléphants de l’African Lion Safari. Il s’occupe directement des éléphants depuis 1982, et il a accédé au poste de gérant de la section des éléphants à l’African Lion Safari en 1987. Charlie est membre fondateur de l’Elephant Managers Association et membre du conseil d’administration de l’International Elephant Foundation. Il a siégé au comité consultatif de l’American Association of Zoos and Aquariums mis sur pied pour examiner le programme de survie de l’éléphant d’Asie, et ce, de 1988 à 2019. Il est un expert mondialement reconnu pour son savoir sur les éléphants.

Charlie nous a dit que, contrairement à ce que le sénateur Klyne et d’autres prétendus experts essaient de vous faire croire, les éléphants dont ils prennent soin sont très heureux pendant toutes les saisons de l’année. C’est principalement attribuable au fait que la majorité des individus de ce troupeau d’éléphants d’Asie est née et a grandi au Canada et qu’ils sont acclimatés aux hivers canadiens. En fait, Charlie a affirmé que leurs éléphants préfèrent le froid à la chaleur parce qu’ils ne sont pas incommodés par les insectes. Ils aiment aussi courir et jouer dans la neige, briser la glace à la surface du lac et y nager.

Chers collègues, je crois que vous avez tous reçu une courte vidéo de ces éléphants qui s’amusent. Si vous ne l’avez pas encore regardée ou si vous l’avez supprimée, faites-le-moi savoir. Je vous l’enverrai de nouveau avec plaisir. On voit les éléphants briser la glace, courir et nager dans le froid. Ils habitent dans des enclos chauffés pendant l’hiver et ils peuvent y entrer et en sortir à leur guise et ils n’hésitent pas à aller dehors pour profiter de l’hiver.

African Lion Safari a mené des recherches fascinantes sur la capacité des éléphants d’Asie de s’adapter au froid. Grâce à des recherches en thermographie, l’organisme a découvert que cette espèce a la capacité, inconnue jusqu’alors, d’envoyer du sang chaud vers les extrémités de son organisme lorsqu’il fait froid, ce qui explique en partie pourquoi elle aime nos hivers.

J’ai également été quelque peu étonné d’apprendre que l’AZA permet aux éléphants d’être gardés en captivité aux États-Unis, mais pas au Canada. Elle prétend que c’est à cause du climat; pourtant, certains des sites où se trouvent des troupeaux d’éléphants dans le Sud du Canada, comme African Lion Safari, connaissent des températures beaucoup plus chaudes que de nombreux sites américains qui prennent soin d’éléphants.

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Chers collègues, l’affirmation selon laquelle les éléphants ne peuvent pas s’épanouir en captivité au Canada est tout simplement fausse et trompeuse. Cela revient à fermer les yeux sur la multitude de données qui prouvent le contraire et à se fier à ses émotions plutôt qu’à sa raison.

Ensuite, chers collègues, j’ai visité un zoo, le Parc Safari, qui se trouve à Hemmingford, au Québec. Tout comme l’African Lion Safari, le Parc Safari va au-delà de l’idée que l’on se fait normalement d’un zoo. Il s’agit plutôt d’une réserve naturelle. D’une superficie de 152 hectares, soit 375 acres ou 1 million et demi de pieds carrés, le parc abrite plus de 500 animaux appartenant à 97 espèces. Il abrite et élève des espèces menacées en collaboration avec des établissements zoologiques d’Asie, d’Afrique, d’Europe et d’Amérique. Contrairement aux animaux des petits zoos privés, tous les animaux du Parc Safari ont accès à de grands espaces.

Le Parc Safari n’est pas un refuge pour les animaux. Il ne s’occupe pas de sauver ni de soigner des animaux blessés. Ce n’est pas sa spécialité. Il se concentre plutôt sur la conservation des espèces en péril par la reproduction et, lorsque c’est possible, sur la réinsertion des animaux dans leur environnement naturel. Par exemple, le Parc Safari a réussi la réinsertion en Afrique de guépards nés dans ses installations.

Dans une entrevue accordée aux médias, Jean-Pierre Ranger, propriétaire du Parc Safari, a déclaré ce qui suit :

Il ne reste plus que 2 000 à 3 000 guépards à l’état sauvage en Afrique. Si les choses vont un peu mieux aujourd’hui, c’est grâce aux établissements comme le mien, qui font de la reproduction, de la sensibilisation, et la réinsertion d’animaux dans leur milieu naturel.

Quand on lui a demandé ce qu’il pensait du projet de loi S-241, M. Ranger n’a pas mâché ses mots. Il l’a qualifié de cheval de Troie et de premier pas vers la fin de tous les établissements zoologiques. Vous pouvez être d’accord ou non avec M. Ranger, mais la vérité est qu’il a saisi les sentiments précis des participants au mouvement de défense des droits des animaux, qui sont les grands défenseurs de ce projet de loi.

Ils n’hésitent même pas à le dire. Un titre d’une publication végétalienne se lit comme suit : « A Proposed Federal Bill in Canada Could Be the First Step to Phasing Out the Zoo Industry. » L’article dit :

Le projet de loi a été présenté en 2020 par l’ancien sénateur Murray Sinclair, et il est maintenant de retour au Sénat après avoir été mis de côté en raison des élections fédérales de septembre 2021. Il contient de nombreuses nouvelles politiques importantes qui pourraient constituer la première étape de l’élimination progressive de l’industrie zoologique dans le pays.

Victoria Shroff, une avocate bien connue de la Colombie-Britannique qui défend les droits des animaux, a écrit ce qui suit dans le magazine Canadian Lawyer :

En 2019, j’ai posé une question dans ces pages : l’heure des droits des animaux a-t-elle sonné au Canada? La réponse a été apportée sous la forme d’un projet de loi révolutionnaire sur les droits des animaux présenté en novembre par le sénateur Murray Sinclair.

Elle a également écrit ceci :

Le projet de loi S-218 est conforme à mon opinion selon laquelle les animaux doivent avoir accès à la justice. S’il est adopté, ce projet de loi aura des répercussions importantes sur le bien-être des animaux dans tout le Canada, car il propose les lois les plus strictes en matière de protection des animaux jamais adoptées dans ce pays.

Parlant d’accès à la justice, je ne serais pas surprise si certains de mes anciens étudiants universitaires en droit animal — maintenant cliniciens à notre nouvelle clinique juridique bénévole pour animaux gérée par le programme de conseils juridiques des étudiants en droit — et moi nous retrouvions devant de nouveaux types d’affaires de droit animal si ce projet de loi est adopté.

Votre chien va vous poursuivre devant les tribunaux, chers collègues.

Autrement dit, si ce projet de loi est adopté, vous pouvez vous attendre à ce que les zoos exemptés et les zoos non exemptés fassent l’objet d’une pluie de poursuites de la part des groupes de défense des droits des animaux.

Ce n’est pas une théorie du complot, chers collègues. Ils sont transparents au sujet de leurs plans. Ils prévoient utiliser le système juridique pour faire valoir leurs intérêts.

Dans un article intitulé « Êtes-vous prêts à ce que votre animal de compagnie vous traîne devant les tribunaux? » paru dans le Vancouver Sun, Victoria Shroff a admis que les groupes de défense des droits des animaux adoptent une approche progressive pour faire valoir leurs intérêts. Elle reconnaît que ce ne sont pas tous les défenseurs des droits des animaux qui sont en faveur d’accorder davantage de droits à certains animaux, car :

Ils croient que cela crée une sorte d’exceptionnalisme ou de spécisme, ce qui ferait en sorte que certaines espèces plus reconnues et appréciées se retrouveraient au sommet de la chaîne, tandis que celles considérées comme ayant moins de valeur, comme les rats ou les poulets, resteraient pour ainsi dire de la chair à pâté. [...] Les éléphants et les dauphins, des espèces qui ont un langage, où tirer la ligne? Je crois que nous entrebâillons la porte des tribunaux afin de laisser entrer qui le pourra, et les autres suivront.

Que vous croyiez ou non que ce projet de loi ouvrira la voie à l’avancement des visées extrêmes des groupes de défense des droits des animaux, vous devez réaliser que ces militants sont convaincus que ce sera le cas. Ils sont presque étourdis par l’enthousiasme qu’ils éprouvent en pensant aux possibilités que ce projet de loi leur offrira s’il est adopté.

Chers collègues, tout le monde est favorable au bien-être des animaux, mais les droits des animaux sont une toute autre question. Les militants ne s’arrêteront pas tant que tous les animaux n’auront pas les mêmes droits que les humains, et c’est dans cette direction, chers collègues, que le projet de loi S-241 nous oriente.

Le sénateur Klyne n’a cessé de souligner que ce projet de loi « accorde [...] un statut légal restreint aux espèces visées [...] » C’est sans précédent dans le droit au Canada et cela est rendu possible par la création du rôle de défenseur des droits des animaux. Même si le rôle du défenseur des animaux n’interviendra qu’au moment de la détermination de la peine, cela nous engage manifestement sur une pente glissante, et les groupes de défense des animaux s’en réjouissent au plus haut point.

L’organisation Animal Justice a déclaré ceci :

Outre les protections élargies pour un grand nombre d’espèces d’animaux sauvages, Animal Justice se réjouit de constater la présence de dispositions qui accordent un statut légal restreint aux animaux lorsqu’ils sont maintenus en captivité de façon illégale. L’un des principaux défis pour les animaux est de faire reconnaître leurs intérêts par les tribunaux [...].

Écoutez bien ceci, chers collègues :

Mais grâce à la nouvelle loi proposée, les défenseurs des animaux pourront plus facilement donner aux animaux une voix bien nécessaire devant les tribunaux et lutter pour les protéger contre la cruauté. En vertu de cette loi, dans le cadre d’une poursuite pour détention ou élevage illégal d’un animal en captivité, un juge pourrait entendre les arguments juridiques d’un particulier ou d’un groupe de défense des animaux désigné. Cette personne ou cette organisation pourrait demander au juge de prendre des mesures pour protéger les intérêts supérieurs de l’animal, par exemple d’envoyer l’animal dans un sanctuaire et d’améliorer ses conditions de vie.

Ne vous y trompez pas, chers collègues. Accorder un statut juridique limité aux animaux nous engagera sur une pente glissante qui finira par avoir des répercussions non seulement sur les zoos, mais aussi sur l’agriculture. Des représentants de nombreuses organisations agricoles m’ont rencontré pour me faire part de leurs préoccupations concernant cette partie du projet de loi, car leurs conseillers juridiques les ont avertis qu’elle ouvrait la voie à la possibilité d’étendre le même statut juridique aux animaux non domestiqués.

En termes simples, chers collègues, le mouvement de défense des animaux ne cible pas seulement les zoos, mais aussi les fermes. Martin Rowe, de la Culture & Animals Foundation, l’a exprimé ainsi :

Je crois que, pour le mouvement de protection des animaux, le moment pourrait être bien choisi pour parler de la fin de l’agriculture industrielle et de la fin d’une utilisation industrielle des animaux et des cultures qui servent à les nourrir, dans le but de restaurer les bassins hydrographiques et de remettre de grands pans de territoire à l’état sauvage.

Jane Goodall, dont le nom figure dans le titre du projet de loi, a elle-même déclaré :

Il semble évident que les fermes industrielles devraient être progressivement éliminées et que si des animaux sont élevés, ils devraient pouvoir sortir dans les champs lorsque le temps le permet.

Mme Goodall a ensuite appelé à l’abandon progressif de l’agriculture intensive, des monocultures et des produits chimiques agricoles. Elle estime qu’il faut revenir à une « agriculture familiale à petite échelle ».

Chers collègues, le Canada est actuellement le cinquième exportateur mondial de produits agricoles et agroalimentaires, avec des exportations de 82,2 milliards de dollars par an. Nous avons la chance de jouir de conditions favorables à une production alimentaire qui dépasse largement les besoins de notre population, ce qui nous donne la possibilité et la responsabilité de nourrir le monde. Suivre les conseils de Jane Goodall mettrait fin à tout cela.

(1700)

Ne vous y trompez pas. Ce projet de loi viendrait porter un autre coup dur au secteur agricole canadien. L’objectif des défenseurs des droits des animaux n’est pas seulement de mettre fin à l’utilisation des animaux dans les zoos, mais aussi d’étendre cette pratique à l’agriculture. Je reconnais que ce projet de loi ne va pas directement dans ce sens, mais, en franchissant la ligne qui donne aux animaux un statut juridique devant les tribunaux, il renforce ce mouvement et nous pousse indéniablement dans cette direction.

Tous les représentants des dix zoos que j’ai visités ont exprimé des inquiétudes concernant cette partie du projet de loi, même ceux qui sont exemptés du projet de loi en raison de leur accréditation par l’Association of Zoos and Aquariums. Jean-Pierre Ranger avait raison : ce projet de loi est un cheval de Troie. Comme je l’ai dit plus tôt, il s’agit d’un effort maladroit pour une noble cause, qui entraînera plus d’effets négatifs que positifs.

Après le Parc Safari, j’ai visité le Zoo de Granby, le Zoo Ecomuseum de Montréal et le Parc Oméga. Tous ces zoos sont situés au Québec et tous font un travail remarquable en matière de conservation et d’éducation. Pourtant, un seul d’entre eux bénéficie d’une exemption : le Zoo de Granby. Les autres devront se plier aux exigences de ce projet de loi pour savoir s’ils seront désignés comme « organisme animalier admissible ».

Paradoxalement, sur les trois zoos, le Zoo de Granby est le seul qui possède des éléphants, de grands singes ou de grands félins et on lui a accordé l’exemption. C’est le seul zoo québécois qui bénéficie d’une exemption automatique dans le projet de loi. Ni le Zoo Ecomuseum ni le Parc Oméga ne possèdent ces animaux; pourtant, c’est au Zoo de Granby que l’exemption a été accordée. Le Zoo Ecomuseum est situé à 30 minutes du centre-ville de Montréal. C’est le seul et unique zoo de l’île de Montréal et, comme me l’a expliqué le directeur général David Rodrigue, ce zoo abrite uniquement des animaux du Québec. Il n’y a pas de lions, de tigres, de guépards, d’éléphants ou de gorilles. Il y a toutefois des lynx, des loups et des ours. Pour une raison quelconque, tous ces animaux sont couverts par le projet de loi, même s’ils sont originaires du Québec et ne viennent pas d’un autre pays ou d’une autre province.

Cela nous amène à la question de la compétence. Le projet de loi S-241 tente de légiférer dans deux domaines de compétence fédérale : l’exercice du pouvoir fédéral en matière de commerce international et interprovincial et l’exercice du pouvoir fédéral en matière de cruauté envers les animaux et de sécurité publique dans des affaires criminelles. Il est toutefois difficile de comprendre ce que cela a à voir avec les espèces domestiques originaires du Québec.

Le Parc Oméga m’a fait part des mêmes préoccupations à propos des compétences. Le Parc Omega est un zoo de type safari avec de grands espaces naturels qui s’étendent sur une superficie de 2 000 acres et qui abritent plus de 20 espèces animales qui vivent dans leur habitat naturel. Dans la plus grande partie du parc, les visiteurs peuvent conduire dans les enclos et observer les animaux en toute sécurité dans leur voiture. Le parc veut amener les gens à renouer avec la nature, notre histoire et les coutumes et croyances des peuples autochtones du Québec.

Les meutes de loups font partie des principaux attraits du parc. On y trouve 5 meutes comprenant chacune 5 à 13 loups, donc environ 60 loups en tout. Tous ces loups appartiennent à l’espèce Canis lupus, qui serait protégée au titre du projet de loi S-241. Le parc a un programme appelé « Dormir avec les loups ». On peut louer une cabane, un chalet ou un gîte pour la nuit. Nous n’avons pas passé la nuit là-bas, mais nous avons passé une heure dans l’un de ces lieux d’hébergement dotés de fenêtres offrant une vue panoramique. Grâce à cette vue panoramique, on peut observer une meute de loups dans son habitat naturel sous tous les angles. Les loups viennent jusqu’à la chambre. On a l’impression de pouvoir les caresser de l’autre côté de la vitre. Le programme est tellement populaire qu’il faut actuellement attendre un an pour pouvoir réserver une place.

Lorsque Alain Massie, le directeur général du parc, et Serge Lussier, le directeur technique et porte-parole, m’ont fait visiter les installations, il n’y avait pas de loups en vue. Cependant, lorsque M. Lussier a ouvert une porte et a appelé les loups, nous avons commencé à voir leurs ombres d’abord dans la forêt puis nous les avons clairement vus, tout près des fenêtres de la cabane. C’était saisissant. Je comprends pourquoi les gens veulent s’approcher de ces animaux majestueux.

Toutefois, le loup relève de la compétence des provinces comme l’indique Environnement et Changement climatique Canada : « Les gouvernements provinciaux et territoriaux sont responsables de la gestion des espèces sauvages terrestres [...] »

Environnement et Changement climatique Canada ajoute également ceci :

[...] le loup est protégé par diverses lois provinciales et territoriales sur les espèces sauvages. Des règlements précis, adoptés en vertu de ces lois, permettent certaines utilisations des espèces sauvages au Canada sous réserve de l’obtention de licences ou de permis.

Ces licences ou permis portent sur la chasse et la prise des loups. Environnement Canada précise :

Dans la plupart de ces territoires de compétence, le loup gris est considéré à la fois comme animal à fourrure et gibier. Les peuples autochtones peuvent, en vertu de la Constitution canadienne, prélever des espèces sauvages pour leurs utilisations traditionnelles.

En d’autres mots, alors que le projet de loi S-241 vise à ériger en infraction criminelle le fait de détenir ces animaux en captivité, il serait toujours parfaitement légal de les chasser lorsqu’ils ne sont pas en captivité. Dès qu’ils sortent du Parc Oméga, ils peuvent être chassés. Le décalage est plutôt ahurissant. On en vient à se demander comment exactement les 800 espèces — j’ai bien dit 800 espèces, chers collègues — ont été ajoutées à la liste du projet de loi S-241.

Je ne suis pas certain de l’auteur de la liste. Le gouvernement ne l’a pas établie. Je doute que le sénateur Klyne l’ait fait par lui-même. Le projet de loi du sénateur Sinclair n’avait pas cette liste, mais 800 espèces ont maintenant été inscrites à la liste du projet de loi S-241.

Le projet de loi S-218 n’avait inscrit que les éléphants et les grands singes à la liste. Toutes les autres espèces devaient être ajoutées par le Cabinet :

[...] après avoir consulté des experts en science animale, en médecine vétérinaire ou en soins animaliers ainsi que des représentants de groupes voués au bien-être des animaux sur la capacité de telle ou telle espèce à vivre en captivité et sur la question de savoir si les conditions de la captivité sont adaptées aux besoins biologiques et écologiques des individus de l’espèce et leur permettent de vivre convenablement [...]

Cette disposition se trouvait dans le projet de loi S-218, mais le projet de loi S-241 a ensuite été présenté avec une liste de 800 espèces déjà incluses.

Chers collègues, comment ces espèces ont-elles pu être ajoutées à la liste? Sommes-nous censés appuyer un projet de loi auquel on a ajouté 800 espèces sans que nous ayons pu mener les consultations que le Cabinet sera tenu de mener? Sommes-nous censés croire que ces consultations ont été menées par le sénateur Klyne? Devrions‑nous le croire sur parole quand il dit que toutes ces espèces devraient être ajoutées à la liste? Passerons-nous en revue chacune de ces espèces en comité, ou adopterons-nous plutôt une mesure législative qui n’a pas été étudiée en bonne et due forme?

Je vais être franc : ajouter 800 espèces à un projet de loi qui ne devait à l’origine en contenir que deux me semble un peu effronté. Si nous adoptions ce projet de loi sans avoir d’abord vérifié que chacune des espèces qui figurent sur la liste répond aux critères définis, nous renoncerions au second examen objectif qu’il nous incombe de faire en tant que législateurs.

L’inclusion du loup gris dans ce projet de loi illustre parfaitement les dangers de ne pas faire notre travail. Il ne s’agit ni d’une espèce menacée ni d’une espèce en voie de disparition. Dans le rapport Espèces sauvages : la situation générale des espèces au Canada, le loup gris est désigné comme étant « en sécurité ». Les provinces et les territoires font état de populations stables ou croissantes et ne signalent aucune menace aiguë généralisée. Pourtant, pour une raison que nous ignorons pour l’instant, le sénateur Klyne a inclus cette espèce dans le projet de loi. Y a-t-il eu des pressions de la part d’un groupe de défense des animaux? L’organisation Animal Justice a-t-elle insisté pour que le loup gris soit inclus dans le projet de loi afin que le sénateur Klyne obtienne son soutien? Nous n’en avons aucune idée, car le Sénat n’a reçu aucune information de base, aucune étude scientifique, aucun rapport vétérinaire et aucun compte rendu des consultations. Cette opacité est inacceptable.

Chers collègues, croyez-le ou non, la première version de ce discours était beaucoup plus longue — je ne mens pas —, car il y a beaucoup plus de choses qui peuvent être et, en fait, qui devraient être dites. Je regrette de ne pas avoir pu visiter plus de zoos, mais vous êtes probablement soulagés que je n’en aie visité que 10.

(1710)

Permettez-moi de conclure. Ce projet de loi prétend aider les animaux, mais il fera le contraire. Alors que le parrain du projet de loi nous dit régulièrement qu’il est « urgent » d’adopter ce projet de loi — nous l’avons entendu ici dire : « Le sénateur Plett bloque le projet de loi; il est urgent que nous adoptions ce projet de loi » —, le jour où il sera adopté, pas un seul petit zoo privé ne fermera ses portes pour cette raison, pas un seul. Les zoos qui ne répondent pas aux normes sont protégés par des droits acquis et chaque animal lui appartenant devra vivre dans ces conditions jusqu’à la fin de sa vie.

Je précise que la durée de vie moyenne d’un tigre en captivité est de 22 ans. Les lions vivent environ 25 ans et les éléphants 60 à 70 ans. Ce projet de loi laissera pour compte les animaux qui souffrent dans les petits zoos privés, tout en menaçant immédiatement l’avenir de grands parcs comme African Lion Safari, le Parc Oméga et bien d’autres encore, qui œuvrent pour la conservation des espèces.

Combien de fois avons-nous entendu que les éléphants sont des animaux sociaux et que les animaux ont besoin d’amis, de partenaires et d’amour? Ces animaux périront lentement jusqu’à ce qu’il n’y ait plus qu’un seul animal, isolé et sans partenaire.

Pire, en plus de ne rien faire pour soulager les animaux qui souffrent réellement, le projet de loi ajoutera à leur souffrance en exigeant qu’ils soient castrés ou qu’il leur soit impossible de se reproduire, ce qui leur causera encore plus de tort et qui les privera encore plus de leur dignité.

En outre, en plus de ne rien faire pour venir en aide aux animaux dans les petits zoos, le projet de loi aura assurément un impact sur l’excellent travail de conservation effectué par les 18 zoos accrédités par l’AZAC, qui n’ont pas été consultés pendant la conception du projet de loi et qui n’ont pas obtenu d’exemption. Au lieu de soutenir les efforts de conservation, le projet de loi refroidira les ardeurs de ces grands établissements, qui craindront maintenant pour leur viabilité à long terme et leur capacité à poursuivre leur travail de conservation vital.

Chers collègues, Jane Goodall elle-même considérait que les zoos étaient importants pour la conservation. Elle a dit :

[...] certains croient à tort que, par définition, les animaux sont mieux dans leur habitat naturel. Malheureusement, ce n’est pas nécessairement le cas. Les animaux sauvages subissent des pressions sans précédent de nos jours, par exemple à cause de la disparition ou de la fragmentation des habitats et des changements climatiques.

La conservation est essentielle pour que les prochaines générations puissent avoir accès aux espèces sauvages que nous tenons aujourd’hui pour acquises. Le projet de loi menace les efforts de conservation parce qu’il ne reconnaît pas la valeur de l’accréditation canadienne et qu’il impose les normes américaines aux zoos du Canada, même si, dans bien des cas, ces normes sont moins sévères que les nôtres.

Chers collègues, bien que des mesures soient nécessaires, le projet de loi S-241 n’est pas la solution. Comme je l’ai indiqué, ce projet de loi est aussi précis qu’un éléphant dans un magasin de porcelaine ou qu’un renard dans un poulailler. Non seulement il ne permettra pas d’atteindre les objectifs visés, mais il sèmera également le désordre.

Nous devons rejeter ce projet de loi. J’invite le gouvernement à présenter une mesure législative équilibrée, efficace et adaptée à la réalité des zoos accrédités au Canada.

Au nom du bien-être des animaux de notre pays et au nom des incroyables efforts de conservation déployés, je vous exhorte à voter contre ce projet de loi en deuxième lecture.

À contrecœur, je ne demanderai pas de vote par appel nominal. Je permettrai à ce projet de loi d’être adopté en deuxième lecture, avec dissidence, afin que les trois comités indiqués précédemment puissent commencer leurs travaux dans le but de présenter un projet de loi adapté à la réalité de notre pays. Chers collègues, je vous remercie.

Des voix : Bravo!

Son Honneur la Présidente intérimaire : Les honorables sénateurs sont-ils prêts à se prononcer?

Des voix : Le vote!

Son Honneur la Présidente intérimaire : Vous plaît-il, honorables sénateurs, d’adopter la motion?

Des voix : D’accord.

Une voix : Avec dissidence.

(La motion est adoptée et le projet de loi est lu pour la deuxième fois, avec dissidence.)

(Conformément à l’ordre adopté par le Sénat plus tôt aujourd’hui, le projet de loi est renvoyé d’office au Comité sénatorial permanent des affaires juridiques et constitutionnelles, et le Comité sénatorial permanent de l’agriculture et des forêts et le Comité sénatorial permanent de l’énergie, de l’environnement et des ressources naturelles sont tous les deux autorisés à étudier, afin d’en faire rapport, la teneur du projet de loi.)

Projet de loi sur l’édiction d’engagements climatiques

Projet de loi modificatif—Deuxième lecture

L’ordre du jour appelle :

Reprise du débat sur la motion de l’honorable sénatrice Galvez, appuyée par l’honorable sénateur Gignac, tendant à la deuxième lecture du projet de loi S-243, Loi édictant la Loi sur la finance alignée sur le climat et apportant des modifications connexes à d’autres lois.

L’honorable Michael L. MacDonald : Honorables sénateurs, je prends la parole aujourd’hui en tant que porte-parole du projet de loi S-243, Loi édictant la Loi sur la finance alignée sur le climat et apportant des modifications connexes à d’autres lois.

Le projet de loi S-243 est une mesure législative ambitieuse pour un projet de loi d’intérêt public du Sénat. Je ne vais pas passer beaucoup de temps à en faire le résumé, car son autrice et marraine, la sénatrice Galvez, l’a déjà fait, et son site Web contient toute la documentation nécessaire.

Aux fins du compte rendu, toutefois, et pour rafraîchir votre mémoire, je vais mentionner certains points.

Premièrement, le projet de loi S-243 vise à atteindre deux grands objectifs. Le premier consiste à aligner les activités des institutions financières fédérales et d’autres entités réglementées par le gouvernement fédéral sur l’intérêt économique et public prépondérant qu’est la réalisation de nos engagements climatiques. Deuxièmement, il vise à faire des progrès rapides et significatifs pour préserver la stabilité des systèmes financiers et climatiques.

Autrement dit, ce projet de loi vise à protéger nos institutions financières contre les risques posés par les changements climatiques et à protéger notre climat contre les risques posés par nos institutions financières.

Je précise qu’il ne s’agit pas de risques imaginaires. Dans son rapport de mars 2023 intitulé Gestion des risques climatiques, le Bureau du surintendant des institutions financières divise ces risques en deux catégories : les risques physiques et les risques de transition.

Par risques physiques, on entend les risques occasionnés par les événements graves liés au climat, par exemple les inondations, les ouragans et les feux de forêt. Ces catastrophes peuvent causer des dommages physiques aux infrastructures et aux propriétés, y compris celles qui appartiennent aux institutions financières. Les coûts pour réparer ou remplacer des biens endommagés peuvent être très élevés et ils risquent d’avoir une incidence sur la stabilité financière de ces institutions.

Quant aux risques de transition, ils émanent du processus de transition vers une économie à faibles émissions de carbone. Au fur et à mesure que les instances gouvernementales et les législateurs instaurent des politiques et des mesures réglementaires en matière de lutte aux changements climatiques, les industries qui dépendent en grande partie des activités générant beaucoup de carbone, par exemple les hydrocarbures, risquent d’avoir à relever de grands défis. On pourrait voir des actifs inutilisables, des investissements dévalués et des risques financiers accrus pour les institutions financières qui sont liées à ces industries.

En plus des risques physiques et de transition, il faut ajouter les risques relatifs à la responsabilité, à la réputation et aux marchés.

Les risques associés à la responsabilité sont ceux qui touchent les institutions financières dans les cas des événements graves liés au climat. À titre d’exemple, si les activités d’une entreprise contribuent à produire des émissions de gaz à effet de serre, ou GES, ou à dégrader l’environnement, l’entreprise fautive risque d’être visée par des poursuites judiciaires ou des pénalités. Les institutions financières qui ont investi dans ces industries ou financé de telles entreprises pourraient être tenues responsables des actions fautives.

Les risques d’atteinte à la réputation relèvent essentiellement des relations publiques, mais il ne faudrait pas faire l’erreur de les penser sans importance. Il suffit de se rappeler le glissement rapide vers l’insolvabilité qu’ont connu un certain nombre de banques américaines après que le public a perdu confiance dans la viabilité de leurs bilans. Bien que le risque d’atteinte à la réputation lié au climat ne soit pas susceptible de prendre une telle ampleur, il met en évidence une réalité : il faut maintenir la confiance du public envers nos institutions bancaires. Les clients, les investisseurs et les autres parties prenantes exigent de plus en plus que les institutions financières harmonisent leurs activités avec des pratiques durables, et tout manquement à cet égard pourrait nuire à la réputation d’une institution et lui faire perdre des clients.

Quant aux risques du marché, ils concernent les changements qui se produisent dans les préférences des consommateurs et la réglementation et qui, à leur tour, conduisent à des changements dans la demande pour certains produits et services. Les institutions financières qui ne sont pas prêtes à s’adapter à ces changements pourraient connaître une baisse de la demande pour les produits et services qu’elles offrent ou rater des occasions d’investissement dans des secteurs durables émergents.

Les risques mentionnés sont ceux auxquels nos institutions financières sont confrontées en raison des changements climatiques. À l’inverse, les institutions financières sont-elles mêmes une source de risques, et de risques bien réels, pour le climat.

Ainsi, comme l’ont souligné la sénatrice Galvez et d’autres intervenants, les institutions financières jouent un rôle crucial, car elles procurent des fonds et des capitaux aux industries qui contribuent aux émissions de gaz à effet de serre. On pense par exemple à la poursuite et à l’expansion de projets de combustibles fossiles, aux nouveaux projets d’exploration pétrolière et gazière et aux transports à fortes émissions. S’ils ne sont pas contrôlés, ces investissements pourraient prolonger la dépendance aux sources d’énergie à intensité carbonique, ce qui aggraverait encore le changement climatique.

(1720)

En revanche, si les institutions financières n’appuient pas suffisamment la transition vers une économie à faibles émissions de carbone, les capitaux seront détournés au détriment de projets liés aux énergies renouvelables ou à faibles émissions de carbone. L’insuffisance des investissements dans les technologies propres et les infrastructures durables entraverait la transition vers une économie à faibles émissions de carbone, ralentissant ainsi les efforts d’atténuation des changements climatiques.

Chers collègues, nous pourrions parler d’autres risques, mais il suffit de dire qu’ils sont réels. Si les institutions financières fédérales choisissent de les ignorer, elles le font à leurs risques et périls et aux nôtres.

C’est à ces risques que l’on s’attaque avec le projet de loi S-243, qui propose la mise en œuvre des sept mesures suivantes.

Premièrement, on crée l’obligation pour les directeurs, les dirigeants et les administrateurs de gérer leurs organisations de manière à ce qu’elles se conforment aux engagements climatiques énoncés dans le projet de loi. L’idée est que les institutions financières devraient favoriser la réalisation de ces engagements, et non l’entraver.

Deuxièmement, la loi sur la finance alignée sur le climat oblige diverses organisations fédérales connexes, comme la Banque du Canada, le Bureau du surintendant des institutions financières, Exportation et développement Canada et d’autres, à s’harmoniser avec les engagements en matière de climat.

Troisièmement, les organisations sous réglementation fédérale doivent élaborer des plans d’action, fixer des cibles et présenter des rapports d’étape sur la réalisation des engagements climatiques.

Quatrièmement, certains conseils d’administration doivent compter un expert en climat parmi leurs administrateurs et éviter les conflits d’intérêts.

Cinquièmement, le projet de loi établirait des exigences en matière de suffisance du capital afin de garantir que les institutions financières puissent résister à d’éventuels chocs ou vulnérabilités liés au changement climatique.

Sixièmement, le projet de loi exige que le gouvernement élabore un plan d’action pour harmoniser les produits financiers avec les engagements climatiques. C’est l’une des mesures qui ne peuvent pas être abordées dans un projet de loi d’intérêt public du Sénat. Par conséquent, la sénatrice Galvez a fait ce que d’autres sénateurs font, c’est-à-dire qu’ils demandent au gouvernement de créer un cadre pour que cela se concrétise. Cela permet de contourner le problème de la présentation d’un projet de loi sénatorial qui impose des obligations financières au gouvernement.

Enfin, le projet de loi S-243 prévoit des processus d’examen public des progrès de la mise en œuvre afin de nous permettre d’apprendre au fur et à mesure et de tirer parti de nos réussites.

Vous devriez maintenant comprendre pourquoi j’ai dit au début qu’il s’agissait d’un texte législatif ambitieux pour un projet de loi d’intérêt public du Sénat.

Le problème, honorables sénateurs, c’est qu’à mon avis, il est trop ambitieux. Je ne conteste pas les objectifs visant à garantir que nos institutions financières soient protégées des risques posés par les changements climatiques et que notre climat soit protégé des risques posés par nos institutions financières. Cela dit, je pense que ce n’est pas la bonne façon de procéder pour y parvenir.

Les raisons de mes convictions sont nombreuses, mais permettez‑moi de vous en présenter brièvement deux.

Premièrement, le Bureau du surintendant des institutions financières et la Banque du Canada y travaillent déjà.

En effet, le 14 janvier 2022, la Banque du Canada et le Bureau du surintendant des institutions financières ont publié le rapport final du projet pilote visant l’analyse de scénarios climatiques, qui a été réalisé en collaboration avec six institutions financières canadiennes sous réglementation fédérale. Cette analyse était l’aboutissement d’un projet pilote lancé en novembre 2020 dans le but de : i) créer la capacité pour les autorités et les institutions financières d’analyser des scénarios de transition climatique; ii) aider le secteur financier canadien à mieux évaluer et communiquer les risques climatiques; iii) améliorer la compréhension de l’exposition potentielle du secteur financier aux risques associés à la transition climatique.

Plus tard, en janvier 2021, le Bureau du surintendant des institutions financières a publié un document de travail intitulé Incertitude et changements climatiques; Déjouer le risque lié aux changements climatiques par la préparation et la résilience. Le but de ce document de travail était d’engager les institutions financières et les régimes de retraite sous réglementation fédérale dans un dialogue sur les risques résultant des changements climatiques qui pourraient nuire à la sécurité et à la solidité de ces institutions. L’objectif était de commencer à définir, à identifier, à mesurer et à renforcer la résilience face aux risques liés aux changements climatiques.

Après la publication de l’analyse de scénarios climatiques en janvier 2022, le Bureau du surintendant des institutions financières a lancé en mai 2022 des consultations publiques sur un projet de lignes directrices pour la gestion des risques liés aux changements climatiques. Ces consultations ont abouti en mars dernier à la publication de la version finale des lignes directrices sur la gestion des risques climatiques.

Cette ligne directrice énonce les attentes du Bureau du surintendant des institutions financières en matière de gestion de ce type de risques par les institutions financières fédérales et est le résultat de l’une des plus vastes consultations de l’histoire du Bureau, qui a reçu plus de 4 300 réponses d’un large éventail de parties interrogées.

La ligne directrice met en œuvre trois résultats que les institutions financières fédérales doivent chercher à atteindre : elles doivent comprendre et atténuer les répercussions possibles des risques climatiques sur leur modèle et leur stratégie d’affaires; elles doivent avoir mis en place les pratiques de gouvernance et de gestion des risques qui s’imposent pour gérer les risques climatiques recensés; elles doivent demeurer résilientes sur le plan financier face à des scénarios de risques climatiques graves, mais vraisemblables, et résilientes sur le plan opérationnel malgré les perturbations causées par des catastrophes climatiques.

Il incombe aux institutions financières d’atteindre ces objectifs et les progrès réalisés seront évalués au moyen d’obligations minimales de divulgation assorties d’échéances précises.

L’incidence de cette ligne directrice répond dans la pratique au deuxième objectif du projet de loi, qui consiste à faire des progrès opportuns et concrets pour protéger nos institutions financières contre les risques posés par les changements climatiques. Bien que la réponse de la sénatrice Galvez à la ligne directrice ait été de souligner un certain nombre de lacunes, je note que le Bureau du surintendant des institutions financières lui-même considère qu’il s’agit d’un pas dans la bonne direction et qu’il a l’intention de revoir et de modifier la ligne directrice au fur et à mesure que les pratiques et les normes évoluent.

De plus, en ce qui concerne l’analyse de scénarios climatiques et les simulations de crise, ainsi que la suffisance du capital et des liquidités, le Bureau du surintendant des institutions financières a indiqué qu’il élaborerait probablement des consignes sur ces sujets dans une prochaine version de la ligne directrice.

Je comprends toutefois que si ce travail du Bureau du surintendant des institutions financières porte sur les risques que les changements climatiques font peser sur nos institutions financières, il ne répond pas à la nécessité de protéger notre climat contre les risques posés par nos institutions financières.

Ce qui m’amène à mon deuxième point, à savoir que cette question est elle aussi déjà abordée.

En avril 2021, 43 membres fondateurs ont créé la Net-Zero Banking Alliance, une alliance bancaire pour la carboneutralité qui a pris de l’expansion depuis cette date et qui représente plus de 40 % des actifs bancaires mondiaux, totalisant plus de 74 billions de dollars américains. Huit institutions canadiennes ont maintenant adhéré à cette alliance, à savoir Vancity, Coast Capital, la Banque de Montréal, la Banque de Nouvelle-Écosse, la Banque Canadienne Impériale de Commerce, la Banque Nationale du Canada, la Banque Royale du Canada et la Banque Toronto-Dominion.

L’alliance a été réunie dans le cadre de l’Initiative financière du Programme des Nations unies pour l’environnement et représente un groupe de banques qui se sont engagées à harmoniser leurs portefeuilles de prêts et d’investissements avec l’objectif de la carboneutralité d’ici 2050.

Pour adhérer à l’alliance, le directeur général de chaque banque doit signer une déclaration d’engagement décrivant le processus d’établissement des cibles et de production des rapports, considéré comme le principal catalyseur de la transition vers la carboneutralité. Tous les signataires doivent s’engager à faire passer les émissions de gaz à effet de serre opérationnelles et attribuables à leurs portefeuilles de prêts et d’investissements à des niveaux qui s’harmonisent avec les voies menant à la carboneutralité d’ici 2050 ou plus tôt; à fixer, dans les 18 mois suivant leur adhésion, des cibles pour 2030 — ou plus tôt — et une cible pour 2050, en plus de cibles intermédiaires tous les cinq ans à partir de 2030; à axer les premières cibles pour 2030 sur les secteurs prioritaires où la banque peut avoir l’incidence la plus significative, puis à fixer d’autres cibles sectorielles dans les 36 mois; à publier annuellement les émissions en chiffres absolus et l’intensité des émissions conformément aux pratiques exemplaires en vigueur, et dans l’année qui suit l’établissement des cibles, à divulguer les progrès réalisés par rapport à une stratégie de transition révisée par le conseil d’administration, définissant les mesures proposées et les politiques sectorielles liées au climat; à adopter une approche rigoureuse pour ce qui est du rôle des compensations dans les plans de transition.

Honorables collègues, étant donné que l’alliance compte pour plus de 40 % des actifs bancaires mondiaux, il ne faut pas prendre cela à la légère. C’est un engagement considérable qui, bien franchement, ne sera probablement pas réalisable aussi rapidement ou efficacement au moyen du lourd processus législatif proposé par le projet de loi S-243.

Comme on l’indique dans l’édition de la Sustainable Finance Law Review de janvier 2023 :

Au Canada, le secteur des finances durables s’est développé selon des cadres facultatifs et des pratiques exemplaires qui reposent sur les principes établis par l’International Capital Market Association en ce qui concerne les principes des obligations vertes, les principles des obligations liées à la durabilité, les principes des obligations sociales et le guide des finances liées à la transition climatique. Les divers instruments en matière de finances durables qui sont proposés dans ces cadres sont largement appuyés sur les marchés.

(1730)

L’article ajoute ceci :

La plus grande sensibilisation du marché à l’importance des considérations environnementales, sociales et de gouvernance [...] pour les parties prenantes a mené plus d’entreprises à adopter des cadres volontaires de divulgation en matière de durabilité comme celui du Groupe de travail sur l’information financière relative aux changements climatiques [...], mais aussi d’autres outils relevant de leur divulgation régulière, ce qui a, par conséquent, facilité l’utilisation d’instruments de financement durable. De plus en plus d’entreprises adoptent des objectifs de carboneutralité alignés sur les engagements nationaux du Canada, y compris les plus grandes banques du pays.

Chers collègues, je suis d’avis que ce que vise le projet de loi S-243 est déjà en cours de réalisation par des moyens réglementaires et volontaires.

Je dirais également que si une mesure législative d’une telle ampleur s’avérait nécessaire, elle devrait prendre la forme d’un projet de loi d’initiative ministérielle, et non d’un projet de loi d’intérêt public du Sénat. En plus d’édicter la Loi sur la finance alignée sur le climat, ce projet de loi modifierait également la Loi sur la Banque du Canada, la Loi sur la gestion des finances publiques, la Loi sur le Bureau du surintendant des institutions financières, la Loi sur l’Office d’investissement des régimes de pensions du secteur public, la Loi sur la Banque de développement du Canada, la Loi sur la Banque de l’infrastructure du Canada, la Loi canadienne sur la responsabilité en matière de carboneutralité et la Loi sur l’Office d’investissement du régime de pensions du Canada.

De mon point de vue, la portée est beaucoup trop grande pour un projet de loi d’intérêt public du Sénat. Essayer d’imposer des changements radicaux aux institutions financières sous réglementation fédérale est loin d’être une utilisation appropriée des projets de loi d’intérêt public du Sénat.

Toutefois, comme l’a dit le sénateur Harder dans son article La complémentarité : Le rôle constitutionnel du Sénat du Canada, cela ne signifie pas que le projet de loi n’a aucune raison d’être parce que je crois qu’il vise essentiellement à :

[…] influencer le processus politique en utilisant une vaste gamme d’outils de « puissance douce » ([…] telles que les études de politique publique et les projets de loi d’intérêt public du Sénat).

Le sénateur Harder ajoute ceci :

Le Sénat fonctionne à merveille lorsque son pouvoir est employé non pas pour contraindre, mais pour convaincre que ce soit par l’entremise d’une première ronde d’amendements des projets de loi reçus de la Chambre des communes, en profitant de la visibilité du Parlement pour influencer l’opinion publique, en déposant des projets de loi d’intérêt public du Sénat ou encore au moyen de la publication d’études visionnaires en matière de politique publique par ses comités.

L’utilisation d’une puissance douce au moyen du dépôt de projets de loi d’intérêt public du Sénat est la fonction qui convient pour cette mesure législative. À mon avis, le projet de loi S-243 remplit sa fonction.

Dans son discours sur ce projet de loi, la sénatrice Galvez a souligné que les institutions financières doivent contribuer à financer la transition vers des objectifs d’émissions durables et qu’il faut tenir compte de la vulnérabilité du secteur financier aux catastrophes liées au changement climatique. Comme je l’ai expliqué, ce processus est déjà bien engagé et la poursuite du projet de loi S-243 risquerait de le retarder, voire de lui nuire au lieu de l’aider.

À la lumière des initiatives déjà entreprises que j’ai décrites, et malgré les bonnes intentions de ce projet de loi, je ne pense pas que nous devrions le soutenir à l’étape de la deuxième lecture, et je ne recommande pas que nous le renvoyions en comité pour un examen plus approfondi. Les préoccupations soulevées dans ce projet de loi, bien que légitimes, semblent être déjà prises en compte et bien maîtrisées. Je vous remercie, honorables sénateurs.

Son Honneur la Présidente : Vous plaît-il, honorables sénateurs, d’adopter la motion?

Des voix : D’accord.

Une voix : Avec dissidence.

(La motion est adoptée et le projet de loi est lu pour la deuxième fois, avec dissidence.)

Renvoi au comité

Son Honneur la Présidente : Honorables sénateurs, quand lirons-nous le projet de loi pour la troisième fois?

(Sur la motion de la sénatrice Galvez, le projet de loi est renvoyé au Comité sénatorial permanent des banques, du commerce et de l’économie.)

Le Code criminel

Projet de loi modificatif—Deuxième lecture

L’ordre du jour appelle :

Reprise du débat sur la motion de l’honorable sénatrice Wallin, appuyée par l’honorable sénateur Tannas, tendant à la deuxième lecture du projet de loi S-248, Loi modifiant le Code criminel (aide médicale à mourir).

Son Honneur la Présidente : Vous plaît-il, honorables sénateurs, d’adopter la motion?

Des voix : D’accord.

Une voix : Avec dissidence.

(La motion est adoptée et le projet de loi est lu pour la deuxième fois, avec dissidence.)

Renvoi au comité

Son Honneur la Présidente : Honorables sénateurs, quand lirons-nous le projet de loi pour la troisième fois?

(Sur la motion de la sénatrice Wallin, le projet de loi est renvoyé au Comité sénatorial permanent des affaires juridiques et constitutionnelles.)

Le Code criminel

Deuxième lecture—Suite du débat

L’ordre du jour appelle :

Reprise du débat sur la motion de l’honorable sénateur Kutcher, appuyée par l’honorable sénateur Boehm, tendant à la deuxième lecture du projet de loi S-251, Loi abrogeant l’article 43 du Code criminel (appel à l’action numéro 6 de la Commission de vérité et réconciliation du Canada).

L’honorable Yonah Martin (leader adjointe de l’opposition) : Honorables sénateurs, je prends la parole au sujet du projet de loi S-251, Loi abrogeant l’article 43 du Code criminel (appel à l’action numéro 6 de la Commission de vérité et réconciliation du Canada).

J’aimerais commencer mon discours en répétant les propos tenus par le sénateur Kutcher lorsqu’il est intervenu à propos de ce projet de loi en octobre dernier. Il a dit : « Je crois que tous les sénateurs souhaiteraient que la violence contre les enfants cesse complètement. »

Je suis on ne peut plus d’accord avec lui. Or, évidemment, le souhaiter et le réaliser sont deux choses bien différentes. Dans le cas précis des parents, je ne peux imaginer qu’un parent sain d’esprit ou responsable souhaite infliger de la violence physique à son enfant. Que cela soit légal ou non, cela est pratiquement contre nature. À mon avis, ceux qui le font le font sans doute dans un accès de dépit ou d’épuisement, et non sans ressentir par la suite énormément de remords. Pour ceux dont ce n’est pas le cas, je doute que le fait d’abroger l’article 43 les arrêtera.

Honorables sénateurs, je comprends l’attrait de ce projet de loi, mais je crois que, en général, peu de parents ont besoin d’un projet de loi ou d’un article du Code criminel pour s’abstenir de battre leur enfant ou de lever la main sur lui. Nous avons beaucoup progressé depuis l’époque lointaine où l’on entendait couramment le dicton « Qui aime bien châtie bien ».

Au Canada, le Code criminel protège tous les enfants contre toute forme de violence. Il contient des infractions criminelles générales visant à protéger toute personne contre la violence, ainsi que plusieurs infractions destinées à protéger spécifiquement les enfants, telles que l’omission de fournir les choses nécessaires à l’existence, l’abandon, et plusieurs infractions sexuelles à l’égard d’un enfant.

Outre les protections prévues par le Code criminel, chaque province et territoire est doté de lois visant à protéger les enfants de la violence familiale et des mauvais traitements. Ces lois permettent à l’État d’intervenir lorsqu’un enfant doit être protégé contre des préjudices physiques, émotionnels et psychologiques, ou contre la négligence. De nombreuses provinces et de nombreux territoires ont également des lois et des politiques qui interdisent le recours aux châtiments corporels des enfants dans les foyers d’accueil, dans les services de garde d’enfants comme les garderies, ainsi que dans les écoles.

En Colombie-Britannique, l’article 38 de la Teachers Act interdit aux enseignants d’infliger :

a) des préjudices physiques à un élève;

b) des abus sexuels ou toute forme d’exploitation sexuelle à un élève;

c) des préjudices émotionnels importants à un élève.

Ce projet de loi, et l’article 43 qu’il vise à abroger, ne se limitent pas aux parents, mais englobent également les enseignants ou toute personne qui remplace le père ou la mère de l’enfant. L’article 43 du Code criminel prévoit ce qui suit :

Tout instituteur, père ou mère, ou toute personne qui remplace le père ou la mère, est fondé à employer la force pour corriger un élève ou un enfant, selon le cas, confié à ses soins, pourvu que la force ne dépasse pas la mesure raisonnable dans les circonstances.

Ce projet de loi, comme le sénateur Kutcher et d’autres l’ont souligné, est le plus récent d’une série de projets de loi qui visent à régler le problème des châtiments corporels. Le sénateur Kutcher a mentionné que l’ex-sénatrice Hervieux-Payette a présenté cette mesure à huit reprises avant que le sénateur Sinclair prenne la relève. Je crois que le sénateur Kutcher a également mentionné que les efforts pour l’adoption de cette mesure remontent à 1989.

Le fait que ces efforts remontent à aussi loin nous indique bien que le projet de loi à l’étude concerne un enjeu qui est loin d’être simple. Il convient de souligner qu’il n’y a pas si longtemps, en 2004, dans l’affaire Canadian Foundation for Children, Youth and the Law c. Canada (Procureur général), la Cour suprême du Canada a maintenu l’article 43 et statué qu’il ne violait pas la Charte canadienne des droits et libertés. Six des neuf juges sont arrivés à la conclusion que l’article ne porte pas atteinte aux droits de l’enfant à la sécurité de sa personne et à l’égalité et qu’il ne s’agissait pas d’une peine ou d’un traitement cruel et inusité.

(1740)

Dans ses conclusions, la cour a énoncé les lignes directrices suivantes :

Un, les parents et les personnes responsables de l’enfant peuvent seulement employer une force légère pour infliger une correction ou un châtiment corporel « ayant un effet transitoire et insignifiant ». Par exemple, donner la fessée ou une gifle à un enfant avec une force suffisante pour laisser une marque ou une ecchymose n’est pas considéré comme un effet transitoire et insignifiant ni raisonnable.

Deux, les enseignants ne peuvent pas employer la force physique, peu importe les circonstances. Les enseignants peuvent toutefois utiliser la force raisonnable si cela est approprié, par exemple pour expulser un enfant de la classe.

Trois, aucun châtiment corporel ne peut être infligé à un enfant de moins de deux ans ou de plus de 12 ans.

Quatre, un châtiment corporel ne doit pas être infligé sous l’effet de la colère ou de l’emportement à un enfant pour sa conduite.

Cinq, il ne faut jamais utiliser d’objets, par exemple une ceinture ou une règle, pour corriger un enfant et ce dernier ne doit jamais être frappé ou giflé au visage ou à la tête.

Six, tout usage de la force envers un enfant ne doit pas être dégradant, inhumain ou préjudiciable ou le placer dans une situation préjudiciable.

Sept, il ne faut pas infliger un châtiment corporel à un enfant qui est incapable de tirer une leçon de la situation en raison d’un handicap ou de tout autre facteur.

Huit, la gravité du comportement répréhensible de l’enfant n’est pas une justification pour déterminer la force raisonnable du châtiment corporel à infliger à l’enfant. La force utilisée doit être faible, peu importe le comportement de l’enfant.

La cour a statué — la majorité des juges de la cour, devrais-je dire — que l’emploi de la force doit être réfléchi et modéré, répondre au comportement réel de l’enfant et viser à contrôler ce comportement ou à y mettre fin ou encore à exprimer une certaine désapprobation symbolique à cet égard.

Je ne pense pas qu’il soit utile de formuler cette décision en termes incendiaires, en disant par exemple que s’il n’est plus légal d’agresser son épouse ou ses employés — comme le permettait la loi de 1892 — il est toujours permis, dans le Code criminel, d’agresser des enfants.

Soyons clairs : les parents qui dépassent les limites fixées par la Cour suprême du Canada, ceux qui maltraitent leurs enfants, méritent d’être punis.

Élever des enfants est une entreprise difficile, semée d’essais et d’erreurs. Les parents veulent ce qu’il y a de mieux pour leurs enfants. Ils veulent qu’ils se comportent bien et qu’ils soient des membres productifs de la société, qu’ils comprennent les règles et les nuances de l’entente avec les autres. La parentalité est simplement l’acte et l’attitude d’un amour inconditionnel. Dans ces conditions, l’utilisation d’une force corrective mineure est un outil auquel certains parents ont recours. Je dirais que tous les parents envisagent un jour ou l’autre de donner une fessée à leurs enfants. La plupart ne le font pas, mais punir les parents qui le font et les envoyer en prison pour cela causera irrémédiablement plus de tort à la famille.

Comme je l’ai mentionné précédemment, l’article 43 ne s’applique pas seulement aux parents, mais aussi aux enseignants, et la Cour s’est prononcée sur ce point également. Tout en excluant que les châtiments corporels soient autorisés dans les écoles, elle a déclaré que les enseignants pouvaient recourir à la force pour faire sortir les enfants des salles de classe ou pour s’assurer qu’ils respectent les instructions.

Honorables sénateurs, la triste réalité de notre société actuelle, c’est que vous risquez davantage de voir des élèves agresser des enseignants que l’inverse. Ne vous méprenez pas, ce n’est pas quelque chose de souhaitable ni quelque chose qui devrait être autorisé dans les écoles, mais le problème de la violence dans les écoles aujourd’hui est un problème général et, à bien des égards, pour certains segments influents et vocaux de notre société, la réponse à ce problème est complètement à l’opposé de ce à quoi vous pourriez vous attendre.

Les policiers, par exemple, ceux que l’on appelle habituellement en réponse à une attaque violente, sont désormais considérés comme les auteurs de la violence, parfois par leur simple présence. Je pense à un incident survenu récemment dans une école d’Ottawa où un enfant, à l’occasion d’une journée « amenez vos parents à l’école », n’a pas été autorisé à amener son père qui portait un uniforme de police. La police, en général, n’est souvent pas la bienvenue dans les écoles ni dans les commissions scolaires.

Honorables sénateurs, comme je l’ai dit, nous traitons d’une question très complexe. C’est pourquoi la cour a été divisée en 2004. Le juge Ian Binnie a soutenu dans son opinion dissidente que les enseignants ne devraient pas pouvoir se prévaloir de l’article 43. La juge Louise Arbour a quant à elle soutenu que l’article 43 comporte une « imprécision inconstitutionnelle », qu’il porte atteinte au droit de l’enfant à la sécurité de sa personne et qu’il « n’est pas conforme au principe de justice fondamentale ».

La juge Marie Deschamps a soutenu que l’article 43 viole l’article 15 de la Charte parce qu’il :

[...] encourage l’opinion selon laquelle les enfants ne méritent pas la même protection et le même respect de leur intégrité physique que les autres personnes, opinion qui est fondée sur l’idée désuète que les enfants sont des personnes de statut inférieur.

Elle estime qu’une loi qui autorise plus que des applications très mineures de la force porte atteinte de manière injustifiée aux droits des enfants.

Honorables sénateurs, bien que la majorité ait statué à la cour, comme le veut notre démocratie, ce serait un oubli dans nos débats de ne pas reconnaître qu’il y a eu aussi des opinions très différentes et très bien défendues.

C’est le cas au Sénat, comme en témoigne l’échange entre le sénateur Kutcher et le sénateur Plett. Comme vous l’avez deviné à partir de mes observations, bien que je respecte les opinions du sénateur Kutcher et de tous ceux qui se sont exprimés sur ce projet de loi depuis — pour la plupart en faveur —, j’ai des inquiétudes sur le projet de loi pour les raisons que j’ai exprimées.

Je suis cependant favorable à ce que ce projet de loi soit renvoyé à un comité en vue d’une étude et d’un débat plus approfondi.

Merci.

(Sur la motion du sénateur Plett, le débat est ajourné.)

La Loi de l’impôt sur le revenu

Projet de loi modificatif—Deuxième lecture

L’ordre du jour appelle :

Reprise du débat sur la motion de l’honorable sénatrice Martin, appuyée par l’honorable sénatrice Marshall, tendant à la deuxième lecture du projet de loi C-241, Loi modifiant la Loi de l’impôt sur le revenu (déduction des frais de déplacement pour les gens de métier).

Son Honneur la Présidente : Vous plaît-il, honorables sénateurs, d’adopter la motion?

Des voix : D’accord.

(La motion est adoptée et le projet de loi est lu pour la deuxième fois.)

Renvoi au comité

Son Honneur la Présidente : Honorables sénateurs, quand lirons-nous le projet de loi pour la troisième fois?

(Sur la motion de la sénatrice Martin, le projet de loi est renvoyé au Comité sénatorial permanent des finances nationales.)

La Corporation épiscopale catholique romaine d’Ottawa
La Corporation épiscopale catholique romaine du diocèse d’Alexandria-Cornwall

Projet de loi d’intérêt privé tendant à modifier la loi constitutive—Suite du débat

L’ordre du jour appelle :

Reprise du débat sur la motion de l’honorable sénatrice Clement, appuyée par l’honorable sénatrice Duncan, tendant à la deuxième lecture du projet de loi S-1001, Loi portant fusion de La Corporation Épiscopale Catholique Romaine d’Ottawa et de la Roman Catholic Episcopal Corporation for the Diocese of Alexandria-Cornwall, in Ontario, Canada.

L’honorable Tony Dean : Honorables sénateurs, je prends la parole aujourd’hui pour appuyer le projet de loi S-1001, Loi portant fusion de La Corporation Épiscopale Catholique Romaine d’Ottawa et de la Roman Catholic Episcopal Corporation for the Diocese of Alexandria-Cornwall, in Ontario, Canada.

Ce projet de loi d’intérêt privé a été présenté au Sénat par notre collègue la sénatrice Clement le 19 avril dernier. Il a été précédé de la première étape nécessaire, à savoir le dépôt d’une pétition au Sénat, ce qui a été fait par la sénatrice Clement le 18 avril dernier.

Comme l’a souligné la sénatrice Clement, les projets de loi d’intérêt privé ont traditionnellement été utilisés pour accorder des divorces, mais ils peuvent également modifier des actes constitutifs existants, ce qui est le cas ici. Le 3 mai 2023, la sénatrice Clement a ouvert le débat à l’étape de la deuxième lecture. Nous avons donc eu plus d’un mois pour examiner la mesure législative et y réfléchir.

Chers collègues, cette proposition culminante fait suite à des années de discussions entre l’archidiocèse d’Ottawa et le diocèse de Cornwall, qui ont reconnu l’évolution et la baisse des inscriptions, ainsi que les avantages des économies administratives et financières qui découleraient de la fusion. Bien entendu, ce processus n’est pas sans rappeler celui des fusions municipales, que nous connaissons peut-être mieux.

(1750)

Avant cela, en 2020, le pape François a annoncé par une bulle pontificale la fusion canonique du diocèse d’Alexandria-Cornwall et de l’archidiocèse d’Ottawa, créant ainsi l’archidiocèse d’Ottawa‑Cornwall.

Chers collègues, je sais que beaucoup d’entre vous s’interrogent sur le concept de bulle pontificale, alors je vais tout de suite faire éclater celle-ci et expliquer qu’une bulle pontificale est un type de décret public, de lettres patentes ou de charte émis par un pape de l’Église catholique. Elle tire son nom du sceau de plomb, la bulla, qui était traditionnellement apposé à la fin d’un document pour l’authentifier. Les bulles pontificales sont utilisées au moins depuis le VIe siècle.

Pour en revenir au présent, chers collègues, à ce stade, un projet de loi d’intérêt privé déposé au Sénat est nécessaire pour achever la fusion civile. Notre collègue la sénatrice Clement s’en est chargée.

Ce projet de loi donnera un effet juridique à la fusion de La Corporation Épiscopale Catholique Romaine d’Ottawa et de la Roman Catholic Episcopal Corporation for the Diocese of Alexandria-Cornwall. Les biens, les dettes et les créances du diocèse fusionné seront la responsabilité de la corporation nouvellement fusionnée.

Voici deux courts exemples parmi tant d’autres : les biens de chacune des corporations fusionnantes appartiennent à la corporation; la corporation est responsable des obligations de chacune des corporations fusionnantes; toute cause d’action déjà née à la date d’entrée en vigueur de la présente loi qui engage une des corporations fusionnantes devient celle de la corporation; etc.

Je sais que vous voudrez tous examiner le libellé de ce qui est un très court projet de loi.

Comme vous l’aurez compris, chers collègues, il s’agit d’un projet de loi relativement simple, et la sénatrice Clement a bien fait son travail, y compris avant de se présenter devant nous au Sénat, en participant à des consultations dans la collectivité au début du processus, il y a quelques années. Ce projet de loi a été élaboré avec les conseils des conseillers juridiques principaux du Sénat et il est prêt à passer à l’étape suivante.

Notre collègue la sénatrice Martin en est la porte-parole, et je ne doute pas qu’elle aura de bons mots à dire à son sujet.

Je vous remercie, chers collègues. Il s’agit d’un projet de loi simple que nous pouvons traiter sans attendre. Merci de votre attention.

(Sur la motion de la sénatrice Martin, le débat est ajourné.)

Obtenir des résultats dès maintenant pour les Canadiens : une entente de soutien et de confiance

L’impact sur les finances publiques du Canada de l’entente néo-démocrate—libérale—Interpellation—Suite du débat

L’ordre du jour appelle :

Reprise du débat sur l’interpellation de l’honorable sénateur Plett, attirant l’attention du Sénat sur l’impact sur les finances publiques du Canada de l’entente NPD-libérale intitulée Obtenir des résultats dès maintenant pour les Canadiens : une entente de soutien et de confiance.

L’honorable Donald Neil Plett (leader de l’opposition) : Honorables sénateurs, je constate que cet article en est à son 15e jour, et je ne suis pas prêt à intervenir. Je suis plutôt épuisé. Par conséquent, avec le consentement du Sénat et nonobstant l’article 4-15(3) du Règlement, je propose l’ajournement du débat pour le reste du temps dont je dispose.

Son Honneur la Présidente : Le consentement est-il accordé, honorables sénateurs?

Des voix : D’accord.

(Le débat est ajourné.)

Droits de la personne

Autorisation au comité de déposer des rapports sur des questions concernant les droits de la personne en général auprès du greffier pendant l’ajournement du Sénat

L’honorable Salma Ataullahjan, conformément au préavis donné le 6 juin 2023, propose :

Que le Comité sénatorial permanent des droits de la personne soit autorisé, nonobstant les pratiques habituelles, à déposer auprès du greffier du Sénat, au plus tard le 30 septembre 2023, des rapports provisoires portant sur des questions concernant les droits de la personne en général, si le Sénat ne siège pas à ce moment-là, et que lesdits rapports soient réputés avoir été déposés au Sénat.

Son Honneur la Présidente : Les honorables sénateurs sont-ils prêts à se prononcer?

Des voix : Le vote!

Son Honneur la Présidente : Vous plaît-il, honorables sénateurs, d’adopter la motion?

Des voix : D’accord.

(La motion est adoptée.)

Projet de loi de Jane Goodall

Projet de loi modificatif—Retrait du préavis de motion tendant à autoriser le Comité des affaires juridiques et constitutionnelles à étudier la teneur du projet de loi

À l’appel de la motion no128 par l’honorable Marty Klyne :

Que, nonobstant toute disposition du Règlement, tout ordre antérieur ou toute pratique habituelle, et sans entraver les travaux relatifs au projet de loi S-241, Loi modifiant le Code criminel et la Loi sur la protection d’espèces animales ou végétales sauvages et la réglementation de leur commerce international et interprovincial (grands singes, éléphants et certains autres animaux), le Comité sénatorial permanent des affaires juridiques et constitutionnelles soit autorisé à étudier, afin d’en faire rapport, les aspects juridiques et constitutionnels de la teneur du projet de loi S-241;

Qu’il soit entendu que, si le projet de loi S-241 :

1.a été renvoyé à un comité avant l’adoption de cette motion, l’adoption de cette motion n’ait aucun effet sur ce renvoi;

2.est renvoyé à un comité après l’adoption de cette motion, ce renvoi n’ait aucun effet sur l’étude des aspects juridiques et constitutionnels de la teneur du projet de loi telle qu’autorisée par cette motion.

L’honorable Marty Klyne : Honorables sénateurs, conformément à l’article 5-10(2) du Règlement, je retire ce préavis de motion.

Son Honneur la Présidente : Le consentement est-il accordé, honorables sénateurs?

Des voix : D’accord.

(Le préavis de motion est retiré.)

(À 17 h 56, le Sénat s’ajourne jusqu’au mardi 13 juin 2023, à 14 heures.)

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